Question de Mme KLÈS Virginie (Ille-et-Vilaine - SOC-A) publiée le 04/03/2010

Mme Virginie Klès attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur les deux décrets publiés au journal officiel, le 18 octobre 2009, concernant les fichiers de police censés succéder à EDWIGE et EDVIRSP. Le premier institue un traitement automatisé de données à caractère personnel relatif aux enquêtes administratives liées à la sécurité publique, et le second prévoit un traitement de données à caractère personnel relatif à la prévention des atteintes à la sécurité publique et vise les personnes dont l'activité individuelle ou collective indique qu'elles peuvent porter atteinte à la sécurité publique.
Le fichage des enfants âgés d'au moins 13 ans y est prévu afin de, soit disant, prévenir les atteintes à la sécurité publique, ceci au mépris des règles strictes que détermine la Convention internationale des droits de l'enfant.
Ces fichiers constituent une atteinte à la vie privée et à des droits fondamentaux comme le droit à l'oubli et à la présomption d'innocence.
Elle s'interroge sur la légalité de ces décrets, ainsi que sur leur contradiction avec la Convention internationale des droits de l'enfant, ratifiée par la France, et lui demande comment il justifie son non-respect et les mesures qu'il entend prendre pour remédier à cette situation.

- page 496


Réponse du Ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales publiée le 05/08/2010

La réforme des services de renseignement du ministère de l'intérieur a conduit à réorganiser les anciennes missions de renseignement intérieur et d'information générale et à supprimer le fichier des renseignements généraux. Afin de permettre aux services de renseignement de remplir leurs missions de prévention des atteintes à l'ordre public, le Gouvernement a élaboré deux nouveaux décrets prévoyant la création de deux applications distinctes répondant à des finalités différentes. Le premier de ces traitements concerne les personnes dont l'activité individuelle ou collective indique qu'elles peuvent porter atteinte à la sécurité publique. Le second vise à recueillir des données concernant des personnes faisant l'objet d'enquêtes administratives en application des dispositions du premier alinéa de l'article 17-1 de la loi du 21 janvier 1995. La CNIL a rendu un avis favorable à ces deux projets, le 11 juin 2009, et ils ont également reçu un avis favorable du Conseil d'État, le 15 juillet 2009. Ces décrets, publiés au Journal officiel le 16 octobre 2009 sous les numéros 2009-1249 et 2009-1250, portent création de deux traitements de données à caractère personnel relatifs pour l'un, à la prévention des atteintes à la sécurité publique, et pour l'autre aux enquêtes administratives liées à la sécurité publique. Ils garantissent un équilibre entre les impératifs liés à la protection des libertés individuelles et collectives, d'une part, et la nécessité pour les forces de l'ordre de disposer des informations nécessaires au maintien de la sécurité publique, d'autre part. S'agissant plus précisément du traitement relatif aux atteintes à la sécurité publique et de la possibilité pour les services de collecter dans ce cadre des données relatives à des mineurs : eu égard à leur implication croissante dans des actes portant atteinte à la sécurité publique, mais également pour tenir compte de l'évolution de leur personnalité avec l'âge, il est nécessaire d'autoriser le recueil des données concernant les mineurs d'au moins 13 ans, tout en instaurant à leur égard un véritable « droit à l'oubli ». Cette possibilité ne contrevient à aucune des stipulations de la convention des Nations-unies relative à la protection des droits de l'enfant. Tout au contraire, des garanties spécifiques sont apportées dans la collecte et la conservation d'informations les concernant. Comme pour les majeurs, l'enregistrement des données ne se fonde pas sur de simples suspicions mais résulte ainsi de la constatation d'activités qui indiquent que le mineur peut porter atteinte à la sécurité publique. La durée maximale de conservation des données concernant ces mineurs est fixée à trois ans à compter de l'intervention du dernier événement ayant donné lieu à un enregistrement dans le traitement. Elle est donc plus brève que la durée maximale de conservation applicable aux personnes majeures, qui est de dix ans, et consacre en conséquence un véritable droit à l'oubli. Au-delà de ce texte, le Gouvernement souhaite renforcer les garanties offertes aux mineurs en créant prochainement un référent national chargé de veiller au respect de ce droit à l'oubli. Une modification du décret n° 2009-1249 est donc en cours afin de confier à ce magistrat mineurs ou à la pertinence de leur maintien. Il lui reviendra également d'aviser le responsable du traitement des éventuelles méconnaissances aux règles relatives à la conservation des données relatives aux mineurs qu'il aurait constatées. Le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et la Commission nationale de l'informatique et des libertés ont examiné ce projet de décret qui sera transmis au Conseil d'État, dès le mois de juillet. S'agissant du traitement relatif aux enquêtes administratives liées à la sécurité publique, les données enregistrées ne peuvent concerner que les mineurs de plus de seize ans, âge à partir duquel ils peuvent faire l'objet d'une procédure de recrutement professionnel. In fine, les données recueillies au titre des enquêtes administratives seront conservées pour une durée maximale de cinq ans à compter de leur enregistrement ou de la cessation des fonctions ou de la mission de l'intéressé. Celles recueillies au titre de la finalité de sécurité publique seront conservées dix ans à compter de la date du dernier événement ayant donné lieu à un enregistrement dans le fichier. La traçabilité des consultations est assurée dans le cadre des deux traitements susmentionnés afin de prévenir tout détournement de leurs finalités.

- page 2039

Page mise à jour le