Question de M. REPENTIN Thierry (Savoie - SOC) publiée le 17/07/2014

M. Thierry Repentin attire l'attention de M. le secrétaire d'État, auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche sur l'opportunité d'une augmentation de la redevance perçue sur les tronçons qui connaissent des problèmes de congestionnement ou dont l'utilisation par les véhicules engendre une pollution atmosphérique et sonore.

L'article 7 quater de la directive 2011/76/UE du Parlement européen et du Conseil du 27 septembre 2011 modifiant la directive 1999/62/CE relative à la taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures, dite directive « eurovignette 3 », prévoit un dispositif permettant d'internaliser, dans la tarification du transport routier, le coût des externalités négatives qu'il génère, comme le coût d'une pollution atmosphérique et/ou d'une pollution sonore.

L'article 7 septies de cette même directive prévoit, pour les infrastructures sises dans des régions montagneuses, une majoration de la redevance d'infrastructure perçue sur des tronçons qui connaissent des problèmes de congestionnement, ou dont l'utilisation par les véhicules cause des dommages à l'environnement.

Ces mesures, qui n'ont pas encore été transposées en droit interne, permettraient le financement du report modal de la route vers le rail et pourraient constituer une réponse à des épisodes de pollution.

Le report modal est un objectif constant. Il est cependant régulièrement mis à mal, notamment pour des raisons budgétaires mais, le coût de l'inaction est bien supérieur à celui de la réalisation effective des projets.

Il lui demande donc de lui indiquer la position du Gouvernement sur ces sujets.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche publiée le 23/07/2014

Réponse apportée en séance publique le 22/07/2014

M. Thierry Repentin. Ma question, monsieur le secrétaire d'État, concerne l'opportunité d'une augmentation de la redevance perçue sur les tronçons routiers, comme ceux traversant les Alpes, qui connaissent des problèmes de congestionnement, ou dont l'utilisation par les véhicules génère une pollution atmosphérique et sonore.

De fait, vous le savez, l'article 7 quater de la directive 2011/76/UE du Parlement européen et du Conseil du 27 septembre 2011 dite« Eurovignette III », modifiant la directive 1999/62/CE relative à la taxation des poids lourds pour l'utilisation de certaines infrastructures, prévoit un dispositif permettant d'internaliser dans la tarification du transport routier le coût des externalités négatives qu'il génère, comme le coût d'une pollution atmosphérique ou d'une pollution sonore.

L'article 7 septies de cette même directive prévoit, pour les infrastructures situées dans des zones montagneuses, une majoration de la « redevance d'infrastructure perçue sur des tronçons qui connaissent des problèmes de congestionnement, ou dont l'utilisation par les véhicules cause des dommages à l'environnement ».

Le coût de ces pollutions, selon les estimations de la Commission européenne, pourraient s'élever à 210 milliards d'euros d'ici à 2020. Ces mesures, qui n'ont à l'heure actuelle pas encore été transposées en droit interne, permettraient le financement du report modal de la route vers le rail et pourraient alors constituer une réponse à des épisodes de pollution, notamment en Savoie, dans la vallée de la Maurienne, ou dans d'autres vallées alpines. La protection du parc national de la Vanoise, premier parc national de France, pourrait également justifier une telle mesure.

Le report modal est un objectif constant. L'accord franco-italien du 30 janvier 2012 sur le projet de ligne ferroviaire Lyon-Turin prévoit la mise en œuvre d'une politique favorisant le report modal du transport de la route vers le rail dans les Alpes. L'autoroute ferroviaire alpine participe, dans une dimension certes moindre que ce qui a été escompté, de l'allégement de la circulation dans les vallées et les agglomérations du territoire alpin. Des mesures sont par ailleurs à l'étude pour restreindre la circulation des poids lourds et interdire le tunnel du Fréjus aux véhicules de norme Euro 1.

Mais cet objectif est cependant régulièrement mis à mal, notamment pour des raisons budgétaires. Je souhaite rappeler le coût de la non-réalisation ou celui de l'inaction en termes de sécurité de nos concitoyens qui empruntent ces voies, d'atteintes à l'air et à l'environnement, ainsi que pour l'économie de ce territoire et, au-delà, pour le commerce extérieur de notre pays, lequel dépend de la qualité de ces infrastructures de transport.

