Question de M. SAVIN Michel (Isère - UMP) publiée le 13/09/2012

M. Michel Savin attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur certaines modalités de donation de terrains agricoles par des propriétaires fonciers privés.

En effet, de nombreuses communes s'inquiètent du développement de ces « fausses donations » qui font souvent l'objet de rémunération occulte de plusieurs dizaines de milliers d'euros versés en espèces au propriétaire en échange de la donation.

Cette acquisition masquée par la procédure de donation permet aux acheteurs et vendeurs d'échapper à la législation.

Elle permet notamment de contourner le droit de préemption que peuvent exercer certaines communes en partenariat avec la SAFER. Certains de ces terrains sont classés en zone A ou N et nécessitent le respect d'une réglementation adaptée qui n'est pas toujours respectée par les donataires.

Les communes découvrent donc ces situations à la lumière d'une pose de clôture ou d'une construction légère sur le terrain, du développement d'une casse automobile, ou de l'installation de caravanes, n'ayant comme ultime recours que de longues et coûteuses poursuites pénales que certaines petites communes ne peuvent assumer.

C'est pourquoi il lui demande ce qu'il compte faire pour mettre fin à ces pratiques de « fausses donations ».

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Transmise au Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt


Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 25/10/2012

D'une manière générale, le droit de préemption des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) ne peut être exercé que sur des biens faisant l'objet d'une aliénation à titre onéreux ainsi que le stipule l'article L. 143-1, alinéa 1er du code rural et de la pêche maritime (CRPM). Pour les biens entrant dans le champ de son droit de préemption (biens immobiliers à utilisation agricole et biens mobiliers le cas échéant aliénés de manière conjointe, terrains à vocation agricole, sièges d'exploitation ou bâtiments d'exploitation ayant conservé leur utilisation agricole), c'est en fonction du prix qui lui sera ainsi notifié qu'une SAFER pourra faire valoir son droit de préemption. Elle pourra le faire soit en acceptant les conditions du compromis de vente entre les cocontractants pour se substituer dans les droits et obligations de l'acquéreur amiable, soit pour présenter, le cas échéant, une contre-offre de prix inférieure et assortir sa préemption d'une révision de prix. Le propriétaire doit donc, pour cela, avoir aliéné (vente amiable de gré à gré, vente moyennant un barème de rente viagère, offre amiable avant adjudication volontaire...) un bien identifié avec un prix donné. De plus, le régime propre au droit de préemption des SAFER ne saurait être considéré isolément. S'agissant des baux ruraux, les articles L. 412-1 et R. 461-11 du CRPM stipulent, en effet, que c'est l'aliénation à titre onéreux, par le propriétaire bailleur, d'un fonds rural donné à bail à ferme qui peut donner ouverture au droit de préemption du preneur. Par ailleurs, le principe de l'aliénation à titre onéreux prévaut aussi, aux termes de l'article L. 213-1 du code de l'urbanisme, pour la définition des immeubles et cessions soumis au droit de préemption urbain. Pour des donations opérées dans des conditions laissant présumer qu'elles viseraient à éluder intentionnellement le droit de préemption des SAFER, ce caractère de donation fictive et de vente déguisée aurait au demeurant à être démontré au cas par cas. Si certaines catégories d'aliénations faisant l'objet d'une exemption à leur droit de préemption ont bien à être notifiées aux SAFER à titre déclaratif, pour information, pour compléter leur connaissance du marché foncier dont elles ont à assurer la transparence, ces aliénations limitativement énumérées à l'article R. 143-9 du CRPM, ne visent pas les transmissions à titre gratuit. En tout état de cause, il ne saurait incomber aux notaires de présumer quels dons et legs pourraient laisser supposer qu'ils aient ce caractère de donation fictive et de vente déguisée. Ce serait donc une information systématique sur l'ensemble des successions, donations ou legs à des personnes physiques et morales (dès lors qu'il peut, en effet, être tout autant fait recours à des structures « écrans »), comportant au moins un bien rural, qui devrait être instituée en faveur des SAFER. En dehors des oppositions de principe qu'une telle mesure soulèverait, celle-ci les rendrait destinataires d'un volume très important d'actes et dispositions de toute nature. Il faut noter, en dernier lieu, que, globalement, les biens à caractère rural, objets de legs et donations, dès lors qu'ils sont situés notamment en zone périurbaine, sont loin d'être tous susceptibles de préemption de la part d'une SAFER. Une très grande partie des parcelles forestières et les parcelles en nature de terrain d'agrément sans rapport, pour la jurisprudence, avec une activité agricole ou forestière seraient de toute façon hors camp. Enfin, s'agissant plus spécifiquement des collectivités territoriales, la situation est différente. Celles-ci peuvent toujours recourir à l'expropriation si l'utilité publique est justifiée. Néanmoins, pour aller plus loin, la prochaine loi d'avenir de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt qu'a annoncée le Premier ministre, sera l'occasion d'aborder dans toutes ses dimensions la question du foncier.

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