Question de M. DÉTRAIGNE Yves (Marne - UC) publiée le 24/02/2011

M. Yves Détraigne attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé sur la transmission des feuilles de soins électroniques (FSE) et sur l'incitation financière versée aux médecins en contrepartie de leur collaboration.

Les médecins ont, pour la plupart, participé pleinement, dès le début, à la dématérialisation des feuilles de soins alors même que ce procédé entraînait pour eux un coût de l'ordre de 1 000 € en moyenne par an contre un coût nul avec des feuilles papier et que la caisse prévoyait seulement une indemnisation à hauteur de 380 € par an environ. Ils ont constaté rapidement qu'un taux de télétransmission à 100 % s'avérait impossible à atteindre pour plusieurs types de raisons : carte oubliée par les patients, carte retenue par la CPAM elle-même et remplacée par une attestation papier non compatible avec un lecteur, carte parfois défectueuse, ou encore visite à domicile…

S'il existe bien des médecins qui refusent de télétransmettre, ne s'équipent pas et ne font donc aucune FSE, ceux qui, en revanche, font le choix de s'équiper cherchent a contrario à rentabiliser leur investissement et, surtout en cas de tiers payant, n'ont aucun intérêt à faire des feuilles de soins papier. Cette seconde catégorie de professionnels ne refuse donc aucune carte qui lui est présentée alors même que la caisse n'a mis en place aucun moyen de substitution à l'absence de carte…

Aussi, le fait de ne pas verser l'incitation financière prévue à un médecin n'atteignant pas le taux de 75 % de télétransmission parait donc excessif puisqu'il ne peut en aucun cas être tenu responsable de la non transmission par voie électronique.

Il propose donc d'imposer un taux de 70 % qui paraîtrait plus juste et de prévoir, dans un même temps, des pénalités pour une CPAM qui tarderait à remplacer une carte vitale. Ces deux propositions seraient de nature à ne pas décourager les médecins qui n'ont pas à être sanctionnés pour des fautes qu'ils ne commettent pas…

Considérant qu'il ne faudrait pas que ces professionnels – soucieux d'atteindre les quotas demandés – ne fassent le choix, en dernier ressort, de refuser tout simplement de recevoir en consultation un patient qui a oublié sa carte vitale ou dont la carte ne fonctionne pas, il lui demande de quelle manière il entend régler ce dossier.

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Réponse du Ministère des solidarités et de la cohésion sociale publiée le 27/04/2011

Réponse apportée en séance publique le 26/04/2011

M. Yves Détraigne. Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention et celle du Gouvernement sur la transmission des feuilles de soins électroniques par les médecins, et sur l'incitation financière qui leur est versée en contrepartie de leur collaboration.

Comme vous le savez, les médecins ont, pour la plupart, participé pleinement, dès le début, à l'opération de dématérialisation des feuilles de soins, alors même que ce procédé entraînait pour eux un coût supplémentaire et que la caisse prévoyait seulement une indemnisation à hauteur de 380 euros par an environ.

Ils ont rapidement constaté qu'un taux de télétransmission de 100 % était impossible à atteindre pour plusieurs raisons.

D'abord, certains patients se rendent chez leur médecin en ayant oublié leur carte vitale. Ensuite, certaines cartes peuvent être retenues par la Caisse primaire d'assurance maladie elle-même et remplacées par une attestation papier évidemment non compatible avec un lecteur. En outre, des cartes sont parfois défectueuses. Enfin, pour les visites à domicile, les médecins ne disposent pas du lecteur.

S'il existe bien des médecins qui refusent de télétransmettre, ne s'équipent pas et ne font donc aucune transmission de feuilles de soins électroniques, ceux qui, en revanche, font le choix de s'équiper cherchent a contrario à « rentabiliser » leur investissement et, surtout en cas de tiers payant, n'ont aucun intérêt à faire des feuilles de soins papier. En revanche, la Caisse primaire d'assurance maladie n'a mis en place aucun moyen de substitution à l'absence de carte.

Le fait de ne pas verser l'incitation financière prévue à un médecin qui n'atteint pas le taux de 75 % de télétransmission paraît donc excessif, puisqu'il ne peut en aucun cas être tenu pour responsable de la non-transmission des feuilles de soins par voie électronique.

Il paraîtrait plus juste d'imposer un taux de 70 % de télétransmission et de prévoir, dans le même temps, des pénalités pour une caisse d'assurance maladie qui tarderait à remplacer une carte vitale. Ces deux propositions seraient de nature à ne pas décourager les médecins, qui n'ont pas à être sanctionnés pour un défaut de transmission dont ils ne sont pas responsables en réalité.

