Question de M. LE SCOUARNEC Michel (Morbihan - CRC) publiée le 09/10/2014

M. Michel Le Scouarnec attire l'attention de M. le secrétaire d'État, auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche sur les liaisons maritimes en direction des îles du Morbihan.

En effet, la délégation de service public pour la desserte des îles de Groix, Belle-Île, Houat et Hoëdic arrive à son terme à la fin de l'année. Jusqu'à ce jour, la compagnie Océane, filiale de Véolia Transport, est l'actuel délégataire de cette mission pour assurer le transport par bateau entre le continent et les îles.

Or, le conseil général du Morbihan envisagerait de réduire le nombre de rotations. Par exemple, pour Belle-Île-en-Mer, la compagnie Océane devrait passer de sept à six rotations quotidiennes dès novembre 2014, voire même à cinq le week-end. Deux retours seulement seraient également prévus, à des horaires assez tôt dans la journée.

Cette configuration augure de la nouvelle organisation future des transports, avec une offre quotidienne hors période estivale en baisse. Cette proposition inquiète légitimement les insulaires et leurs élus. Alors que les subventions du département ont diminué, les efforts demandés aux insulaires ne cessent d'augmenter. Pour rappel, la délégation de service public signée en 2008 avec cette filiale de Véolia avait, à l'époque, suscité quelques doutes sur les capacités de la gestion commerciale, maritime et marketing des liaisons maritimes par cette entité. Le récent rapport de la Cour des comptes constaterait le déficit récurrent des lignes exploitées par Véolia. Les habitants et les commerçants des îles craignent une répercussion sur la vie économique et quotidienne qu'impliquerait ce choix de rotation d'une part et de transporteur d'autre part, avec des horaires totalement inadaptés au commerce et à l'attractivité des îles.

Afin de garantir un égal accès au service public du transport que représentent les liaisons avec le continent, il est impératif de venir en aide aux collectivités locales soumises au déficit de fonctionnement des liaisons entre leurs îles et le continent, afin de garantir une offre de rotation convenable pour tous.

C'est pourquoi il lui demande les mesures envisagées pour conserver et accroître le nombre de rotations entre les îles du Morbihan et le continent.

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Réponse du Ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social publiée le 15/10/2014

Réponse apportée en séance publique le 14/10/2014

M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, auteur de la question n° 863, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Michel Le Scouarnec. Je commencerai par citer un quatrain :

Ô cœur des îles

Sur fond de peine,

La joie est une soie

Sur fond de laine.

Quant aux îliens du Morbihan et à leurs élus, leur peine est grande et se mue en une colère qu'ils ont exprimée avec force ces derniers jours !

S'il est habituel que le vent souffle sur ces îles, la nouvelle délégation de service public pour la desserte de Groix, de Belle-Île-en-Mer, de Houat et de Hoëdic intensifie les rafales. Afin de répondre à un rapport de la cour régionale des comptes, le conseil général et la compagnie Océane, filiale de Veolia Transport, actuelle titulaire de la délégation de service public, envisagent, entre autres mesures, de supprimer le « tarif morbihannais », d'augmenter les tarifs des résidents secondaires, de doubler le tarif camion pour le transport des marchandises et de diminuer de 7 % le nombre de rotations annuelles. Autrement dit, il s'agira de payer beaucoup plus pour moins de services !

Le conseil général ne se cache-t-il pas derrière les recommandations du rapport en question ? En effet, si la cour régionale des comptes informe les élus et émet un avis, son rapport n'oblige pas mécaniquement ces derniers à prendre des décisions. Certes, il pointe l'existence de tarifs illégaux, comme ceux dont bénéficient les parents d'insulaires ou ceux du fret pour les entreprises implantées sur les îles, mais il ne demande pas, par exemple, d'instaurer deux tarifs différenciés en hausse - un pour la semaine et un pour le week-end - pour les insulaires. Et que dire de l'augmentation du prix de l'aller-retour pour les enfants d'insulaires, qui passerait de 12,30 euros à 16 euros, soit une hausse de 30 % ? Je rappelle que la création de ces tarifs reposait sur le fait que, par leurs impôts, les Morbihannais - entreprises comme particuliers - participent au financement des investissements en matière de liaisons maritimes.

Les mesures envisagées inquiètent légitimement les insulaires et leurs élus. Elles semblent être le résultat d'une analyse purement technocratique et mathématique des liaisons vers les îles. Lors de la signature de la délégation de service public, en 2008, des doutes avaient d'ailleurs été émis sur la capacité de Veolia Transport à assurer la gestion commerciale et maritime des liaisons et leur marketing.

