Question de M. COUDERC Raymond (Hérault - UMP) publiée le 18/10/2012

M. Raymond Couderc attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les difficultés rencontrées par les propriétaires de multipropriétés en France.

Dans les années 1970 et 1980, de nombreuses sociétés civiles propriétaires de résidences, situées en majorité dans les stations de mer et de montagne, se sont créées en France.

Les propriétaires se partagent, souvent depuis de nombreuses années, les propriétés, par périodes annuelles prédéfinies.

Néanmoins, il semble que récemment, des groupes immobiliers aient réussi à s'approprier une partie de ces résidences, en acquérant à bas prix les parts de certains associés de la société civile qui souhaitaient s'en défaire. Par la suite, dès que les groupes immobiliers possèdent un nombre de parts égal aux 2/3 du total, ils convoquent une assemblée générale extraordinaire de la société civile et demandent sa dissolution. Avec la majorité des parts, ils l'obtiennent.

Comme la dissolution n'est pas causée par une faillite, un liquidateur est nommé, qui met en vente le ou les bâtiments à bas prix. Les groupes immobiliers rachètent alors les parts restantes et mettent ensuite les logements en vente en pleine propriété « à la découpe », réalisant au passage une plus-value substantielle.

Cette situation a pour conséquence de priver les multipropriétaires, qui ne désiraient pas vendre, du droit de jouissance de leur bien. Ces derniers appartenant en général à la classe moyenne n'auraient pas eu les moyens de posséder un appartement en pleine propriété dans une résidence similaire.

De plus, la vente de ces appartements en pleine propriété à des propriétaires indépendants crée un phénomène dit de « volets fermés », ces appartements étant vides la plus grande partie de l'année. Les commerces locaux s'en voient donc pénalisés.

Il aimerait donc savoir ce que le Gouvernement entend faire pour endiguer ce phénomène d'appropriation des multipropriétés, situées dans les stations françaises de mer ou de montagne, par des groupes immobiliers dans le but d'une revente à la découpe en pleine propriété.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 07/03/2013

L'attribution par une société d'un immeuble à usage d'habitation en jouissance par périodes à ses associés s'exerce dans le cadre de la loi n° 86-18 du 6 janvier 1986 relative aux sociétés d'attribution d'immeubles en jouissance à temps partagé. La prise de contrôle d'une telle société au moyen du rachat des parts sociales ou actions des associés par un investisseur ne constitue pas, en soi, une opération illicite. Il est loisible à chaque associé de céder ses parts sociales ou actions ou de refuser de donner suite à une offre d'achat, notamment parce qu'il l'estimerait insuffisante. L'article 13 de la loi du 6 juillet 1986, tel que modifié par la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009, prévoit que tout associé peut demander à tout moment à la gérance de la société la communication de la liste des noms et adresses des autres associés ainsi que la répartition des parts sociales et des droits de jouissance qui y sont attachés. L'exercice de cette faculté doit permettre aux associés de se connaître, malgré leur nombre et leur éparpillement, et d'agir en commun pour la préservation de leurs intérêts, notamment à l'occasion de semblables opérations. Par ailleurs, la majorité des deux tiers des voix des associés requise par l'article 16 de la loi du 6 janvier 1986 pour voter la dissolution anticipée de la société constitue une majorité significative. Les associés minoritaires, s'ils estiment que la décision de dissolution anticipée est contraire à l'intérêt social et qu'elle n'a été prise que dans l'unique dessein de favoriser les membres de la majorité au détriment des membres de la minorité, peuvent saisir les juridictions compétentes d'une demande d'annulation de la décision sur le fondement de l'abus de majorité. Enfin, en cas de liquidation frauduleuse, la mise en cause de la responsabilité pénale et civile du liquidateur peut également être envisagée. Il apparaît, par conséquent, que les moyens juridiques existants permettent aux associés qui ne désirent pas céder leurs parts de préserver leurs intérêts.

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