Question de Mme AÏCHI Leila (Paris - ECOLO) publiée le 13/12/2012

Mme Leila Aïchi appelle l'attention de M. le ministre des affaires étrangères sur l'impasse politique au Sahara occidental et la condition des réfugiés sahraouis dont elle s'émeut.

Elle rappelle que le Sahara occidental a été occupé par les Espagnols et que, sous pression de l'ONU, Madrid a promis en 1974 d'organiser un référendum pour décider du statut de ce territoire. À la demande du Maroc, la Cour internationale de la Haye s'est saisie de la question et a donné un avis favorable quant à l'application de la résolution 1514 de l'ONU sur la décolonisation du Sahara occidental et du principe d'autodétermination des populations du territoire. Cependant, le Maroc a, dans le même temps, organisé la «Marche Verte» en mobilisant 350 000 civils sur Laâyoune pour récupérer le Sahara occidental. Le Conseil de sécurité a condamné cet acte mais n'est pas intervenu. Suite à la signature des accords de Madrid en novembre 1975, l'Espagne a cédé le Sahara occidental au Maroc et à la Mauritanie, ce que l'ONU a considéré comme non recevable en regard du droit international.

Le Front Polisario, né en mai 1973, a mené la guerre contre les deux forces. Un cessez-le-feu a été signé avec la Mauritanie et le combat s'est intensifié avec le Maroc, lequel a annexé les territoires cédés par cette dernière. En 1991, l'ONU a décidé un cessez-le-feu et un référendum, tout en établissant la Mission des Nations Unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental ou MINURSU. Elle souligne que la situation stagne depuis lors et déplore le sort des réfugiés, qui sont, depuis plus de trente ans, répartis sur cinq grands camps: 27 février, Dhakla, Smara, Aousserd et Lâayoune, nommés suivant les villes sahraouies qui sont sous occupation marocaine. La population s'élève, selon les Sahraouis, à 166 000 personnes et à 90 000 selon les autorités marocaines.

Elle insiste sur l'impasse d'un processus de sortie de crise, en raison de conceptions antagoniques : le Maroc propose une large autonomie sous sa souveraineté ; les indépendantistes du Polisario militent pour « le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination » via un référendum. Elle met l'accent sur le fait que le Sahara occidental est inscrit sur la liste des territoires non autonomes selon l'Organisation des Nations Unies (ONU), terminologie utilisée pour désigner un territoire « dont les populations ne s'administrent pas encore complètement elles-mêmes ». À ce titre, elle tient à affirmer avec force le principe d'autodétermination des Sahraouis et s'interroge sur l'évaluation du travail de la MINURSU.
Dans cette perspective, elle questionne le Gouvernement sur les efforts que la France compte entreprendre pour redynamiser le processus onusien et pour que les Sahraouis puissent enfin se prononcer sur leur propre destinée.

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Réponse du Ministère chargé des Français de l'étranger publiée le 30/01/2013

Réponse apportée en séance publique le 29/01/2013

Mme Leila Aïchi. Madame la ministre, la situation politique au Sahara occidental semble dans l'impasse, tandis que la condition des réfugiés sahraouis constitue un véritable sujet de préoccupation.

Je vous rappelle que le Sahara occidental a été occupé par les Espagnols et que, sous pression de l'ONU, Madrid a promis, en 1974, d'organiser un référendum pour décider du statut de ce territoire.

À la demande du Maroc, la Cour internationale de justice de La Haye s'est saisie de la question et a donné un avis favorable sur l'application de la résolution 1514 de l'ONU quant à la décolonisation du Sahara occidental et à l'application du principe d'autodétermination des populations du territoire.

Cependant, le Maroc a dans le même temps organisé la « marche verte » sur Laâyoune, en mobilisant 350 000 civils, pour récupérer le Sahara occidental. Le Conseil de sécurité a condamné cet acte mais n'est pas intervenu. À la suite de la signature des accords de Madrid, en novembre 1975, l'Espagne a cédé le Sahara occidental au Maroc et à la Mauritanie, ce que l'ONU a considéré comme non recevable au regard du droit international.

Le Front Polisario, né en mai 1973, a mené la guerre contre les deux forces. Un cessez-le-feu a été signé avec la Mauritanie et le combat s'est intensifié avec le Maroc, lequel a annexé les territoires cédés par cette dernière. En 1991, l'ONU a décidé un cessez-le-feu et un référendum, tout en établissant la Mission des Nations unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental, la MINURSO.

