Question de Mme GONTHIER-MAURIN Brigitte (Hauts-de-Seine - CRC) publiée le 10/04/2014

Mme Brigitte Gonthier-Maurin attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur le caractère illégal de frais réclamés aux élèves qui souhaitent s'inscrire aux épreuves du certificat d'aptitude professionnelle (CAP) et du brevet d'études professionnelles (BEP).

Elle a, en effet, été alertée de cette pratique dans l'académie de Paris, Créteil, Versailles où, depuis cinq ans, le service inter-académique des examens et concours (SIEC) demande aux familles dont les enfants s'inscrivent aux épreuves du CAP et du BEP de régler par un mandat « cash » ou un chèque à l'ordre du Trésor public, une somme de quatre à cinq euros.

Elle rappelle que, depuis une réforme de 2008, le SIEC s'est vu attribuer l'organisation des épreuves du CAP et du BEP qui dépendait, auparavant, des inspections académiques. Cette réorganisation, réalisée dans le cadre de la révision générale des politiques publiques (RGPP), s'est aussi accompagnée de suppressions de postes d'agents dévolus à cette mission dans les inspections académiques. Le SIEC s'est alors retrouvé en charge de la gestion de plusieurs centaines de diplômes sans moyens nouveaux.

C'est ainsi qu'à la session 2009, les familles dont les enfants voulaient s'inscrire aux épreuves de CAP et de BEP se sont vu demander une participation aux frais d'affranchissement de quatre euros, sous forme de chèque à l'ordre du Trésor public ou de mandat « cash », pour l'envoi au domicile des familles, par lettre recommandée, des diplômes. Elle souligne que de tels frais ne sont pas exigés pour les candidats au baccalauréat.

En 2011, une nouvelle modification est intervenue et ce sont les établissements qui assurent eux-mêmes, non seulement la distribution des diplômes aux lauréats mais aussi qui s'acquittent des différentes relances auprès des élèves, de la distribution des différentes convocations et de l'acheminement de l'ensemble des documents en direction des établissements centres d'examens, comme pour le baccalauréat. Or, en Île-de France, il est désormais réclamé aux familles la somme de cinq euros, somme qui doit être collectée par les établissements auprès des familles.

Une telle pratique lui semble en totale contradiction avec le principe de gratuité des examens, rappelé par un rapport de l'inspection générale de 2002 où il est indiqué que, depuis l'an 2000, date de la circulaire sur la gratuité scolaire, « la gratuité des examens est complète à tous les niveaux de l'enseignement scolaire : CAP/BEP, diplôme national du brevet, baccalauréat ; tous les droits d'inscription ont été supprimés. » Elle vient également injustement pénaliser des élèves qui, souvent, appartiennent à des milieux socio-professionnels défavorisés.

De plus, le fait de demander aux établissements de collecter ces sommes, sans reçu ni facture, s'apparente à une gestion de fait, pratique pour le moins illégale d'un point de vue comptable.

Aussi lui demande-t-elle de prendre des mesures, afin que cette pratique illégale cesse et que les élèves candidats aux épreuves de CAP et de BEP des prochaines sessions ne soient plus victime de cette discrimination.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales et de la santé, chargé des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion publiée le 04/06/2014

Réponse apportée en séance publique le 03/06/2014

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Madame la secrétaire d'État, depuis environ cinq ans, le service interacadémique des examens et concours, le SIEC, dont le champ de compétence couvre les académies de Paris, Créteil et Versailles, réclame des frais aux familles dont les enfants s'inscrivent aux épreuves du certificat d'aptitude professionnelle, le CAP, et du brevet d'études professionnelles, le BEP.

Cette pratique est inacceptable.

D'abord, elle est illégale au regard du principe de gratuité des examens, réaffirmé dans un rapport de l'inspection générale de l'éducation nationale. Dans ce rapport de 2002, on lit que, depuis la circulaire sur la gratuité scolaire de 2000, « la gratuité des examens est complète à tous les niveaux de l'enseignement scolaire : CAP/BEP, diplôme national du brevet, baccalauréat ; tous les droits d'inscription ont été supprimés. »

Ensuite, cette pratique apparaît discriminatoire dans la mesure où elle concerne exclusivement les élèves de CAP et de BEP : de tels frais, en effet, ne sont pas exigés des candidats au baccalauréat.

Elle est également injuste, car elle vient pénaliser des élèves qui, souvent, appartiennent à des milieux socioprofessionnels défavorisés.

Comment en est-on arrivé là ?

Dans le cadre d'une réforme de 2008, le SIEC, qui dépend de l'éducation nationale, s'est vu attribuer l'organisation des épreuves du CAP et du BEP, qui relevait auparavant des inspections académiques. Cette réorganisation, réalisée dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, la RGPP, s'est accompagnée, dans les inspections académiques, de suppressions de postes d'agents dévolus à cette mission.