Considérant qu'il ne faudrait pas que ces professionnels, qui sont soucieux d'atteindre les quotas exigés, fassent le choix en dernier ressort de refuser tout simplement de recevoir en consultation un patient qui aurait oublié sa carte vitale ou dont la carte ne fonctionnerait pas, je vous demande donc, madame la ministre, de bien vouloir m'indiquer la manière dont vous entendez régler ce dossier.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. Monsieur le sénateur, je ne vais pas régler ce problème, c'est M. Xavier Bertrand qui le réglera et je vous prie de bien vouloir excuser son absence puisqu'il est actuellement en réunion avec l'ensemble des syndicats au ministère du travail, de l'emploi et de la santé. Mais je ne suis pas complètement ignorante de ce dossier.

Comme vous le savez, depuis le 1er janvier 2011 et en application du nouveau règlement arbitral, le médecin peut bénéficier non seulement du versement de 7 centimes d'euros par feuille de soin télétransmise, mais également d'une nouvelle aide de 250 euros si son taux de télétransmission est effectivement supérieur à 75 %.

La télétransmission est un dispositif particulièrement important, puisqu'il permet – vous avez beaucoup parlé des médecins, permettez-moi d'évoquer également les patients – en premier lieu aux patients ou aux professionnels en tiers payant de bénéficier de délais de remboursement très rapides. Cette procédure simplifie les démarches des assurés et diminue les coûts de gestion de l'assurance maladie. C'est donc une démarche extrêmement intéressante pour tout le monde : les médecins, les patients et l'organisme gestionnaire.

Après plusieurs années qui ont permis de conforter l'utilisation de la carte vitale dans le système de remboursement des soins, et qui se sont accompagnées, notamment pour les professionnels concernés, de mesures pour faciliter la transmission électronique, l'instauration d'une contribution sur les feuilles de soins papier avait une portée incitative visant à l'achèvement de la montée en charge de la télétransmission, puisqu'elle laissait une marge très importante d'une feuille sur quatre non télétransmise pour bénéficier de ces aides, ce qui était considérable.

Nous avions donc initialement retenu un pourcentage en deçà duquel pouvait être appliquée une pénalité. Or, comme vous me le rapportez, les médecins se demandent s'ils vont être pénalisés parce qu'ils n'ont pas atteint ce pourcentage alors qu'ils n'en sont pas loin. (M. Yves Détraigne opine.) D'autres font beaucoup de visites à domicile ou sont face à des patients qui n'apportent pas leur carte vitale.

Le Gouvernement, dans le cadre de la proposition de loi de votre collègue Jean-Pierre Fourcade – je n'y suis pas pour rien puisque je lui ai moi-même demandé de l'élaborer…

M. le président. Ah ! La vérité éclate !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. La vérité n'éclate pas ; vous la connaissez très bien. D'ailleurs, M. Fourcade lui-même le dit. Aussi, ne me faites pas croire à des révélations. Le président Fischer aime toujours jouer certains personnages…

Le Gouvernement, disais-je, dans le cadre des débats sur cette proposition de loi, a déposé, le 13 avril dernier, un amendement que l'Assemblée nationale a adopté afin que les médecins qui ne télétransmettent pas ou télétransmettent peu le fassent davantage.

Dans ce contexte, il est apparu que les modalités précises ne pouvaient être fixées par la loi, et le ministre Xavier Bertrand a décidé après consultation des partenaires conventionnels et du directeur général de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie, l'UNCAM, de renvoyer à la négociation conventionnelle les modalités de mise en œuvre d'une télétransmission renforcée, en se donnant un délai pour cette négociation. La définition du taux de télétransmission à partir duquel serait applicable la contribution sera discutée dans ce cadre fixé par la loi. La question du taux pris en compte pour le versement de l'aide forfaitaire relève, elle aussi, de la discussion conventionnelle.

Par conséquent, aussi bien le pourcentage que la sanction financière éventuelle font partie du champ de la négociation conventionnelle.

Vous voilà donc pleinement renseigné, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Yves Détraigne.

M. Yves Détraigne. Je vous remercie, madame la ministre, de ces précisions. Renvoyer aux négociations conventionnelles les clauses qui permettront d'améliorer le taux de télétransmission me semble constituer une avancée.

Cependant, s'agissant de la télétransmission, un acteur a, selon moi, été oublié : c'est tout simplement le patient. Les exemples que j'ai cités et qui démontrent l'insuffisance de la télétransmission sont dus en grande partie au défaut d'information du patient. Il serait donc utile de réfléchir à la sensibilisation du patient, qui ignore souvent tous les avantages qu'il peut lui-même tirer de l'utilisation de la carte électronique.

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