Question de Mme MORIN-DESAILLY Catherine (Seine-Maritime - UCR) publiée le 20/09/2012

Mme Catherine Morin-Desailly attire l'attention de M. le ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche, quant à la nécessité de réaliser la ligne nouvelle Paris-Normandie (LNPN) dans sa globalité.

En effet, suite au rapport remis par la Cour des comptes début juillet 2012, elle souhaite rappeler quelques éléments afin que des contre-vérités, énoncées par certains élus, cessent : la Cour y a évalué le schéma national des infrastructures de transport (SNIT) à environ 260 milliards d'euros ; la part des lignes à grande vitesse y est des deux tiers environ, soit de l'ordre de 170 milliards d'euros.

Si l'on peut envisager que les quatorze nouvelles lignes inscrites dans ce SNIT ne pourront être réalisées en raison des difficultés budgétaires, il n'en reste pas moins que dans la hiérarchisation à établir, la LNPN présente des atouts inestimables à l'échelle nationale.

Elle insiste sur le fait que cette ligne s'inscrit dans le cadre d'un projet d'aménagement global, le projet Axe-Seine, qui doit permettre le développement et le renouvellement industriel de toute la Normandie. Conjugué à la réalisation du canal Seine-Nord-Europe, elle permettra à la région Normandie de devenir la porte d'entrée ouest de l'Europe.

Ainsi, elle veut obtenir des garanties quant à la réalisation globale de la ligne nouvelle, devant in fine relier Le Havre à Roissy. Même si celle-ci doit se concevoir en plusieurs phases successives prédéterminées, elle souhaite en obtenir la confirmation.

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Réponse du Ministère chargé des transports, de la mer et de la pêche publiée le 06/02/2013

Réponse apportée en séance publique le 05/02/2013

Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le ministre, je souhaite, une fois de plus, attirer l'attention du Gouvernement sur le dossier prioritaire de la ligne nouvelle Paris-Normandie, la LNPN.

Vous le savez, c'est un chantier qui nous tient particulièrement à cœur, à nous élus normands, tant il est essentiel pour l'avenir de notre région. Mon collègue Hervé Maurey, sénateur de l'Eure, a eu l'occasion de vous le rappeler récemment, et je le souligne à mon tour aujourd'hui en tant qu'élue de la Seine-Maritime.

Ce projet est non seulement capital pour la Normandie mais, pour reprendre les mots prononcés à Caen par l'actuel Président de la République, en janvier 2012, il répond également à « l'intérêt du pays ».

En effet, la réalisation de cette ligne est indispensable pour améliorer la qualité du service rendu à des dizaines de milliers d'usagers quotidiens. Elle est indispensable pour faire de la Normandie la porte d'entrée de l'ouest de l'Europe, et permettre ainsi à nos ports, réunis au sein du groupement d'intérêt économique Haropa, de consolider leurs acquis et de prendre un nouvel essor.

De surcroît, toute l'activité de nos entreprises pourrait bien sûr accéder à de nouveaux débouchés si celles-ci disposaient, à leur porte, du réseau ferroviaire européen à grande vitesse.

Plus largement, comme j'ai déjà eu l'occasion de le souligner avec mes collègues centristes, c'est tout le programme « Axe Seine », projet global d'aménagement du territoire, qui apparaît en filigrane de la LNPN.

Je ne reviendrai pas sur le travail déjà accompli sur ce dossier et sur le consensus qui se fait jour au niveau local quant à la nécessité de cette nouvelle ligne : une « dette » envers la Normandie a été évoquée par le président de la SNCF. Dans les trois régions concernées, les conseils économiques sociaux et environnementaux des régions, les CESER, se sont fédérés au sein de l'association pour la promotion de la LNPN. Cette structure a d'ailleurs récemment mis en ligne une pétition. Les collectivités territoriales de tous niveaux ont elles-mêmes voté des motions pour soutenir ce projet.

Je le rappelle, lors de sa campagne, le candidat François Hollande avait affirmé que, durant le quinquennat, ce dossier lui tiendrait particulièrement à cœur.

Aussi, alors que la commission que vous avez installée en octobre dernier sur la hiérarchisation des projets identifiés par le schéma national des infrastructures de transport, le SNIT, ne devrait plus tarder à rendre ses conclusions, et alors que vous-même, monsieur le ministre, vous apprêtez à établir un Schéma national de mobilité durable, je souhaite que vous nous donniez des garanties, non seulement quant au chantier de la LNPN, mais aussi quant à la réalisation globale de cette ligne du Havre jusqu'à Roissy, et donc sur le phasage des travaux que ces opérations induisent.

Je le sais, vous vous êtes rendu à Rouen la semaine dernière. Je n'ai pu être présente à la réunion que vous avez organisée, et je m'en suis excusée. Ma question était prévue de longue date, et je vous remercie par avance des éléments de réponse que vous m'apporterez.

M. Philippe Bas. Excellente question. Bravo !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la sénatrice, en premier lieu, je tiens à vous remercier d'avoir maintenu votre question.

Certes, il y a quelques jours, lors de mon déplacement dans la Manche et à Rouen, j'ai déjà eu l'occasion de rencontrer les élus haut-normands et bas-normands, et M. le sénateur Philippe Bas a pu mesurer mon implication concernant ce territoire. Toutefois, dans cet hémicycle, il m'est possible de vous préciser les avancées accomplies via les propos que j'ai échangés avec les présidents de région, Alain Le Vem et Laurent Beauvais, ainsi qu'avec mes collègues Laurent Fabius et Bernard Cazeneuve, le 1er février dernier.

