Question de M. PIRAS Bernard (Drôme - SOC) publiée le 17/10/2013

M. Bernard Piras attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les règles contentieuses du déféré préfectoral en matière d'autorisations d'urbanisme tacites.

Dans ce domaine, l'article L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales impose la transmission au représentant de l'État dans le département des permis de construire et autres autorisations d'occupation des sols.

Néanmoins, concernant les autorisations tacites (permis de construire ou décision de non opposition à déclaration préalable), l'article L. 424-8 du code de l'urbanisme précise que ces décisions sont exécutoires à compter de la date à laquelle elles sont acquises. Contrairement aux permis de construire expressément délivrés (article L. 424-7 du code de l'urbanisme), le caractère exécutoire des décisions tacites n'est donc pas soumis à une quelconque transmission au contrôle de légalité. S'agissant des permis de construire tacites, l'article R. 424-13 du code de l'urbanisme précise que le certificat de non opposition, délivré à la demande du pétitionnaire, doit indiquer la date à laquelle le dossier a été transmis au préfet ou à son délégué, permettant dès lors à ce dernier de connaître la date à laquelle cette autorisation sera purgée de tout recours. Rien n'est, toutefois, prévu concernant les décisions de non opposition à déclaration préalable de travaux, cette situation crée donc une incertitude quant au caractère définitif et incontestable de ces décisions.

En effet, malgré le caractère exécutoire des décisions tacitement délivrées, la jurisprudence (Conseil d'État, 6 juillet 2007, commune de Saint-Paul-Trois-Châteaux, n° 298744 ; cour administrative d'appel de Lyon, 18 octobre 2012, Préfet de la Drôme, n° 12LY02423 ; tribunal administratif de Lyon, 24 septembre 2013, préfet de l'Ardèche, n° 1306337) considère que le point de départ du délai de deux mois pendant lequel le préfet peut déférer l'acte devant le tribunal administratif court à compter du jour où le service du contrôle de la légalité et seul lui a eu communication de l'entier dossier de demande. Dès lors, les juridictions administratives ont considéré comme recevables certains déférés engagés plus d'un an après la décision tacite tout en annulant ou suspendant cette dernière sur le fond.

En pratique, les communes transmettent peu, rarement ou tardivement les dossiers de demandes préalables de travaux au préfet.

Cette situation crée une insécurité juridique particulièrement importante pour les pétitionnaires de telles décisions tacites, qui tendent d'ailleurs à se multiplier, lesquels peuvent voir leur décision de non opposition tacite annulée ou suspendue plus de trois mois après l'avoir obtenue.

Et ce, alors même que ces demandes préalables ont fait l'objet d'une instruction préalable par les services déconcentrés de l'État mis à disposition.

Il en est de même concernant les permis de construire tacites lorsque le pétitionnaire ne demande pas rapidement le certificat de non opposition prévu à l'article R. 424-13 du code de l'urbanisme. L'insécurité touche également les communes contre qui une action en responsabilité pour faute peut facilement être engagée à la suite d'une telle annulation et aboutir à indemniser le pétitionnaire de l'ensemble de ses préjudices.

Face à cette situation, il lui demande de lui indiquer si, dans un contexte de limitation des recours en matière d'urbanisme, une évolution permettant de sécuriser ce genre de décision est à prévoir.

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 13/03/2014

Sauf cas prévus par le code de l'urbanisme, à défaut de notification d'une décision expresse dans un délai d'instruction d'un mois pour les déclarations préalables et de deux ou de trois mois pour les demandes de permis, le silence gardé par l'autorité compétente vaut décision de non-opposition à la déclaration préalable ou octroi d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir tacite (articles R. 423-23 et R.424-1 du code de l'urbanisme). Ces délais d'instruction peuvent être majorés dans certaines situations. Les permis et décisions de non-opposition à une déclaration préalable tacites deviennent exécutoires à compter de la date à laquelle ils sont acquis, c'est-à-dire à l'issue des délais d'instruction de droit commun ou spécifiques (article L. 424-8 du code de l'urbanisme). L'absence de matérialisation d'une décision tacite ne permet pas, par définition, de satisfaire à l'obligation de transmission de ces actes au représentant de l'État et de disposer d'une date certaine de réception par les services préfectoraux à partir de laquelle court le délai du recours contentieux. Néanmoins, les articles R. 423-7 et R. 423-8 du code de l'urbanisme prévoient que le maire doit transmettre un exemplaire de la demande de permis ou de la déclaration préalable au préfet dans la semaine qui suit le dépôt, en amont de toute décision. Deux situations sont alors possibles. Soit cette transmission a été effectuée par le maire dans le délai requis et le délai du déféré court à compter de la date à laquelle le permis tacite ou la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis, en l'occurrence à l'issue du délai d'instruction. Soit cette transmission n'a pas été effectuée et le délai du déféré ne court qu'à compter de la date à laquelle le préfet reçoit effectivement le dossier relatif à la demande de permis ou à la déclaration préalable, même si cette transmission est postérieure à l'acquisition du caractère exécutoire de l'acte (CE, 23 octobre 2013, n° 344454). Par conséquent, si le maire respecte les dispositions des articles R. 423-7 et R. 423-8 du code de l'urbanisme, les décisions tacites relatives aux permis et à l'absence d'opposition aux déclarations préalables ne se heurtent pas à une insécurité juridique particulière. Des garanties ont été apportées ces dernières années pour renforcer la sécurité juridique des autorisations individuelles d'urbanisme et améliorer le traitement des contentieux. Ainsi, le décret n° 2007-18 du 5 janvier 2007 pris pour l'application de l'ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme a-t-il clarifié les délais d'instruction et la prévisibilité pour le pétitionnaire de l'obtention d'une décision tacite. L'article 3 du décret n° 2012-274 du 28 février 2012 relatif à certaines corrections à apporter au régime des autorisations d'urbanisme a ajouté à l'article R. 424-13 du code de l'urbanisme que le certificat que le pétitionnaire peut demander au maire, en cas de permis tacite, doit préciser la date de transmission du dossier au préfet. L'article 1er du décret n° 2013-879 du 1er octobre 2013 relatif au contentieux de l'urbanisme permet au juge saisi d'un recours contre un permis de fixer une date au-delà de laquelle aucun moyen nouveau ne peut plus être présenté afin d'éviter une prolongation injustifiée de la procédure due à la stratégie juridique d'une partie.

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