Question de M. BARBIER Gilbert (Jura - RDSE) publiée le 22/02/2013

Question posée en séance publique le 21/02/2013

M. Gilbert Barbier. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Cela a été évoqué il y a quelques instants, l'Europe entière s'indigne, à juste titre, d'une fraude organisée, qui a permis de faire consommer quelque 750 tonnes de viande de cheval estampillée « pur bœuf ». Au-delà de ses conséquences sur les ventes de plats cuisinés, cette affaire a jeté un doute sur l'ensemble de la filière agroalimentaire française. C'est en tout cas ce qu'indiquent les derniers sondages.

Pour beaucoup de consommateurs, ce scandale n'est pas un accident isolé et interroge sur la composition et la provenance réelles des produits alimentaires, malgré les étiquetages. La plupart des produits laitiers et des fromages industriels seraient par exemple fabriqués avec du lait d'importation d'origine inconnue.

Cela est-il révélateur d'une détérioration de la qualité des produits alimentaires français ? Je ne le pense pas. Les producteurs français s'attachent à produire des produits de qualité, avec des critères définis – AOC, IGP, label rouge – et des contraintes de production. Il est dommage qu'un fraudeur jette la suspicion sur l'ensemble de la filière.

Ma question ne concerne pas la gestion de cette affaire par le Gouvernement, mais les suites qu'il entend y donner.

En premier lieu, les exigences fortes en matière de sécurité sanitaire nécessitent de conserver des moyens de contrôle adaptés aussi bien pour les services vétérinaires que pour l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation et la DGCCRF, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. La responsabilisation des entreprises, ou l'autocontrôle, est sans doute une bonne chose mais elle a des limites. C'est bien à ces organismes publics d'exercer une surveillance efficace sans attendre que les scandales éclatent.

En second lieu, cette malheureuse affaire rend plus évidente la nécessité de renforcer l'information des consommateurs. Ils ont droit à la transparence totale sur les produits qu'ils achètent !

Au niveau européen, monsieur le ministre, vous venez de nous dire que l'on réfléchit à un étiquetage pour les plats préparés, mais, face à la lenteur de Bruxelles, envisagez-vous de prendre les devants ?

À la veille du salon de l'agriculture, le monde agricole attend la reconnaissance de la qualité de ses produits et peut-être aussi des mesures favorisant le développement des circuits courts, gage de transparence pour le consommateur. Sur tous ces sujets, nous attendons des engagements et des résultats ! (Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UMP et de l'UDI-UC.)

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Réponse du Ministère chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation publiée le 22/02/2013

Réponse apportée en séance publique le 21/02/2013

M. Benoît Hamon, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation. Monsieur Barbier, dans cette affaire, 4,5 millions de personnes ont acheté du bœuf et mangé du cheval, ou acheté du cheval au prix du bœuf, ce qui a permis à un intermédiaire, ou à plusieurs, de réaliser un joli bénéfice au passage.

Concernant les seules entreprises françaises, nous avons estimé que, sur une période de six mois, près de 550 000 euros de bénéfices indus avaient été réalisés, en vendant ainsi du cheval au prix du bœuf aux consommateurs français et européens.

Treize pays et vingt-huit entreprises ont été avertis par nos soins. Cela nous a permis de contrôler, à travers 3 000 interventions, la réalité des retraits et des rappels des produits concernés.

Dès le départ, nous avons voulu mesurer la nature du préjudice. Aujourd'hui, l'enquête judiciaire se concentre sur la responsabilité de l'établissement Spanghero. Je ne rappelle pas la réalité de changements d'étiquettes dans cet établissement, l'enquête continue sur l'étendue du préjudice.

D'autres filières d'approvisionnement, de transformation et de commercialisation de bœuf pourraient-elles laisser penser que l'on continue à manger dans nos plats préparés de la viande de cheval à la place de la viande de bœuf ? Il est utile de dire que cette viande n'est pas impropre à la consommation ; il n'en demeure pas moins qu'il s'agit d'une tromperie économique, qui appelle réparation au profit du consommateur.

Avec mes collègues chargés de l'agriculture et de l'agroalimentaire, nous avons voulu rappeler l'excellence des filières bovine et agroalimentaire françaises. Nous avons également souhaité agir vite, au niveau européen, tout en respectant les rythmes des négociations européennes, notamment sur la modification du règlement européen concernant l'information des consommateurs, ou règlement INCO.

Nous désirons que les professionnels français anticipent l'évolution des règles européennes sur un point : le fait que figure l'origine des produits, notamment de la viande, sur l'étiquette des plats préparés. Concernant ces engagements, nous avons pu constater cet après-midi au ministère de l'agriculture la bonne volonté de l'ensemble des professionnels. C'est un point positif.

J'ajoute qu'il faut tirer d'autres leçons afin que notre système de protection soit aujourd'hui aussi efficace face à la tromperie économique qu'il l'est d'ores et déjà contre la menace sanitaire. Si vous volez une barquette surgelée dans un magasin, par exemple, vous encourez trois ans de prison et 45 000 euros d'amende. Quand vous trompez 4,5 millions de personnes pendant six mois, vous encourez 37 000 euros d'amende et deux ans d'emprisonnement. Il faudra sans doute examiner le caractère dissuasif de ces peines ; ce sera notamment l'objet du projet de loi sur la consommation.

Vous avez signalé l'importance du rôle de la DGCCRF. Ses agents ont effectivement agi avec beaucoup de célérité et d'efficacité. Je note tout de même que le nombre de ces agents a baissé de 16 % durant les cinq dernières années. Pour cette raison, grâce au Premier ministre, Jérôme Cahuzac et moi-même avons décidé de sanctuariser les effectifs pour cette année.

M. Christian Poncelet. Très bien !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Nous devons nous assurer que la puissance publique conserve les moyens d'exercer ses tâches de contrôle plus efficacement encore dans les années à venir. C'est là un engagement que nous prenons ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

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