Question de M. DOMEIZEL Claude (Alpes de Haute-Provence - SOC) publiée le 27/05/2010

M. Claude Domeizel attire l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports sur l'agression mortelle dont a été victime le 12 novembre 2008, un étudiant de 26 ans, dans les rues de Grenoble. L'auteur des faits s'était soustrait de la surveillance d'un l'hôpital psychiatrique.

A la suite de cet événement qui a provoqué un grand émoi dans l'opinion publique, une enquête a été diligentée à la demande du Président de la République et confiée à l'inspection générale des affaires sanitaires et sociales. Il semblerait que cette dernière ait déposé trois mois après les faits un pré-rapport communiqué pour observations aux membres du centre hospitalier psychiatrique dans lequel l'agresseur était soigné. Il se demande si ce rapport est rendu public.

Par ailleurs, les personnes concernées par ces drames déplorent que la prise en charge spécifique des malades psychiatriques dangereux présente de nombreuses lacunes notamment un déficit de dialogue entre les autorités judiciaires, administratives et médicales.

Il lui demande si, depuis, des mesures ont été prises pour restaurer ce dialogue indispensable entre les différentes autorités.

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Réponse du Secrétariat d'État à la justice publiée le 07/07/2010

Réponse apportée en séance publique le 06/07/2010

M. Claude Domeizel. Je souhaitais attirer l'attention de Mme la ministre de la santé et des sports, mais également la vôtre, monsieur le secrétaire d'État à la justice, sur l'agression mortelle dont a été victime, le 12 novembre 2008, un étudiant de vingt-six ans, dans les rues de Grenoble. L'auteur des faits s'était soustrait à la surveillance d'un l'hôpital psychiatrique.

À la suite de cet événement, qui a provoqué un grand émoi dans l'opinion publique, une enquête a été diligentée à la demande du Président de la République et confiée à l'Inspection générale des affaires sociales. Il semblerait que cette dernière ait déposé, trois mois après les faits, un pré-rapport, communiqué pour observations aux membres du centre hospitalier psychiatrique où l'agresseur était soigné. Je souhaiterais savoir, monsieur le secrétaire d'État, si ce rapport est rendu public.

Par ailleurs, les personnes concernées par ce drame, que j'ai rencontrées, déplorent que la prise en charge spécifique des malades psychiatriques dangereux présente de nombreuses lacunes, notamment un déficit de dialogue entre les autorités judiciaires, administratives et médicales. Des mesures ont-elles été prises poux restaurer ce dialogue indispensable entre les différentes autorités ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Jean-Marie Bockel, secrétaire d'État à la justice. Je vous présente les excuses de Mme Bachelot-Narquin, qui est en déplacement, ce matin, avec le Président de la République.

L'agression dont vous faites état a été commise le 12 novembre 2008. Ce drame a donné lieu à une saisine de l'Inspection générale des affaires sociales, afin que les faits soient analysés avec précision. Le rapport a été élaboré dans le cadre du respect de la procédure du contradictoire et remis à la ministre de la santé et des sports, qui l'avait diligenté.

Ce rapport est un document administratif et relève, à ce titre, des dispositions de la loi du 17 juillet 1978 pour sa diffusion. Certains rapports ne sont pas communicables parce que ce sont des documents préparatoires à une décision ou parce qu'ils portent atteinte à des intérêts publics ou privés, tel le secret médical.

En tout état de cause, même en l'absence de diffusion publique du rapport de l'IGAS, le Gouvernement a pris différentes mesures pour améliorer le suivi des patients atteints de troubles psychiatriques, s'agissant notamment des situations les plus dangereuses.

Le projet de loi relatif aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques a été présenté au conseil des ministres le 5 mai dernier, et contient différentes dispositions pour améliorer le suivi des patients, leur sécurité et celle des tiers.

Il prévoit, d'abord, pour les patients en soins sans consentement pris en charge en dehors de l'hôpital, d'assurer la continuité de la prise en charge en envisageant la possibilité de réinsérer le patient dans les soins en cas d'absence de présentation aux consultations.

Ensuite, pour les patients les plus difficiles, en cas de demande d'aménagement ou de levée de la mesure, le projet de loi permet aux préfets de disposer de l'avis d'un collège de soignants. Ils peuvent après autoriser une prise en charge en dehors de l'hôpital ou la levée des soins sans consentement. Il faut, par ailleurs et de façon indépendante, un certificat médical circonstancié du médecin qui prend effectivement en charge le patient.

Cette vigilance accrue des professionnels et des pouvoirs publics à l'égard de la très faible part des malades atteints de troubles mentaux susceptibles d'actes graves de violence, pourra davantage garantir la sécurité des tiers. La finalité est de contribuer à rendre la société plus accueillante, plus compréhensive et plus tolérante à l'égard de la grande majorité des personnes qui ont un trouble mental mais qui ne présentent pas de danger pour autrui.

Le plan de sécurisation des établissements de santé ayant une autorisation en psychiatrie, annoncé par le Président de la République dans son discours prononcé le 2 décembre 2008, a été mis en œuvre.

Ainsi, 70 millions d'euros y ont été affectés, dont 30 millions d'euros pour l'équipement en dispositifs de sécurisation, et 40 millions d'euros destinés à la création de quatre nouvelles unités pour malades difficiles.

La mise en œuvre de ce plan a permis à plus de 300 établissements autorisés en psychiatrie de définir leurs propres plans de sécurisation, de se doter de dispositifs de contrôle des accès extérieurs, de créer des unités fermées ou susceptibles d'être fermées destinées aux patients hospitalisés sans leur consentement et de créer 200 chambres d'isolement supplémentaires.

Concernant le centre hospitalier de Saint-Égrève, il a bénéficié de crédits au titre de ce plan, qui contribueront à renforcer la surveillance des patients, notamment ceux dont l'état compromet la sûreté des personnes ou porte atteinte à l'ordre public.

Une expérimentation sur les groupements de coopération sanitaire en psychiatrie va être également lancée en début d'automne. Elle porte sur la capacité du groupement à assurer, sur une aire géographique donnée, la coordination des professionnels intervenant dans la prise en charge de patients souffrant de troubles mentaux, et de définir la mission de chacun, pour répondre aux situations spécifiques et identifiées comme n'ayant pas reçu de réponse pertinente en matière d'organisation de l'offre de soins.

Voilà quelques éléments assez précis de la mise en œuvre de ce plan à la suite de cette agression qui avait, à juste titre, suscité une grande émotion.

M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel.

M. Claude Domeizel. Je vous remercie de cette réponse très détaillée, monsieur le secrétaire d'État. Je la transmettrai à la famille et aux proches de ce jeune étudiant, même si, nous le savons, elle n'est guère susceptible d'apaiser la grande peine que les uns et les autres éprouvent toujours. Ce sera une réponse aux questions qu'ils m'ont posées lors d'une visite récente.

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