Question de Mme DES ESGAULX Marie-Hélène (Gironde - UMP) publiée le 17/04/2014

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social sur les effets collatéraux négatifs de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi qui rend obligatoire une couverture complémentaire santé collective minimale dans toutes les entreprises au 1er janvier 2016.

Elle regrette qu'au cours de la réunion de la commission mixte paritaire du mardi 23 avril 2013, plusieurs dispositions introduites au Sénat à l'article premier aient été supprimées et, particulièrement, une modification, de bon sens, qui permettait à un salarié bénéficiant à titre personnel ou en tant qu'ayant droit d'une assurance complémentaire santé à la date de signature de l'accord de branche, puisse bénéficier, à sa demande, d'une dispense d'affiliation.

Par ailleurs, les modalités spécifiques de financement en cas d'employeurs multiples et pour les salariés à temps très partiel devront être déterminées par décret. Or, à ce jour, le décret est toujours en attente de publication.

Également, l'imposition fiscale des mutuelles de santé sur bulletins de salaire était discutable sur le fait que tous les salariés n'étaient pas imposables. Aujourd'hui, il s'avère clairement qu'il s'agit d'un nouvel impôt qui limitera les garanties mutuelles familiales aux foyers dont un membre uniquement sera salarié et qu'il s'agit aussi d'un nouveau mode de financement de la sécurité sociale qui se nourrit des cotisants par l'intermédiaire des mutuelles de santé.

Elle lui demande donc quelle réponse satisfaisante peut être apportée à un salarié, employé par des employeurs multiples et à temps très partiel couvert par une mutuelle, par exemple familiale, qui se voit imposer par son employeur l'adhésion obligatoire à une complémentaire santé et quelle réponse faire à un salarié qui va voir son pouvoir d'achat ainsi diminué.

- page 944


Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'économie, du redressement productif et du numérique, chargé du numérique publiée le 21/05/2014

Réponse apportée en séance publique le 20/05/2014

Mme Marie-Hélène DesEsgaulx.Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, j'ai souhaité attirer l'attention du ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social sur les effets collatéraux négatifs de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, qui rend obligatoire une couverture complémentaire santé collective minimale dans toutes les entreprises au 1er janvier 2016.

Je regrette que, au cours de la réunion de la commission mixte paritaire du mardi 23 avril 2013, plusieurs dispositions introduites par le Sénat à l'article 1er du projet loi relatif à la sécurisation de l'emploi aient été supprimées. C'est le cas en particulier d'une modification de bon sens qui permettait à un salarié disposant, à titre personnel ou en tant qu'ayant droit, d'une assurance complémentaire santé à la date de signature de l'accord de branche de bénéficier à sa demande d'une dispense d'affiliation.

En effet, notre excellente collègue Catherine Procaccia avait fait adopter un amendement - il s'agissait de l'amendement n° 627 rectifié ter - tendant à laisser le libre choix à des affiliés déjà couverts par une complémentaire santé de conserver leur couverture santé. Malgré une demande de retrait de la commission et un avis défavorable du Gouvernement, la sagesse des sénateurs avait alors prévalu.

Par ailleurs, les modalités spécifiques de financement en cas d'employeurs multiples et pour les salariés à temps très partiel doivent être déterminées par décret. Or, à ce jour, le décret est toujours en attente de publication.

De plus, l'imposition fiscale des mutuelles de santé sur les bulletins de salaire était discutable, car tous les salariés ne sont pas imposables. Aujourd'hui, il est clair qu'il s'agit là d'un nouvel impôt, lequel limitera les garanties mutuelles familiales aux foyers dont seul un membre est salarié. Il s'agit, en outre, d'un nouveau mode de financement de la sécurité sociale, qui se nourrit des cotisants par l'intermédiaire des mutuelles de santé.

Je demande donc au ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social quelle réponse satisfaisante peut être apportée à un salarié ayant des employeurs multiples et travaillant à temps très partiel, couvert par une mutuelle, par exemple familiale- c'est souvent le cas -, qui se voit imposer par son employeur l'adhésion obligatoire à une complémentaire santé. Que dire à un salarié dont le pouvoir d'achat sera ainsi diminué ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Axelle Lemaire,secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique, chargée du numérique. Madame la sénatrice, je vous prie tout d'abord d'excuser l'absence du ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social, François Rebsamen. Il rencontre en ce moment même les présidents de régions, qui sont, comme vous le savez, des acteurs essentiels dans la mobilisation de toutes les énergies sur les territoires au service de l'emploi et de la compétitivité des entreprises.