Ce coût sera, hélas ! bien supérieur à celui de la réalisation effective de l'infrastructure. Dans ce contexte, monsieur le secrétaire d'État, je vous serais reconnaissant de bien vouloir m'indiquer la position du Gouvernement sur ces points, en souhaitant que la mise en place de la directive« Eurovignette III » soit l'occasion de favoriser la réalisation de la ligne ferroviaire à grande vitesse fret et voyageurs entre Lyon et Turin, ce que souhaite aussi la Commission européenne.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Frédéric Cuvillier,secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, cher Thierry Repentin, la directive de 1999, dite directive« Eurovignette », détermine le cadre commun pour la tarification des poids lourds sur toutes les routes du réseau transeuropéen de transport et les autoroutes.

Cette directive, ainsi que les deux directives modificatives de 2006 et 2011, affirme deux objectifs principaux : l'application du principe « utilisateur-payeur », fondée essentiellement sur la mise en œuvre d'une tarification kilométrique de l'usage des infrastructures ; l'application du principe « pollueur-payeur », visant à faire varier la tarification des infrastructures selon les nuisances générées par les poids lourds.

Ce second principe est lui-même décliné dans la directive selon deux modalités : la première, contraignante, prévoit la modulation des tarifs nouvellement établis en fonction de la classe Euro d'émission de polluants des poids lourds ; la seconde, facultative, autorise l'intégration des coûts de deux types de nuisances dans la tarification de l'infrastructure : la pollution atmosphérique et le bruit.

Qu'il s'agisse du réseau routier national concédé ou non concédé, la tarification des infrastructures routières en France respecte pleinement l'esprit et la lettre des directives. D'une part, les péages des autoroutes concédés et le futur péage de transit poids lourds correspondent à une tarification kilométrique, et donc, à ce titre, à l'application du principe « utilisateur-payeur ».D'autre part, en ce qui concerne le principe« pollueur-payeur », les nouveaux systèmes de tarification mis en place depuis 2010 - je pense, par exemple, aux autoroutes A63 et A150, le futur péage de transit -prévoient une modulation du tarif selon la classe Euro des poids lourds, conformément aux dispositions de la directive.

En revanche, pour répondre à un point précis de votre question, la faculté d'intégrer à la tarification les coûts de la pollution atmosphérique et du bruit n'a effectivement pas été transposée en droit national à ce stade. Il en va de même de celle consistant à établir un surpéage dans les zones de montagne. En effet, la mise en place de ces modalités de tarification soulève un certain nombre de questions sur les plans juridique et technique, qui doivent être préalablement résolues. Par exemple, la collecte d'une taxe sur les coûts externes ne serait pas possible au regard du système actuel de perception du péage sur les autoroutes concédées.

S'agissant du surpéage pour financer des projets transfrontaliers - vous y avez fait référence -, la directive prévoit que sa mise enœuvre doit faire l'objet d'un accord entre les États membres concernés. S'agissant plus particulièrement du financement du Lyon-Turin, auquel je sais que vous êtes tout particulièrement attaché, les réflexions à conduire doivent s'inscrire dans le cadre d'une étroite coordination avec nos partenaires italiens. Je peux vous assurer de la volonté de la partie française d'avancer rapidement sur ces aspects avec nos homologues transalpins afin d'apporter des réponses sécurisantes, stables et pérennes sur le financement des infrastructures.

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Repentin.

M. Thierry Repentin. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'État. Vous nous avez rappelé, et je l'ai bien compris, que quelques difficultés d'ordres juridique et technique se posaient encore.

Mais je connais également votre volonté, qui est celle du secrétaire d'État chargé des transports. Or c'est elle qui compte et que je souhaitais vous entendre exprimer !

Je sais que vous avez toujours été présent lors des sommets bilatéraux entre la France et l'Italie des deux dernières années, lors desquels la nécessité de réaliser le Lyon-Turin ferroviaire a été affirmée avec force, y compris par la voix du Président de la République.

J'ai aussi entendu le Premier ministre Manuel Valls réaffirmer, dans sa déclaration de politique générale devant l'Assemblée nationale, que l'Europe devait se traduire, en France, par de grands chantiers. Je crois que celui du Lyon-Turin peut justement répondre à la préoccupation du chef du Gouvernement de relancer l'économie française par de grandes infrastructures, sachant par ailleurs que l'Union européenne financera à hauteur de 40 % les travaux de cette installation ferroviaire.

Cet effort pourrait également être consacré à la réalisation d'une infrastructure fluviale ; mais c'est un autre sujet auquel, je le sais, vous portez aussi une grande attention, monsieur le secrétaire d'État.

Je compte donc sur vous pour trouver, avec votre homologue italien, les voies et moyens pour mettre en place la directive dite« Eurovignette III » en zone de montagne. Cela constituera une ressource supplémentaire aux fonds structurels européens qui seront mobilisés. Ce serait, en outre, une application judicieuse du principe pollueur-payeur.

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