Question de M. BÉRIT-DÉBAT Claude (Dordogne - SOC) publiée le 14/12/2012

Question posée en séance publique le 13/12/2012

Concerne le thème : L'hébergement d'urgence

M. Claude Bérit-Débat. Madame la ministre, l'hébergement d'urgence est, plus que jamais, un devoir de solidarité nationale. Le nombre de demandeurs augmente toujours plus. Désormais sont concernées des personnes aux profils multiples qui ont besoin d'une aide sociale et, de plus en plus souvent, d'un accompagnement médical.

J'ai voulu intervenir aujourd'hui pour rappeler une réalité : la pauvreté existe également dans les départements ruraux. Elle s'y développe aussi, inexorablement.

En Dordogne, le taux d'occupation des sept structures d'accueil existantes est proche de 100 %. Les appels au 115 ont augmenté de 60 % en trois ans. Ils ont été multipliés par deux dans les agglomérations de Bergerac et de Périgueux. Déjà, les créations de places prévues en 2010 et 2011 ne suffisent plus et l'on ne peut plus répondre à toutes les demandes en raison d'une offre qui n'est pas assez adaptée aux nouveaux profils des demandeurs.

Alors que la situation est déjà très difficile, les crédits de fonctionnement des centres d'hébergement et de réinsertion sociale, les CHRS, ont baissé de 20 % en trois ans, obligeant les collectivités à assumer une dépense qui ne leur incombe pas.

À ces difficultés s'ajoutent celles qui sont propres à un territoire rural : l'étendue du département et la répartition déséquilibrée des structures d'accueil, qui sont concentrées dans ses deux grandes agglomérations. Bien évidemment, le suivi des personnes en pâtit.

Malgré tout leur engagement, les acteurs sociaux n'ont pas les moyens de proposer des solutions qui dépassent le cadre de l'urgence.

Dans le même temps, il faut donc non seulement accroître la capacité d'accueil, créer des places d'urgence polyvalentes et des places de stabilisation, mais aussi renforcer le maillage territorial au plus près des populations concernées.

Dans ce contexte, alors que le Premier ministre a annoncé mardi la conclusion d'un pacte de solidarité, qui prévoit notamment la création de 4 000 places en faveur des sans-abri, comment l'État peut-il décliner son action en s'adaptant aux spécificités de territoires ruraux qui sont, je le répète, soumis, eux aussi, à des problématiques d'urgence et de pauvreté profondes, et que l'on ne peut passer sous silence ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE. – Mme Éliane Assassi applaudit également.)

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Réponse du Ministère de l'égalité des territoires et du logement publiée le 14/12/2012

Réponse apportée en séance publique le 13/12/2012

Mme Cécile Duflot, ministre. Monsieur Bérit-Débat, vous avez parfaitement raison d'attirer l'attention de l'ensemble des sénateurs sur la question de la pauvreté et de l'hébergement d'urgence en milieu rural.

La situation y est parfois plus sensible qu'en zone urbaine, puisque, du fait de l'éloignement, les capacités d'accueil peuvent être plus rapidement saturées. Je pense notamment à des régions du Sud-Ouest, où des difficultés d'hébergement particulièrement grandes se font jour, y compris dans des petites villes qui n'en souffraient pas jusqu'alors. Ces dernières ont des difficultés à prendre en charge des flux importants, qui peuvent survenir quand, par exemple, des familles se trouvent dans une situation de mal-logement extrême.

Les possibilités de mobilisation de places nouvelles sont également plus restreintes, les disponibilités étant moins nombreuses. En outre, les coûts, sur ces territoires, peuvent être plus élevés, puisque l'éloignement rend difficile la mutualisation d'un certain nombre de services.

En milieu rural se posent également les questions du réseau de transports et de l'accès à ces derniers pour des personnes qui sont, pour l'essentiel, en situation d'insertion et en recherche d'emploi.

Ces sujets sont évidemment essentiels, tout particulièrement pour la ministre de l'égalité des territoires et du logement que je suis. Dans quelques heures, nous allons d'ailleurs avoir un débat sur l'égalité des territoires en matière d'accès aux services publics.

L'hébergement des personnes sans logement et l'attention portée aux plus pauvres doivent être les mêmes en zone rurale qu'en zone urbaine. Ce n'est pas parce que la situation est plus diffuse, et donc moins visible, en milieu rural, qu'elle est moins réelle.

Dans le cadre de la réforme de l'hébergement, nous mettrons en œuvre un certain nombre de mécanismes, qui permettront de mutualiser les places et de les ouvrir en fonction de la demande. Non seulement de gros dispositifs seront déployés en hiver, mais une répartition de l'hébergement sur l'ensemble du territoire, tout au long de l'année, sera ainsi encouragée.

Ces remarques n'épuisent pas le débat, mais croyez bien, monsieur le sénateur, à mon réel engagement en la matière. Il est indispensable de répondre à la question de l'hébergement sur tout le territoire : sur les zones les plus tendues et les plus en difficulté, comme sur celles où les difficultés sont moins visibles. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour la réplique.

M. Claude Bérit-Débat. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.

Je voudrais insister sur un point qui me semble spécifique aux territoires ruraux. Le problème n'est pas tant quantitatif - le nombre de places - que qualitatif.

Dans les deux agglomérations du département dont je suis sénateur, nous souhaitons disposer de places polyvalentes. Les places existantes ont été créées pour des personnes seules, quand nous sommes obligés, aujourd'hui, d'accueillir des familles entières.

En outre, nous avons besoin de places de « stabilisation ». En effet, des familles passées par des hébergements d'urgence peuvent rencontrer des difficultés d'adaptation lorsqu'elles sont replacées dans des logements plus classiques ; une phase d'« apprentissage » est alors nécessaire.

Je voudrais également appeler votre attention sur les moyens à mettre en œuvre pour que la coordination puisse s'effectuer : il faut un budget de fonctionnement en hausse pour les structures qui travaillent dans ce domaine. (Applaudissements sur les mêmes travées.)

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