Question de Mme MEUNIER Michelle (Loire-Atlantique - SOC) publiée le 19/10/2012

Question posée en séance publique le 18/10/2012

Concerne le thème : L'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes

Mme Michelle Meunier. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans notre pays, parmi les travailleurs qui occupent un emploi à temps partiel – un sur cinq en métropole, davantage encore en outre-mer –, 70 % sont des femmes.

Disons-le tout net : dans la plupart des cas, le temps partiel est subi ! La preuve en est que 60 % des salariées à temps partiel, c'est-à-dire environ 2 200 000 d'entre elles, déclarent souhaiter une augmentation de leur temps de travail. Et l'on peut supposer que, sur les 40 % restants, nombre de femmes s'autocensurent en quelque sorte, considérant qu'elles ont de toute façon peu de chances d'accéder à un temps plein ou que les frais de garde des enfants amputeraient le gain qu'elles tireraient de ce changement.

Ces moyennes cachent de gros écarts. C'est ainsi que les femmes non diplômées, les employées et les femmes étrangères subissent plus souvent que les autres le temps partiel et que le pic de la proportion des femmes à temps partiel se situe entre 35 et 44 ans.

Selon une communication du Conseil économique et social publiée en 2008 et intitulée « Les femmes face au travail à temps partiel », les secteurs d'activité les plus touchés par le temps partiel féminin sont les services aux entreprises et aux personnes, le nettoyage, la distribution, le commerce et l'hôtellerie-restauration, mais aussi les collectivités territoriales.

Pour ce qui est des salaires, 50 % des femmes occupant un emploi à temps partiel percevraient moins de 800 euros. Or l'ensemble des droits sociaux, la retraite et les indemnités journalières, dont le congé maternité, sont calculés sur cette base.

Selon des données publiées par l'INSEE en 2009, 33 % des foyers monoparentaux, soit 1,6 million de foyers, essentiellement composés de femmes avec au moins un enfant, disposent de revenus inférieurs au seuil de pauvreté. Parmi elles, on compte beaucoup de femmes actives mais au salaire très bas et/ou subissant un temps partiel contraint, morcelé et, bien sûr, peu rémunéré.

Dès lors, on comprend comment il est possible que les femmes, particulièrement celles qui assument seules les charges de leurs enfants, forment la catégorie la plus pauvre de notre pays.

Ces données sont connues. Il nous faut maintenant apporter des changements concrets, avec l'aide des différents ministères concernés par ces questions, dont celui des droits des femmes.

Madame la ministre, comment comptez-vous vous atteler à ce chantier transversal, dont les résultats sont très attendus par une grande partie de la population, qui travaille mais qui ne s'en sort pas ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)

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Réponse du Ministère des droits des femmes publiée le 19/10/2012

Réponse apportée en séance publique le 18/10/2012

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à remercier Mme Meunier d'avoir mis le doigt sur le problème du temps partiel subi, dont elle a rappelé qu'il touchait plus particulièrement les femmes.

Bien qu'il soit absolument crucial lorsqu'on s'intéresse à l'égalité professionnelle entre les hommes et les femmes et aux moyens de combattre les disparités, qui demeurent toujours aussi importantes dans notre pays, ce problème a longtemps été laissé de côté ; il fait partie des angles morts des politiques publiques.

Ainsi, on ne s'est pas suffisamment préoccupé de la surreprésentation des femmes dans certaines filières d'activité où la précarité est forte. De même, on n'a pas suffisamment considéré que le temps partiel, synonyme de rémunération partielle et de cotisations partielles pour la retraite, est une forme de triple peine dès lors qu'il est subi.

Aujourd'hui, la moitié de l'écart moyen de rémunération entre les hommes et les femmes - soit une différence de 14 % - résulte d'un recours au temps partiel plus fréquent pour les femmes.

La situation des femmes à temps partiel, déjà très précaire, n'a cessé de se dégrader au cours des dernières années. Il faut savoir qu'au début des années 1980 seulement 1 500 000 femmes étaient embauchées à temps partiel et que, trente ans plus tard, elles sont plus de deux fois plus nombreuses : 3,7 millions, soit un tiers des femmes salariées !

Il est toujours intéressant d'examiner la manière dont les pays qui nous entourent se sont emparés de cette problématique, et je crois qu'il existe une spécificité française liée à la répartition inégale des tâches domestiques entre les hommes et les femmes. J'aurai tout à l'heure l'occasion de revenir sur ce point, qui mérite toute notre attention.

Lors de la grande Conférence sociale de juillet dernier, nous avons décidé que les partenaires sociaux pourraient négocier sur la question du temps partiel. Ils ont commencé à le faire dès le 21 septembre et se sont engagés à nous remettre leurs conclusions avant le 8 mars 2013. Cette négociation doit porter principalement sur trois points.

Il s'agit d'abord de mieux protéger les femmes qui travaillent à temps partiel, en particulier celles qui, parce qu'elles ont un très petit temps partiel, n'ont pas accès à un certain nombre de droits sociaux comme les indemnités journalières.

Il convient aussi de sanctionner les entreprises qui recourent de manière abusive au temps partiel - car nous savons que des abus existent.

Enfin, il faut favoriser davantage qu'on ne le fait aujourd'hui le passage du temps partiel au temps complet, ce pour quoi un certain nombre de dispositions législatives pourront être prises. (M. Roland Courteau acquiesce.)

Sachez que, sans attendre les conclusions des partenaires sociaux, nous organiserons, le 19 novembre prochain, une « conférence de progrès » sur le temps partiel ; elle permettra d'examiner la question du temps partiel dans plusieurs branches professionnelles et d'y apporter de premières réponses. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour la réplique.

Mme Michelle Meunier. Je vous remercie, madame la ministre, des éléments de réponse que vous m'avez donnés.

Il serait effectivement intéressant, vous y avez fait allusion, de ne pas considérer seulement la situation française, mais d'étudier aussi ce qui se fait à cet égard dans d'autres pays européens.

Cela me fournit l'occasion de saluer le soutien que vous avez apporté, au nom de la France, au projet de directive européenne soutenu par Mme Viviane Reding et qui vise à renforcer la présence des femmes dans les conseils d'administration des entreprises.

Je vois dans cette position publique un engagement pour le changement auquel aspirent nombre de nos concitoyennes et de nos concitoyens !

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