Question de M. LORRAIN Jean-Louis (Haut-Rhin - UMP) publiée le 05/05/2011

M. Jean-Louis Lorrain attire l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale sur la composition des commissions départementales d'aide sociale (CDAS) suite à la décision n° 2010-110 QPC du 25 mars 2011. Dans celle-ci, le Conseil constitutionnel juge que la composition actuelle des CDAS, juridictions administratives spécialisées régies par l'article L. 134-6 du code de l'action sociale et des familles (CASF), ne satisfait pas aux exigences du procès équitable en termes d'indépendance et d'impartialité, selon l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

Ne censurant pas l'article L. 134-6 du CASF dans son entier mais uniquement ses deuxième et troisième alinéas qui prévoient la présence au sein de la CDAS, respectivement, des trois conseillers généraux et des trois fonctionnaires, le Conseil constitutionnel précise, d'une part, qu'en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la QPC et que la disposition législative inconstitutionnelle ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision. D'autre part, il rappelle qu'il est habilité à fixer la date de l'abrogation et à reporter dans le temps les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité en précisant les conditions et limites.
En l'espèce, la censure suppose qu'à compter de la publication au JORF de la décision (soit le 26 mars 2011), les CDAS doivent statuer dans une composition où ni les conseillers généraux ni les fonctionnaires ne peuvent siéger. S'agissant des décisions déjà rendues par les CDAS à cette date, la déclaration d'inconstitutionnalité peut être invoquée à l'encontre d'une décision qui n'a pas acquis un caractère définitif, si les parties ont contesté la composition de la CDAS.

Etant donné l'importance du rôle des CDAS (20 000 dossiers par an) dans l'aide sociale aux personnes âgées et aux personnes handicapées, il lui demande s'il est prévu une intervention du Gouvernement dans la définition de la composition des CDAS, voire des commissions centrales d'aide sociale (CCAS), qui jugent en appel, et à quelle échéance.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre des solidarités et de la cohésion sociale publiée le 25/08/2011

La composition des commissions départementales d'aide sociale (CDAS), juridictions administratives spécialisées, a été substantiellement modifiée par l'intervention de la décision n° 2010-110 QPC du 25 mars 2011 du Conseil constitutionnel. La formation de jugement de cette juridiction est dorénavant uniquement constituée de son président, ayant voix prépondérante, et de son secrétaire, faisant fonction de rapporteur. Une communication a été adressée par la directrice générale de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) aux préfets de régions et de départements afin de les informer du contenu et de la portée de cette décision. Un appui technique de l'administration centrale est également mis à disposition des services déconcentrés qui assurent le secrétariat des CDAS sous l'autorité de leurs présidents (le président du tribunal de grande instance du chef-lieu ou le magistrat désigné par lui pour le remplacer) et qui doivent veiller à adapter l'organisation du traitement des recours contentieux. Les CDAS continuent aujourd'hui de fonctionner et les audiences doivent être maintenues : en effet, la décision du Conseil constitutionnel précitée prévoit expressément que les CDAS continueront de fonctionner selon une composition modifiée. Toute autre suite donnée non conforme à cette décision constituerait un manquement à l'article 62 de la Constitution selon lequel les décisions du Conseil constitutionnel « s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles ». Toutefois, à moyen terme, cette nouvelle configuration n'est pas favorable à une bonne administration du contentieux de l'aide sociale et révèle des difficultés d'organisation et de fonctionnement qui s'avèrent d'autant plus regrettables que les requérants sont souvent fragilisés par une situation personnelle difficile. Par ailleurs, bien que le Conseil constitutionnel n'ait pas expressément statué sur les dispositions relatives à l'exercice des fonctions de rapporteur, des interrogations ne peuvent que demeurer quant à la compatibilité de l'exercice de ces fonctions par des fonctionnaires de l'État en activité avec les principes d'indépendance et d'impartialité de celles-ci. Enfin, les règles procédurales applicables devant les CDAS n'ont jamais été précisément définies. La ministre des solidarités et de la cohésion sociale souhaite donc que soit envisagée une réforme de cette juridiction. Qu'il s'agisse de maintenir les CDAS - en garantissant pleinement l'impartialité des CDAS et l'indépendance de ses membres et assurant pleinement leur indépendance - ou de transférer son contentieux à d'autres juridictions ne souffrant pas de telles critiques, ou même de retenir des variantes entre ces deux scenarii, le Parlement aura naturellement à statuer sur l'avenir des CDAS. Les différentes hypothèses seront prochainement éclairées par les résultats d'une enquête nationale destinée à évaluer l'activité et le mode de fonctionnement des CDAS.

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