Question de Mme GIUDICELLI Colette (Alpes-Maritimes - UMP) publiée le 23/06/2011

Mme Colette Giudicelli attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, sur l'instrumentalisation qui est faite des enfants dans de nombreux conflits armés. Le rapport annuel du département d'État américain sur la traite des êtres humains dénombre six pays ayant mobilisé des enfants-soldats au cours de l'année 2009 : le Tchad, la République démocratique du Congo, le Soudan, le Yémen, la Somalie et la Birmanie. Aux États-Unis, le Child Soldier Prevention Act (loi de protection des enfants-soldats) stipule qu'aucune aide militaire américaine (aide financière, formation, etc.) ne peut être accordée aux pays qui recrutent des soldats mineurs. Cependant, l'administration américaine a récemment « permis » l'utilisation d'enfants-soldats dans quatre de ces pays, « dans l'intérêt national des États-Unis », préférant maintenir une coopération étroite. Elle aimerait connaître les informations dont dispose la France sur les enfants-soldats en activité dans le monde, sa position quant à leur utilisation et les mesures éventuellement prises pour tenter de lutter contre ce fléau.

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Réponse du Ministère des affaires étrangères et européennes publiée le 06/10/2011

Le nombre d'enfants soldats et d'enfants associés aux groupes et forces armés (comme éclaireurs, espions, serviteurs, esclaves sexuels...) dans le monde serait encore de l'ordre de 250 000. Selon le dernier rapport du secrétaire général des Nations unies relatif au sort des enfants en temps de conflit armé, en date du 23 avril 2011, la persistance de ce phénomène continue d'affecter en particulier l'Afghanistan, la République centrafricaine, le Tchad, la République démocratique du Congo, l'Ouganda, le Soudan, la Somalie, la Colombie, la Birmanie, le Népal, les Philippines, le Sri Lanka, l'Irak et le Yémen. La protection des enfants dans les conflits armés constitue une priorité pour la France. Aux Nations unies, la France a été à l'origine de la création en 2005 par le Conseil de sécurité du groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés (résolution 1612/2005 du Conseil de sécurité), dont elle a assumé la présidence jusqu'en 2009. Le groupe de travail examine les rapports établis sur la situation dans les pays problématiques identifiés et émet des recommandations à l'égard des gouvernements ou des groupes rebelles de ces pays. Six catégories de crimes contre les enfants dans des situations de conflit armé font l'objet d'un suivi particulier : recrutement ou emploi d'enfants soldats, meurtres ou mutilations d'enfants, viols d'enfant ou autres actes graves de violence sexuelle à leur égard, enlèvements d'enfants, attaques dirigées contre des écoles ou des hôpitaux, refus d'autoriser l'accès des organismes humanitaires aux enfants. C'est grâce à ce groupe de travail qu'ont été mises en oeuvre des listes d'infamie identifiant les auteurs de recrutement ou d'utilisation d'enfants soldats. La France a soutenu les efforts de la présidence allemande du groupe de travail sur les enfants et les conflits armés pour l'adoption par le Conseil de sécurité de la résolution 1998 le 12 juillet 2011, en vue de proposer des mesures visant à accroître la pression sur les parties qui persistent à commettre des violations sur les enfants en période de conflit armé. La France a été à l'origine de la tenue en février 2007 de la conférence « Libérons les enfants de la guerre », coorganisée avec l'UNICEF. Cette réunion ministérielle a débouché sur l'adoption des « principes et engagements de Paris », qui définissent des mesures concrètes en matière de prévention, de lutte contre l'impunité, de protection des enfants et de leur réinsertion dans leur famille ou leur communauté. En septembre 2011, quatre-vingt-quinze États avaient endossé ces engagements. La France a contribué à l'adoption par l'Union européenne en 2003 de lignes directrices sur les enfants et les conflits armés qui ont donné lieu à l'élaboration d'une stratégie de mise en Suvre ciblant dix-neuf pays prioritaires, révisée en décembre 2010. Elle a soutenu la conférence régionale de Ndjamena en juin 2010, à l'issue de laquelle six pays africains (Cameroun, Niger, Nigeria, République centrafricaine, Soudan, Tchad) se sont engagés à « garantir qu'aucun enfant de moins de dix-huit ans ne prenne part, directement ou indirectement, à des hostilités et le cas échéant à prévenir toute forme de recrutement ». L'ensemble de ces mesures a permis d'enregistrer des progrès importants. L'UNICEF contribue à elle seule à la réintégration de 10 000 enfants par an. Cependant, il est certain que le nombre d'enfants soldats reste préoccupant. C'est pourquoi la France souhaite que la communauté internationale renforce son engagement pour éradiquer ce phénomène. Elle continuera d'apporter son soutien à la campagne, lancée en 2010 par le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies pour les enfants et les conflits armés, en vue de parvenir à la ratification universelle du protocole facultatif concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés en 2012. Ce thème figurera parmi les objectifs du prochain forum ministériel de suivi des engagements de Paris, qui se tiendra à New York en marge de l'assemblée générale des Nations unies le 26 septembre 2011.

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