Question de M. CÉSAR Gérard (Gironde - UMP) publiée le 22/08/2013

M. Gérard César attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt sur les conséquences dramatiques des orages de grêle du 2 août 2013, sur la vigne et autres cultures et sur la situation délicate des viticulteurs de l'Entre-deux-Mers.
Ce phénomène météorologique exceptionnel d'une dizaine de minutes a été d'une violence inouïe balayant une zone de 10 km de large sur 20 km de long.
Une centaine d'exploitations ont vu leur vignoble totalement détruit, plus de 12 000 ha de vigne ont été touchés dont plus de la moitié l'ont été de 80 à 100 %. Plus de raisins, plus de feuilles et des impacts de grêlons terribles sur les rameaux et sur les ceps.
Survenant après une dizaine d'années de crise viticole qui a déjà fragilisé gravement de nombreuses exploitations, cet évènement climatique sans précédent a des conséquences économiques et sociales dramatiques pour les exploitations dont les trésoreries sont le plus souvent exsangues.
C'est un nouveau coup dur, pour ne pas dire fatal, qui s'est abattu sur ces viticulteurs. En effet, il n'y aura pas de récolte en 2013 et celle de 2014 sera faible. Cette absence de revenu compromet l'existence même de ces exploitations. Comment payer ses charges, ses salariés, faire face à ses dettes, dégager un revenu pour faire vivre sa famille et maintenir sa présence sur des marchés conquis déjà très difficilement ?
Il lui semble, compte tenu de la gravité de la situation, que la mise en place de plusieurs mesures est indispensable : exonération et dégrèvement de charges fiscales et sociales ; possibilité d'utiliser la procédure de chômage technique pour les salariés des exploitations ; prise en charge des intérêts d'emprunt ; inclusion des pertes de fonds dans le régime des calamités agricoles ; possibilité pour les exploitants assurés de ne pas déclarer fiscalement les primes d'assurances ; incitation à l'assurance.

La mise en place d'une cellule de coordination et de crise sous l'autorité du préfet lui semble également nécessaire.

Il lui demande donc quelles mesures il envisage de prendre face à cette situation climatique exceptionnelle et dramatique pour de nombreuses exploitations viticoles.

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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 02/10/2013

Réponse apportée en séance publique le 01/10/2013

M. Gérard César. Monsieur le ministre, le 30 août dernier, lors de votre déplacement en Gironde qui faisait suite aux dégâts considérables provoqués par les violents orages de grêle sur la vigne et autres cultures de l'Entre-deux-Mers, vous avez annoncé la mise en place dans votre ministère de groupes de travail afin d'étudier le principe d'assurance et d'indemnisation.

Au cours de la réunion qui a eu lieu à Grézillac, je vous ai proposé de choisir le département de la Gironde pour expérimenter une assurance avec franchise, qui couvrirait les aléas climatiques. Celle-ci prendrait la forme d'une assurance récolte et pourrait être en partie subventionnée par l'Union européenne dans le cadre de la nouvelle PAC 2014-2020.

La présence à cette réunion du président du conseil général et du président de la région Aquitaine confirme l'intérêt que tous deux portent au traitement de ces sinistres. Les viticulteurs et les agriculteurs l'ont interprétée comme un soutien de leur part.

Il me semble nécessaire, pour le futur, de renforcer la prévention de ces sinistres en densifiant, en amont du vignoble, le maillage des postes à iodure d'argent gérés par l'association départementale d'étude et de lutte contre les fléaux atmosphériques de la Gironde, ou ADELFA, afin de diminuer les conséquences d'orages tels que ceux de cet été. Je rappelle que 12 000 hectares de vigne ont été touchés, dont plus de la moitié l'ont été dans une proportion variant de 80 % à 100 %.

Survenu après une dizaine d'années de crise viticole, cet événement climatique sans précédent a des conséquences économiques et sociales dramatiques pour les exploitations dont les trésoreries sont le plus souvent exsangues. Sans récolte en 2013 et avec une production faible en 2014, autant dire que l'existence de certaines exploitations est fortement compromise !

Je vous invite donc, monsieur le ministre, à poursuivre la réflexion engagée sur la mise en place dans le département de la Gironde en 2014, à titre expérimental, d'une assurance couvrant les aléas climatiques. Outre l'Union européenne, les collectivités locales, les organisations professionnelles, les compagnies d'assurance pourraient apporter tout leur concours.

Dans l'immédiat, et pour faire face à l'urgence de la situation, des mesures telles que l'exonération et le dégrèvement des charges fiscales et sociales, le recours à la procédure de chômage technique pour les salariés des exploitations, la prise en charge des intérêts d'emprunt, l'inclusion des pertes de fonds dans le régime des calamités agricoles, la possibilité pour les exploitants assurés de ne pas déclarer fiscalement les primes d'assurance sont à envisager afin de redonner espoir aux exploitants viticoles et agricoles.

Je vous remercie, monsieur le ministre, de me faire part des décisions que vous avez prises depuis votre déplacement en Gironde, au demeurant fort apprécié, et de celles que vous envisagez de prendre.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt. Monsieur le sénateur, lors de ce déplacement, nous avons pu faire ensemble le constat d'une situation que vous connaissiez et dont je suis venu me rendre compte.

