Question de M. HUSSON Jean-François (Meurthe-et-Moselle - UMP) publiée le 23/01/2015

Question posée en séance publique le 22/01/2015

Concerne le thème : Réforme des rythmes scolaires

M. Jean-François Husson. Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, dans ces heures graves pour notre République, nous devons regarder les choses en face et examiner la réalité des faits avec une grande lucidité.

« C'est dans le gouvernement républicain que l'on a besoin de toute la puissance de l'éducation », disait Montesquieu. Oui, l'école est aujourd'hui en première ligne pour faire vivre notre République ! Oui, de nombreuses réponses sont d'abord éducatives !

Concernant la réforme des rythmes scolaires, nombreuses sont les questions que j'avais posées il y a un an à M. Peillon et qui sont restées sans réponse : était-ce bien le chantier prioritaire à ouvrir ? Pour quels résultats dépenser tant d'énergie et créer tant de perturbations ?

Contrairement à l'ambition affichée, cette réforme se révèle clairement source d'inégalités entre les territoires. Le fonds de soutien, désormais pérennisé - après un long combat -, n'est destiné qu'aux communes qui mettent en place des activités. Qu'avez-vous prévu pour les communes qui n'en ont pas les moyens matériels ou rencontrent de réelles difficultés pour ce faire ?

Le versement du fonds de soutien est subordonné à l'existence d'un projet éducatif de territoire. Ce document, dont je souligne l'intérêt et la valeur, peut néanmoins être extrêmement difficile à élaborer pour certaines communes : un accompagnement local est-il prévu, afin qu'elles ne soient pas pénalisées lors de la prochaine rentrée ?

Quelle importance donnerez-vous dans ces PEDT à l'apprentissage des valeurs qui fondent notre pacte républicain, je pense bien sûr à la laïcité, mais aussi au respect ou à la fraternité ? J'estime que cet apprentissage relève d'abord de la responsabilité de l'État et nous devons être collectivement plus exigeants, en permettant notamment aux enseignants d'être mieux formés pour réagir aux difficultés qu'ils rencontrent. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Enfin, et pour permettre de repartir du bon pied et de s'engager dans la bonne direction, il est nécessaire d'évaluer rigoureusement et objectivement cette réforme.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !

M. Jean-François Husson. Comment avez-vous prévu d'évaluer son entrée en vigueur ? Quel est son coût réel ? Quels financements comptez-vous mobiliser ? Quel est l'intérêt de la mise en place des activités périscolaires en maternelle ? Avez-vous analysé les raisons pour lesquelles certaines communes n'ont pas pu accéder à ces activités ? Enfin, quelle évaluation faites-vous des effets réels de cette réforme et quelles sont les améliorations constatées pour les enfants à la fin du primaire ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche publiée le 23/01/2015

Réponse apportée en séance publique le 22/01/2015

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, je ne reviens pas sur la pertinence de cette réforme, car elle est avérée. En effet, comme je l'ai expliqué, les premières étapes de l'évaluation ont montré un progrès dans l'acquisition des connaissances. Nous disposerons d'une évaluation complète d'ici au mois de juin, M. le Premier ministre en a pris l'engagement devant l'Association des maires de France.

Certains élus locaux - je l'ai bien noté et rien ne sert de le nier - craignent que la mise en place des projets éducatifs territoriaux ne soit parfois complexe. Le ministère de l'éducation nationale, ses services et ses partenaires ont donc consacré tous leurs efforts à la simplification de cet outil et, surtout, à son adaptation aux spécificités de chaque territoire.

Des outils d'accompagnement en ingénierie ont été mis en place, je l'ai dit, et un dispositif en ligne permettra de mettre à jour cinq ou six modèles différents, applicables selon certaines spécificités.

Ce qui différencie mon état d'esprit du vôtre, monsieur le sénateur, c'est que, moi, je fais confiance à l'intelligence collective des élus locaux !

Je sais qu'ils sont convaincus, surtout à la lueur des événements tragiques qui viennent de se dérouler, qu'il faut agir sur l'école, dans le temps périscolaire, auprès des enfants, pour que ceux-ci s'imprègnent davantage des principes républicains et de laïcité.

Je sais aussi qu'ils ont à cœur, loin de tout préjugé et de toute idéologie, que ce dispositif soit une réussite. En d'autres termes, monsieur le sénateur, ils ont envie que cela marche !

M. Jacques Grosperrin. Avec quels moyens ?

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Nos administrations veilleront à introduire dans ce dispositif toute la souplesse nécessaire, comme elles l'ont déjà fait, et à faire preuve de capacités d'adaptation pour que cette mise en œuvre soit possible sur l'ensemble des territoires, ruraux, urbains et périurbains.

S'agissant du suivi en ligne, « au fil de l'eau », nous avons mis en place dans les rectorats, avec les DASEN, un système permettant de collecter, au fur et à mesure, tous les éléments, lesquels seront ensuite analysés et diffusés d'ici au mois de juin.

J'ajouterai un mot sur la formation des enseignants.

M. le président. Très brièvement, madame la secrétaire d'État !

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Je comprends que vous souhaitiez que j'abrège mon propos, monsieur le président,...

M. le président. Je souhaite simplement que tous les orateurs puissent s'exprimer !

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. ... mais il me faut tout de même rappeler que la formation des enseignants, en termes tant de comportement, de contact avec les élèves que de professionnalisation, avait été largement réduite et très abîmée lors du quinquennat précédent.

Mme Françoise Cartron. Supprimée, même !

M. Dominique Bailly. Eh oui !

Mme Geneviève Fioraso, secrétaire d'État. Nous avons rétabli cette formation avec tout le soin et la pluralité nécessaires. Cette acquisition disciplinaire, et hors discipline, qui se fait par le contact avec les enfants et l'apprentissage de la citoyenneté, voilà ce que nous voulons transmettre aux enseignants dans les écoles supérieures du professorat et de l'éducation, les ESPE, que nous mettons en place aujourd'hui, avec des moyens supplémentaires et, surtout, dans un état d'esprit différent. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour une brève réplique !

M. Jean-François Husson. Madame la secrétaire d'État, je veux souligner, puisque vous parliez d'intelligence collective, l'implication des associations d'élus, que ce soit l'AMF autour de son président, notre collègue François Baroin, ou Villes de France, présidée par notre collègue Caroline Cayeux.

Il est vrai, cependant, que les élus ne voient pas toujours le lien entre la réforme dite « des rythmes scolaires » et le fait que quatre écoliers sur dix, à la fin du primaire, sortent sans acquis de qualité pour ce qui est des savoirs fondamentaux, ou que 150 000 jeunes sortent du système éducatif sans aucune qualification. C'est une première question importante !

Mme Françoise Cartron. Il faut davantage d'écoles !

M. Jean-François Husson. La deuxième est tout aussi importante : aujourd'hui, la conception de l'éducation en tant que mission partagée s'affirme progressivement. Pourtant, la décentralisation éducative est marquée par un partage de compétences qui ne nous paraît pas d'une évidente clarté.

Enfin, madame la secrétaire d'État, ne gâchons pas ensemble l'énergie de la chaîne éducative ! Car le ministère de Mme Vallaud-Belkacem, que j'aurais eu plaisir à accueillir aujourd'hui, est d'abord, et peut-être surtout, celui de l'instruction publique !

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