Devant ce constat, plusieurs choix peuvent être opérés, dont celui du développement des liaisons maritimes ou, à l'inverse, celui de leur réduction. Il semblerait que cette dernière option soit privilégiée, au détriment de l'insularité morbihannaise. Je le regrette vivement, tant ce projet est loin de répondre aux besoins des habitants et des commerçants des îles. Tous craignent la répercussion sur la vie économique et quotidienne des nouvelles dispositions, avec des horaires totalement inadaptés au commerce et au maintien de l'attractivité des îles. Les produits du quotidien, déjà chers, vont devenir inaccessibles, car la hausse du coût des traversées pour le fret se répercutera inévitablement sur le prix des marchandises. Continuer dans ce sens, c'est appauvrir encore plus ces îles, dont la fréquentation a baissé de 20 % en six ans.

Afin de garantir un égal accès au service public du transport que représentent les liaisons avec le continent, il est impératif de venir en aide aux collectivités locales confrontées au déficit de fonctionnement des navettes et d'assurer une offre de rotations qui soit acceptable pour tous. Monsieur le ministre, qu'allez-vous faire en ce sens ? Agir est d'autant plus urgent que, malheureusement, la crise frappe durement nos îles.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. François Rebsamen,ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de M. Alain Vidalies, actuellement retenu par une réunion avec le Premier ministre. Je suis bien sûr l'actualité et j'ai entendu parler du problème que vous soulevez.

Le conseil général du Morbihan a effectivement décidé de réduire le nombre de rotations lors du renouvellement de la délégation de service public pour la desserte passagers des îles de Groix, de Belle-Île-en-Mer, de Houat et de Hoëdic à la fin de l'année 2014.

Le Gouvernement comprend la préoccupation des élus, des habitants et des commerçants de ces îles. Néanmoins, comme vous le savez, la desserte des îles est encadrée par les articles L. 5431-1 et suivants du code des transports, aux termes desquels les transports maritimes réguliers publics de personnes et de biens sont organisés par le département. Ainsi, l'organisation du transport maritime pour la desserte des îles de Groix, de Belle-Île-en-Mer, de Houat et de Hoëdic relève de la compétence exclusive du conseil général du Morbihan. Eu égard au principe de libre administration des collectivités territoriales, le Gouvernement ne me permettrait pas de répondre en lieu et place du conseil général, auquel je fais pleinement confiance pour répondre aux besoins du territoire.

Pour autant, sensibilisé sur ce sujet par le député Gwendal Rouillard la semaine dernière et par vous-même ce matin, le secrétaire d'État chargé des transports, Alain Vidalies, a fait en sorte que son cabinet reçoive cet après-midi, à leur demande, une délégation d'élus du Morbihan, afin d'échanger sur le dossier et, plus largement, sur l'avenir des délégations de service public maritime.

M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec.

M. Michel Le Scouarnec. Monsieur le ministre, je me doutais un peu que le conseil général était compétent en la matière...

Pour Belle-Île-en-Mer, le nombre de rotations quotidiennes assurées par la compagnie Océane devrait passer de sept à six, voire à cinq le week-end. Deux retours seulement seraient prévus assez tôt dans la journée. Cette configuration augure d'une nouvelle organisation des transports marquée par une baisse du nombre de rotations et complètement inadaptée.

Depuis des années, les élus des territoires concernés travaillent à un modèle économique viable, qui passe évidemment par le transport maritime. Si les annonces qui ont été faites se confirment, des îles seront en grande difficulté.

Il semble incroyable qu'une délégation de service public d'une durée de six ans soit votée sans la moindre concertation avec les premiers concernés, à savoir les habitants et leurs élus. Tous ont été mis devant le fait accompli et sont abasourdis. Je pense qu'il y a des progrès à faire sur le plan de la démocratie participative ou de la citoyenneté !

Devant l'augmentation du coût du transport maritime, il serait opportun d'envisager la mise en place d'un fonds exceptionnel de solidarité pour venir en aide aux collectivités locales confrontées au déficit de fonctionnement des liaisons entre les îles et le continent. Aujourd'hui, dans les îles, le coût de construction des logements, y compris les logements sociaux, est déjà supérieur de 30 % à la moyenne nationale, à cause du coût du transport. Nous sommes donc loin de l'égalité de tous les citoyens devant le service public. J'espère que l'on réussira à faire bouger les choses.

M. François Rebsamen,ministre.Je l'espère aussi, monsieur le sénateur.

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