Dès lors, le SIEC s'est trouvé chargé de gérer plusieurs centaines de diplômes, mais sans disposer de moyens supplémentaires.

C'est ainsi que, à partir de la session 2009, les familles dont les enfants s'inscrivaient aux épreuves du CAP et du BEP se sont vu demander une « participation aux frais d'affranchissement », d'un montant de quatre euros, à payer sous forme de chèque à l'ordre du Trésor public ou de mandat cash. Ces frais étaient destinés à couvrir l'envoi des diplômes au domicile des familles par lettre recommandée, alors que, je le répète, de tels frais ne sont pas exigés des candidats au baccalauréat.

En 2011, une nouvelle modification est intervenue : désormais, les établissements assureraient eux-mêmes la distribution des diplômes aux lauréats, comme ils le font pour le baccalauréat.

Pourtant, le SIEC continue de réclamer des frais aux familles ! Ces frais, qui s'élèvent aujourd'hui à cinq euros, doivent être collectés par les établissements auprès des familles. Or demander aux établissements de collecter ces sommes sans émettre ni reçu ni facture s'apparente à une gestion de fait, pratique pour le moins contestable d'un point de vue comptable.

Pour toutes ces raisons, madame la secrétaire d'État, je demande au Gouvernement d'intervenir très rapidement pour que le SIEC cesse cette pratique illégale et discriminatoire, dont les victimes sont les élèves et leur famille.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Ségolène Neuville,secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Madame la sénatrice, je vous prie d'excuser Benoît Hamon, ministre de l'éducation nationale, qui m'a chargée de vous communiquer sa réponse.

Les élèves des filières dont vous avez parlé, ceux qui se présentent aux épreuves du CAP et du BEP, sont les futurs artisans, commerçants, ouvriers qualifiés, techniciens et ingénieurs qui, demain, contribueront à la richesse du pays.

Comme vous l'avez souligné, le SIEC demande, lors de l'inscription à certains examens et à tous les concours qu'il organise, une participation financière, d'environ cinq euros, aux affranchissements des courriers destinés aux candidats. En effet, ce service assimile l'envoi des convocations et des diplômes à un service rendu aux familles.

Cette pratique n'est pas isolée et des différences existent selon les académies et selon les examens.

Comme vous, madame la sénatrice, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche souhaite que le principe de gratuité, énoncé à l'article L. 132-2 du code de l'éducation, soit pleinement respecté. C'est pourquoi il a demandé à la Direction générale de l'enseignement scolaire de réaliser un état des lieux des frais d'affranchissement demandés par les académies pour les examens, de vérifier si ces pratiques sont justifiées et de présenter des propositions à cet égard.

L'ensemble du Gouvernement est attaché à l'école gratuite, qui a permis, en quarante ans, de multiplier par trois le nombre de bacheliers ; c'est notamment grâce à elle que les jeunes sortent du système éducatif plus diplômés en France que dans l'ensemble de l'Union européenne.

Madame Gonthier-Maurin, vous aurez très rapidement connaissance du travail que la Direction générale de l'enseignement scolaire va remettre au ministre de l'éducation nationale.

Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Madame la secrétaire d'État, je me réjouis que M. le ministre de l'éducation nationale se préoccupe de ce problème grave, qui remet en cause le principe de gratuité.

Dans cette affaire, on est face à une sorte de jeu de dupes - passez-moi l'expression. En effet, alors que l'on parle le plus souvent de frais d'affranchissement- vous-même venez de le faire -, le SIEC parle quelquefois d'une participation pour le matériel nécessaire aux épreuves.

C'est la preuve qu'il est nécessaire de réaliser, et rapidement, un inventaire des pratiques qui ont cours et d'y mettre de l'ordre tout aussi rapidement, dans la mesure où la période des examens s'ouvre dans quelques jours.

Je veux encore souligner que certains chefs d'établissement, qui s'émeuvent de la situation, sont placés dans des situations impossibles. En effet, c'est à eux qu'il revient de collecter les sommes, tâche à laquelle certains refusent de procéder. Résultat : dans certains endroits, des bras de fer sont engagés entre le chef d'établissement et le SIEC, ce qui ne me paraît guère compatible avec la tranquillité qui doit présider au travail de chacun.

Il faut enfin signaler que toutes ces pratiques sont parfaitement connues des inspections et, je pense, des recteurs.

Madame la secrétaire d'État, je crois vraiment qu'il faut se hâter d'y mettre bon ordre et de faire respecter le principe de gratuité dans l'acquisition des diplômes.

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