L'assurance complémentaire santé contribue à garantir un accès complet aux soins pour les Français. Toutefois, tous nos concitoyens n'ont pas accès à une complémentaire. Par ailleurs, on le sait, la qualité des contrats est très inégale. C'est pourquoi une série d'engagements ont été pris. Il me semble utile d'en rappeler les différentes étapes avant de répondre plus précisément à la question que vous avez posée.

Lors du congrès de la Fédération nationale de la mutualité française, au mois d'octobre 2012, le Président de la République a souhaité la généralisation de l'accès à une complémentaire santé.

L'accord interprofessionnel signé par les partenaires sociaux le 11 janvier 2013 vise à permettre d'atteindre cet objectif et prévoit l'obligation d'instaurer une couverture complémentaire santé collective minimale dans toutes les entreprises au 1er janvier 2016. La loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l'emploi, que vous avez évoquée, a transcrit cette obligation au plan législatif.

Vous soulevez, madame la sénatrice, une série de problèmes posés par ces dispositions.

En premier lieu, vous interrogez le ministre du travail sur les possibilités de dispenses d'affiliation pour certains salariés ou cas individuels. La loi prévoit déjà de telles dispenses aux contrats collectifs obligatoires, notamment pour éviter les doubles couvertures. C'est le cas, par exemple, pour les salariés déjà couverts par le contrat collectif obligatoire de leur conjoint.

Il n'a pas été jugé souhaitable d'aller plus loin et d'élargir les possibilités de dispenses, afin de ne pas affaiblir la couverture des salariés et de ne pas réduire la mutualisation, nécessaire, au sein des entreprises ou des branches que permettent les contrats collectifs obligatoires.

En second lieu, les décrets d'application de cette disposition de la loi du 14 juin 2013 ont été rédigés et ont fait l'objet d'une concertation avec les partenaires sociaux et les fédérations d'assureurs. Ils devraient être publiés très prochainement.

Enfin, la fiscalisation de la participation de l'employeur aux complémentaires d'entreprise constitue une mesure d'équité, dès lors que les personnes qui souscrivent aujourd'hui une complémentaire à titre individuel ne peuvent, à l'exception des travailleurs indépendants, déduire de l'assiette de leur impôt sur le revenu le coût de leur complémentaire santé. Cette disposition, qui est sans effet sur le champ des garanties d'assurance des familles, contribuera à financer le coût de la généralisation de la complémentaire santé.

Vous l'aurez compris, il s'est agi de trouver un équilibre délicat entre la volonté, légitime et partagée sur ces travées, de favoriser l'accès le plus large possible à une couverture santé complémentaire et celle de respecter la compétitivité des entreprises, sans alourdir leurs charges et les contributions des salariés.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.

Mme Marie-Hélène DesEsgaulx.Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, de ce rappel.

Néanmoins, pour ma part, j'ai relu le compte rendu des débats du Sénat du 18 avril 2013 sur le projet de loi relatif à la sécurisation de l'emploi. Il met clairement en lumière, non pas un problème d'équilibre, mais la volonté des sénateurs, qui se sont exprimés par la voix de notre collègue Catherine Procaccia, d'éviter aux salariés de payer deux fois sans obtenir de bénéfice supplémentaire. C'est cela qui est très important ! Les salariés doivent avoir le libre choix.

Par ailleurs, il appartient au pouvoir réglementaire de fixer la liste des justificatifs, laquelle n'a pas à figurer dans une loi. Je tiens néanmoins à rappeler à cet égard l'engagement pris par le Gouvernement. M. Sapin nous a dit clairement qu'une garantie serait apportée aux salariés produisant tout document prouvant la souscription par ailleurs d'une couverture individuelle portant sur le même type de garanties.

Nous serons donc très attentifs sur ces points. Il y va du respect de la parole du Gouvernement. Je suis ravie d'apprendre que les décrets seront publiés très prochainement. Nous espérons y trouver réponse à notre questionnement. C'est le pouvoir d'achat des salariés qui est en jeu.

- page 4088

Page mise à jour le