Depuis, la situation stagne, alors que des milliers de réfugiés sont répartis, depuis plus de trente ans, sur cinq grands camps : 27-Février, Dakhla, Smara, Aousserd et Laâyoune, nommés suivant les villes sahraouies qui sont sous occupation marocaine. La population s'élève à 166 000 personnes, selon les Sahraouis, et à 90 000 personnes, selon les autorités marocaines.

Le processus de sortie de crise semble à l'arrêt en raison de conceptions antagoniques : le Maroc propose une large autonomie, sous sa souveraineté, tandis que les indépendantistes du Polisario militent pour « le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination » via un référendum.

Je souhaite mettre l'accent sur le fait que le Sahara occidental est inscrit sur la liste des « territoires non autonomes » de l'Organisation des Nations unies, liste qui répertorie les territoires « dont les populations ne s'administrent pas encore complètement elles-mêmes ».

À ce titre, il faut affirmer avec force le principe d'autodétermination des Sahraouis et s'interroger sur l'évaluation du travail de la MINURSO.

Dans cette perspective, madame la ministre, quels sont les efforts entrepris par la France pour redynamiser le processus onusien et pour que les Sahraouis puissent enfin se prononcer sur leur propre destinée ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée auprès du ministre des affaires étrangères, chargée des Français de l'étranger. Madame la sénatrice, vous avez appelé l'attention du Gouvernement sur la question du Sahara occidental, où les enjeux sont de taille.

Ces enjeux sont d'abord politiques : le différend entretient des tensions entre le Maroc et l'Algérie, de manière bilatérale comme dans les enceintes internationales. Il handicape la construction d'un Maghreb uni, stable et prospère, au détriment des peuples de la région et de l'Union européenne.

Les enjeux sont aussi sécuritaires : le différend accroît le risque sécuritaire, dans le contexte d'instabilité que connaît la région du Sahel.

Les enjeux sont enfin humanitaires : comme vous l'avez rappelé, les familles sont séparées. Les réfugiés des camps de Tindouf dépendent entièrement de l'assistance humanitaire de la communauté internationale, assistance à laquelle la France participe.

Notre pays souhaite un règlement de la question du Sahara occidental, laquelle est très complexe.

Cette dernière implique plusieurs acteurs, avec lesquels nous dialoguons : tout d'abord, le Maroc, qui, en 2007, a proposé un plan d'autonomie, que la France soutient comme base sérieuse et crédible pour une solution négociée ; ensuite, le Front Polisario, qui revendique la tenue d'un référendum d'autodétermination ; enfin, l'Algérie, qui indique qu'elle se conformera à toute solution qui sera acceptée par le Front Polisario.

Comme l'a rappelé le Président de la République à Tlemcen, ce sont les Nations unies qui mènent la médiation entre les parties : la MINURSO assure, depuis 1991, la préservation et l'observation du cessez-le-feu.

J'ajoute que la France, membre du Groupe des amis du Sahara occidental, soutient pleinement les efforts de l'ONU. Elle entretient de nombreux contacts avec l'Envoyé personnel du Secrétaire général de l'organisation, M. Christopher Ross. Celui-ci souhaite mener une diplomatie de navette, afin de relancer le processus politique, ce qui nous semble être une bonne méthode.

Nos contacts bilatéraux avec le Maroc et l'Algérie sont fréquents et nous encourageons les efforts de rapprochement entre ces deux pays, efforts qui permettront de rompre un statu quo qui n'est dans l'intérêt de personne.

Enfin, nous sommes attachés à l'amélioration des droits de l'Homme au Sahara occidental et dans les camps de Tindouf. Nous entretenons un dialogue régulier avec les autorités marocaines sur cette question, que Laurent Fabius a évoquée avec son homologue, en marge de la Rencontre de haut niveau franco-marocaine, en décembre dernier.

Néanmoins, ce sujet des droits de l'Homme doit être remis dans son contexte. Depuis l'accession au pouvoir du roi Mohammed VI, le Maroc a effectué d'importants progrès en la matière : adoption d'une nouvelle constitution en juillet 2011 ; renforcement de l'indépendance du Conseil national des droits de l'Homme ; invitation de plusieurs rapporteurs spéciaux du Conseil des droits de l'Homme des Nations unies.

Ces mesures s'appliquent également au Sahara occidental et permettent un suivi de la situation des droits de l'Homme. Nous souhaitons que les efforts engagés par le Maroc se poursuivent et que des mesures semblables soient prises par le Front Polisario en ce qui concerne la situation des réfugiés sahraouis dans les camps de Tindouf.

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