Question de Mme TERRADE Odette (Val-de-Marne - CRC-SPG) publiée le 14/07/2011

Mme Odette Terrade attire l'attention de Mme la secrétaire d'État chargée de la santé sur la possibilité pour les patients de s'informer sur l'existence de contrats passés entre leur médecin soignant avec des laboratoires pharmaceutiques. En effet, les États-Unis viennent de voter une loi en mars 2011, le Sunshine Act, qui oblige les firmes pharmaceutiques à publier sur un site internet gouvernemental les contrats et les paiements de toutes sortes effectués aux professionnels de santé. À l'instar de son collègue François Autain, président de la mission d'information Mediator : évaluation et contrôle des médicaments, qui propose de rendre publics les liens d'intérêts entre les médecins et l'industrie pharmaceutique, elle pense qu'il faut autoriser les ordres professionnels à rendre accessibles ces données aux patients qui le souhaitent. Dans ce cadre, le rapport d'information sur la réforme du système du médicament, adopté le 28 juin 2011, propose de « mettre en place un registre public des avantages consentis par l'industrie du médicament sur le modèle du Sunshine Act ». En France, une telle initiative serait bénéfique, notamment après la mise à jour, par différentes affaires de santé publique, comme le Mediator, du manque de transparence des liens qui subsistent entre les médecins et les professionnels de santé avec certains grands groupes pharmaceutiques. La question de l'indépendance du corps soignant vis-à-vis d'intérêts financiers et de l'influence, économique ou pas, que peuvent exercer les laboratoires sur ces professionnels tient une place de première importance. C'est pourquoi elle souhaite lui demander si les propositions émises par le rapport d'information susnommé seront prises en compte et ce qu'elle compte entreprendre pour défendre et renforcer la transparence et l'indépendance de l'ensemble des professionnels de santé par rapport aux grands groupes pharmaceutiques.

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Réponse du Secrétariat d'État chargé de la santé publiée le 06/10/2011

Outre l'enquête judiciaire ouverte sur le dossier Mediator, plusieurs missions (deux missions parlementaires, une seconde mission de l'Inspection générale des affaires sanitaires et sociales sur la pharmacovigilance et la gouvernance de la chaîne du médicament en France, ainsi que les différents groupes de travail constituant les Assises du Médicament) dont les rapports ont été rendus publics en juin, ont élaboré des propositions de réformes du système sanitaire des produits de santé. L'enjeu principal de rénovation du dispositif sanitaire réside essentiellement dans la réforme des processus d'évaluation, de décisions, de suivi, d'utilisation et de promotion des produits de santé, afin de garantir une sécurité optimale aux patients. Dans ce cadre, un projet de loi relatif à la modernisation du système des produits de santé a été présenté en conseil des ministres le 1er août 2011, afin d'être soumis en session extraordinaire à l'Assemblée nationale, réunie. Ce projet de loi, dans sa première partie, tend à réformer profondément les règles destinées à assurer la transparence des liens d'intérêts en instaurant un corpus commun de règles déontologiques. Il repose ainsi sur la lutte contre les conflits d'intérêt et la transparence des décisions. En ce sens, il crée tout d'abord un « Sunshine Act » à la française par l'institution d'un système de déclaration par les industriels des avantages (en nature ou en espèces) qu'ils procurent aux professionnels de santé, aux associations de professionnels de santé, aux étudiants en médecine, aux associations de patients, aux fondations, aux organes de presse spécialisée ou aux sociétés savantes ainsi qu'aux sociétés ou organismes de conseil intervenant dans ce secteur. Ce système est assorti de sanctions pénales. Ainsi, omettre sciemment pour une entreprise de publier les conventions et les avantages consentis est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 € d'amende, sanction pouvant être assortie de peines complémentaires, à savoir l'interdiction d'exercer une activité professionnelle, le placement sous surveillance judiciaire, la fermeture d'un ou plusieurs établissements, l'exclusion des marchés publics, l'interdiction d'émettre des titres financiers ou des chèques, les confiscations et la publication de la décision. De plus, les règles déontologiques applicables aux commissions et conseils placés auprès du ministre chargé de la santé sont étendues aux dirigeants et aux personnels de direction et d'encadrement ainsi qu'aux membres des commissions et des conseils des agences, organismes et établissements nationaux du domaine sanitaire. Cela passe notamment par un renforcement de l'effectivité du système de déclaration et de gestion des liens d'intérêts. En effet, ces derniers devront obligatoirement rédiger une déclaration publique d'intérêts, rendue publique et actualisée par la personne concernée dès modification de ces liens d'intérêts, sous peine de sanction pouvant aller jusqu'à 30 000 € d'amende et être assorties de peines complémentaires telles que la diffusion et la publication de la décision de condamnation, l'interdiction de jouissance des droits civiques, l'interdiction d'exercer une fonction publique, industrielle ou commerciale, et l'interdiction de fabriquer, conditionner, importer, mettre sur le marché certains produits pour une durée maximale de cinq ans. Ainsi, la participation aux délibérations et aux votes est subordonnée au respect de l'obligation de dépôt ou d'actualisation de la déclaration d'intérêts. Dans le même sens, les dispositions de l'article L. 1451-2 relatif aux dispositions « anti-cadeaux », sont étendues aux agences, organismes et établissements placés sous la tutelle du ministre chargé de la santé. Concernant plus particulièrement l'expertise sanitaire, ce projet de loi prévoit également la création d'une « charte de l'expertise sanitaire » ayant pour objet d'encadrer la réalisation de l'ensemble des expertises réalisées à la demande des services ou instances en charge de la santé publique ou de la sécurité sanitaire. Elle précise ainsi les modalités de choix des experts, décrit le processus d'expertise et son articulation avec le pouvoir de décision, définit la notion de lien d'intérêts et les cas de conflits d'intérêts, détermine les modalités de gestion d'éventuels conflits et les conditions dans lesquelles il peut être tenu compte des travaux réalisés par les experts présentant un conflit d'intérêt. 3. La transparence des processus de décisions est également renforcée dans ce projet de loi qui autorise à rendre publics les débats des commissions, conseils et instances collégiales des agences sanitaires, ces derniers pouvant ainsi être enregistrés et mis à disposition sur le site Internet de l'agence concernée. Ces dispositions vont donc au-delà des dispositions actuelles imposant au directeur général de l'AFSSAPS l'obligation de rendre public certaines décisions. À cet égard, il peut être souligné que l'AFSSAPS a d'ores et déjà fait évoluer le fonctionnement et les modalités de travail de la commission d'AMM en ce sens. Ainsi, la séance de la commission d'AMM du 3 mars 2011 illustre-t-elle cette démarche tant par la mise à disposition sur son site Internet (www.afssaps.fr) de l'ordre du jour de la commission, des résumés des avis rendus par celle-ci et du verbatim rapportant l'intégralité des débats, que par l'évolution des modalités de participation des membres du fait d'un renforcement de la gestion des conflits d'intérêts. De surcroît, l'AFSSAPS a pour la première fois mis en ligne, sur son site Internet, des extraits filmés d'échanges et de débats de la séance de la commission d'AMM du 7 avril 2011. Cette initiative renforce ainsi l'effort de transparence voulu par l'Agence pour répondre aux interrogations des citoyens, des professionnels de santé ainsi que des pouvoirs publics quant au processus d'évaluation des médicaments, des modalités de fonctionnement de la commission d'AMM et de l'expertise scientifique.

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