Question de M. MASSERET Jean-Pierre (Moselle - SOC) publiée le 20/11/2014

M. Jean-Pierre Masseret attire l'attention de M. le ministre de la défense sur la liberté d'expression et d'association dans les forces armées françaises. La Cour européenne des droits de l'Homme a rendu un arrêt, le 2 octobre 2014, condamnant la France pour confiscation de la liberté d'expression et de réunion dans les forces armées et l'appelant à légaliser la création de syndicats. À la suite de cet arrêt, de nombreuses associations militaires se sont émues des conséquences néfastes que cet arrêt pourrait avoir sur l'outil de défense français. Par exemple, le groupement des associations militaires de la Moselle pointe, dans une motion adoptée le 10 octobre 2014, « les risques dans la gestion des crises majeures, notamment dans la nécessité de disponibilités permanente des forces au service de la sécurité intérieure et extérieure de la France ». En outre, ce groupement associatif met en exergue les dispositifs de représentativité déjà existants au sein des armées, en termes d'information et de concertation. En conséquence, il lui demande quelles mesures le Gouvernement entend prendre, afin de poursuivre le travail engagé de rénovation de la concertation au sein des forces armées, tout en garantissant les capacités de disponibilités permanentes de l'ensemble des forces au service de la protection des citoyens et des intérêts de la France.

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Réponse du Ministère de la défense publiée le 04/12/2014

La Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a estimé, dans deux arrêts en date du 2 octobre 2014, que si la liberté des militaires peut faire l'objet de restrictions légitimes, ceux-ci ne peuvent se voir refuser, de façon générale, un droit d'association pour la défense de leurs intérêts matériels et moraux. Si ces décisions obligent à une adaptation du dialogue social concernant les militaires, la Cour n'a toutefois pas manqué de souligner la qualité du dispositif actuel de concertation, de participation et de représentation au sein des armées, directions et services du ministère de la défense. En effet, outre la publication en 2011 d'une charte de la concertation et le changement de composition en 2012 des conseils de la fonction militaire (CFM) et du conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM), ce dispositif s'est doté de modalités nouvelles de fonctionnement, conformément aux conclusions du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2013 qui avaient mis en évidence que « l'organisation de la concertation devait recevoir une nouvelle impulsion dans le contexte de réformes actuel ». Le plan de rénovation de l'organisation de la concertation a notamment donné lieu à la création d'un groupe de liaison du CSFM. Devenu un lien essentiel entre le CSFM et le ministre de la défense, cette instance est désormais l'un des contributeurs majeurs des réflexions entreprises récemment, notamment sur les droits civils et politiques des militaires et la création d'un dispositif réglementaire spécifique aux militaires du rang. En outre, la composition du CFM de la gendarmerie nationale a été modifiée afin de réorganiser la dynamique des échanges autour des acteurs principaux de la représentation des personnels que sont les représentants de catégorie. Parallèlement, une réflexion a été engagée sur la modernisation du format même de la concertation, d'une part, par des travaux menés par les états-majors d'armées, les CFM et le CSFM, dont les conclusions ont fait l'objet d'un rapport de propositions remis en décembre 2013 au Président de la République lors de la 90e session du CSFM, d'autre part, par un mandat d'expertise confié en janvier 2014 à l'inspection générale des armées par le ministre de la défense. À ce jour, après avoir pris acte des deux arrêts de la CEDH, le Président de la République a demandé, le 16 octobre 2014, que soit engagée une réflexion sur leur portée exacte et leurs conséquences. Cette étude, confiée à Monsieur Bernard Pêcheur, Président de la section de l'administration du Conseil d'État, vise à évaluer les options juridiques ouvertes en matière d'association professionnelle, tout en veillant à respecter les missions opérationnelles des armées et de la gendarmerie nationale, les impératifs de la défense et de la sécurité nationale, comme les intérêts fondamentaux de la Nation. Les travaux menés par la commission ad-hoc seront réalisés en concertation avec les hauts responsables civils et militaires, en particulier le chef d'état-major des armées et le directeur général de la gendarmerie nationale, et bénéficieront du concours des représentants et des services du Premier ministre, ainsi que des ministres de la défense et de l'intérieur. Ses conclusions devront être rendues au Président de la République le 15 décembre 2014.

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