Cet événement de grêle appelle une attitude en deux temps : premier temps, régler dès aujourd'hui le problème de ceux qui ont été victimes de cet aléa climatique ; second temps, anticiper et prévoir ce qui sera mis en place pour l'avenir.

Pour ce qui est du premier temps, toutes les mesures ont été annoncées. Il s'agit de mobiliser des crédits FranceAgriMer, affectés en priorité aux viticulteurs touchés par la grêle, et de mettre en œuvre le système de volume complémentaire individuel, lequel constitue un élément très important. Il s'agit aussi d'engager des mesures d'exonération des cotisations sociales et d'utiliser le levier de la fiscalité, avec la possibilité pour les exploitations sinistrées de solliciter le dégrèvement de leur taxe sur le foncier non bâti. Il sera possible de mobiliser le fonds national de garantie des calamités agricoles pour indemniser les pertes de fonds sur vigne lorsque, comme on l'a constaté, les ceps eux-mêmes ont été touchés.

Nous avons là un dispositif aujourd'hui mobilisable à la condition qu'on s'organise au niveau du département. C'est ce qu'a fait la préfecture en mettant en place le groupe de travail et le guichet unique, lequel permet aux viticulteurs d'avoir un interlocuteur dédié au règlement des problèmes les plus immédiats.

S'agissant du chômage, s'il advenait que de grandes difficultés conduisent malheureusement certains à perdre leur travail, il sera possible de recourir au chômage partiel. Nous aurons l'occasion d'en rediscuter dès que ce sera nécessaire.

Pour ce qui est du second temps, de l'avenir, de la manière dont nous allons gérer ces crises et ces aléas climatiques, ce qui s'est passé en Gironde, comme ailleurs, prouve qu'on arrive au bout d'un système tel qu'il a été organisé, qui a fonctionné, qui fonctionne encore. Compte tenu de l'intensité des aléas que nous connaissons aujourd'hui et de leur fréquence, provoquée par le réchauffement climatique, il est absolument indispensable de réfléchir à des systèmes assurantiels.

Lors de mon déplacement en Gironde, il est apparu possible de réaliser une expérimentation du système assurantiel pour essayer de régler ce problème. En effet, les agriculteurs ou viticulteurs assurés représentent aujourd'hui à peine 20 % de l'ensemble des populations concernées.

Nous avons un besoin impérieux d'élargir la base sur laquelle doit s'appuyer l'assurance contre les risques climatiques. Si nous en restons là, nous connaîtrons en effet à chaque fois les mêmes difficultés.

Le groupe de travail que j'ai mis en place mène actuellement une réflexion sur les perspectives. Il me reviendra ensuite de rendre l'arbitrage final. Il faudra envisager, en particulier, la mobilisation des fonds prévus par la politique agricole commune. Je suis d'accord sur ce principe et tout à fait disposé à examiner l'expérimentation menée en Gironde pour voir comment l'étendre ensuite.

Enfin, j'envisage également le recours au dispositif existant de la déduction pour aléas, la DPA, qui pourrait être mobilisée aux fins de constituer une épargne de précaution, ce qui est d'ores et déjà quasiment possible. Il s'agit, comme vous le disiez, d'étendre la base sur laquelle sont calculées les cotisations, afin d'assurer une meilleure couverture des risques.

Telles sont les pistes sur lesquelles je travaille aujourd'hui, et l'expérimentation menée en Gironde sera l'un des éléments qui nourriront la réflexion.

Je suis convaincu tout comme vous, monsieur le sénateur, que nous avons besoin, au-delà des dispositifs actuellement existants, d'un système fondé sur une base plus large, afin de permettre d'aider plus efficacement les agriculteurs, et ce à un coût moins élevé. Il nous faut en effet arbitrer en vue de trouver un équilibre entre le coût de l'assurance et la prestation fournie.

Nous travaillerons sur cette question jusqu'à l'examen de la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, afin de trouver des solutions qui garantissent aux agriculteurs une meilleure couverture des risques.

M. le président. La parole est à M. Gérard César.

M. Gérard César. Je remercie M. le ministre de sa réponse, qui rejoint tout à fait les préoccupations des professionnels girondins concernés.

Il me semble que l'on pourrait augmenter la DPA lors du débat sur le projet de loi de finances pour 2014, quitte à supprimer la déduction pour investissement, la DPI, qui ne s'applique qu'au matériel agricole. Mieux vaudrait, en termes de dotations, avoir une assurance qui concerne les aléas climatiques. Chaque agriculteur pourrait ainsi constituer une provision.

Se posera toujours le problème de la garantie de la réassurance, sur lequel nous avons buté lors du débat sur la loi de modernisation agricole, comme j'ai eu l'occasion de vous le dire, monsieur le ministre.

Nous devons trouver un système permettant de garantir la réassurance. Pour ce qui concerne la Gironde, le département et le conseil régional pourraient jouer ce rôle à titre expérimental ; ce serait une très bonne chose.

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