Concernant la LNPN, vous avez cité, par deux fois, les propos du Président de la République, et je vous en remercie.

Vous le savez, sur ce projet, le débat public engagé afin de relier le Grand Paris à sa façade maritime - en ciblant une réduction à une heure quinze du temps de parcours entre Paris et Le Havre - s'est tenu entre octobre 2011 et février 2012. Il a porté sur quatre scénarios pour la partie à l'ouest de Mantes-la-Jolie, et sur deux familles de scénarios pour la partie francilienne.

Pour les Normands, un accès facilité à Roissy a été présenté - vous y avez d'ailleurs fait référence -, grâce à la connexion au futur réseau de métro automatique de la gare nouvelle située dans le secteur de Nanterre. Le coût total de ce projet est évalué à 12 milliards d'euros, dans les conditions économiques de 2010.

Vous avez également souligné cet enjeu : ce projet devrait permettre le développement du fret ferroviaire.

Par ailleurs, il convient d'assurer une meilleure régularité le long de l'« Axe Seine » en dégageant, sur la ligne historique Paris-Rouen-Le Havre, de nouvelles capacités pour les trains de marchandises comme pour les transports de voyageurs.

À court terme, l'écoulement du trafic des ports normands s'inscrit également dans le cadre de la stratégie maritime et portuaire de notre pays, qui constitue un enjeu majeur. À ce titre, je viens d'inaugurer le grand salon Euromaritime, qui se tient actuellement à Paris, pour souligner la nécessité d'assurer l'interface entre la mer et la terre et, partant, de développer les activités portuaires.

Bref, l'écoulement des trafics du Havre et de Rouen doit être amélioré grâce à la création d'une liaison complémentaire de l'axe historique, via Serqueux et Gisors. La remise à niveau de la ligne existante constitue une première étape, qui devrait s'achever fin 2013.

La commission parlementaire « Mobilité 21 », qui réunit à la fois des députés et des sénateurs et que préside Philippe Duron, a pour objet de hiérarchiser ces différents enjeux et de donner plus de visibilité aux projets que regroupe le SNIT, lourd de 245 milliards d'euros. Cette hiérarchisation doit permettre de rendre les investissements à la fois réalistes et réalisables.

Cette question est d'autant plus importante qu'elle constitue un enjeu d'aménagement du territoire et de réduction de la fracture territoriale. À cet égard, la LNPN mérite une attention toute particulière.

Je ne me substituerai pas aux parlementaires de la commission « Mobilité 21 » - vous pourriez, à juste titre, m'en tenir rigueur ! -, à qui je fais entière confiance dans le cadre de cette mission. Je ne préempterai pas davantage leurs conclusions, qui seront du reste soumises au débat : le moment venu, je me tournerai vers les commissions compétentes des deux assemblées pour évoquer ces enjeux de structuration et d'amélioration de la desserte de notre territoire.

Toutefois, sachez qu'en lien avec RFF le Gouvernement a d'ores et déjà tenu à rehausser les exigences de modernisation des lignes. Un plan de 2 milliards d'euros a été annoncé. Je me suis entretenu, hier, avec le président de RFF, Jacques Rapoport. L'identification des éléments de blocage immédiats sur la ligne ferroviaire que vous évoquez - notamment au niveau de Mantes - doit nous conduire à faciliter le trafic en direction de Paris, tout en assurant une meilleure régularité.

Enfin, en lien avec les collectivités concernées, notamment avec les régions, le renouvellement du matériel roulant constituera un enjeu incontournable. Nous avons déjà beaucoup travaillé sur ce sujet, et le Gouvernement réfléchit actuellement aux conditions permettant aux régions d'accéder à des modes de financement privilégiés.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.

Mme Catherine Morin-Desailly. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces éléments de réponse. J'ai bien noté que vous étiez prêt à agir de concert avec les présidents des régions concernées sur les points de blocage immédiats, notamment pour résoudre le problème de la régularité. Le remplacement du matériel roulant s'inscrit dans ce cadre.

Malgré tout, je ne saurais trop insister sur l'importance que revêt la réalisation de la LNPN dans sa globalité. Cet axe doit être prolongé jusqu'au Havre, et ainsi desservir la Basse-Normandie. Je le répète devant mon collègue Philippe Bas ici présent : c'est un enjeu considérable. (M. Philippe Bas acquiesce.)

J'ai cité en effet l'actuel Président de la République : alors qu'il était encore candidat, il s'était engagé à poursuivre ce projet lancé sous le précédent quinquennat. Nous sommes extrêmement attentifs et vigilants sur ce dossier, d'autant qu'en régions certains collègues sénateurs - notamment notre président de région, Alain Le Vern - parlent souvent exclusivement du nœud mantois et de la gare de Rouen. Ils n'évoquent jamais le projet dans sa globalité du projet, ou alors ils le font avec de grandes réserves.

Je le répète, ce dossier mobilise toute notre attention, eu égard à son ampleur nationale, Rouen-Le Havre devant constituer le grand avant-port de Paris. Il s'agit là un enjeu de compétitivité économique auquel les entreprises accordent une importance capitale.

Quoi qu'il en soit, je vous remercie des éléments de réponse que vous nous avez communiqués.

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