Question de M. LEFÈVRE Antoine (Aisne - UMP) publiée le 22/01/2015

M. Antoine Lefèvre attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur le faible nombre d'imams dans les prisons françaises, alors même que quasiment la moitié des détenus serait de religion musulmane. Ces aumôniers, formés aux principes civiques et citoyens qui sont ceux de l'islam de France, sont le premier rempart contre les éléments radicaux ou fondamentalistes qui y font prosélytisme d'un islam djihadiste.
Volontaires et bénévoles, ne bénéficiant que d'un défraiement kilométrique, les aumôniers en milieu carcéral ne bénéficient pas d'un statut qui permettrait un meilleur et plus grand recrutement. Ainsi les autorités religieuses ont-elles des difficultés à recruter des volontaires. Selon celles-ci, ceux qui acceptent sont généralement en recherche d'emploi, et dès l'instant où ils remarquent que l'octroi d'indemnités de déplacement leur retire le bénéfice de la couverture maladie universelle (CMU) ou d'autres prestations, ils renoncent à cette fonction.
Les surveillants sont alors désarmés face aux attitudes individuelles d'activités ou de replis intégristes religieux, dont sont victimes certains de ces détenus ne pouvant avoir accès à un imam.
Alors que les ministères de la justice et de l'intérieur avaient annoncé « préparer une série de mesures ambitieuses destinées à renforcer l'action des services de renseignement pénitentiaire, à améliorer le recrutement et la formation des aumôniers, notamment musulmans », il demande, d'une part, où en est la « rédaction, conjointe aux ministères de la justice et de l'intérieur, à l'aumônerie nationale et au conseil français du culte musulman (CFCM), de la charte relative au rôle et au fonctionnement de l'aumônerie musulmane », d'autre part, si, dans le prolongement, une réflexion sur l'élaboration d'un statut des aumôniers des prisons est envisagée.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 07/01/2016

La lutte contre la propagation des comportements radicaux à dimension religieuse dans les établissements pénitentiaires demeure une priorité du Gouvernement.  La présence régulière d'aumôniers agréés et formés est le premier rempart contre de possibles dérives radicales. Le culte musulman est désormais le deuxième culte pour lequel des aumôniers sont pris en charge par l'administration pénitentiaire, après le culte catholique et devant le culte protestant.  Cette situation est le résultat d'une démarche volontariste de la part de la garde des sceaux, ministre de la justice, qui a décidé de revaloriser le budget de l'aumônerie musulmane des prisons. Cette décision s'est traduite par une augmentation de la dotation allouée à cette aumônerie de 145 050 €/an (budget correspondant à 15 ETP) sur la période 2013-2014, portant celle-ci à 629 962 € en 2015. Par ailleurs, les 60 recrutements annoncés par le Gouvernement dans le cadre du plan de lutte contre le terrorisme se formaliseront dès cette année par l'intervention d'aumôniers dans des établissements qui en étaient jusqu'à présent dépourvus. Afin de mobiliser ces crédits supplémentaires de façon efficiente, la direction de l'administration pénitentiaire et l'aumônerie musulmane des prisons procèdent actuellement à une analyse croisée des sites prioritaires pour l'agrément de nouveaux aumôniers ou le renforcement de l'existant.  En début d'année 2015, l'aumônerie musulmane compte ainsi 182 intervenants d'aumônerie, selon la répartition suivante : 129 aumôniers indemnisés ; 49 aumôniers bénévoles ; 4 auxiliaires bénévoles d'aumônerie.  En outre, le ministère de la justice est conscient de la nécessité d'engager une réflexion sur le statut et le mode d'indemnisation des aumôniers de prison. En effet, les difficultés posées par le cumul entre l'indemnité versée par l'administration pénitentiaire et certaines prestations sociales ou encore l'absence de cotisations maladie et retraite, sont de nature à freiner le recrutement de nouveaux aumôniers alors que l'aumônerie musulmane nécessite d'être déployée ou renforcée sur un certain nombre de sites.  Enfin, considérant qu'il n'appartient pas à l'État de s'immiscer dans les modalités de fonctionnement interne des aumôneries alors qu'il lui appartient, en revanche, de fixer le cadre d'exercice de la vie cultuelle au sein des établissements pénitentiaires, la direction de l'administration pénitentiaire a rédigé une note, en date du 16 juillet 2014, relative à la pratique du culte en détention, qui fournit des repères utiles aussi bien aux aumôniers qu'aux personnels pénitentiaires, dans le respect du principe de laïcité. Au-delà de la présence des aumôniers, la lutte contre la radicalisation en établissements pénitentiaire passe par une série de mesures et dispositifs, largement initiés avant l'adoption du plan de lutte anti-terroriste, qui leur a donné une nouvelle ampleur. Il en est ainsi du renseignement pénitentiaire qui sera renforcé par des recrutements complémentaires à tous les échelons hiérarchiques, de la formation des personnels de toutes catégories, des recherches actions aux fins de prise en charge des publics radicalisés ou en voie de radicalisation, ou du développement des activités culturelles destinées notamment à diffuser un islam éclairé en contre point du message propagé par les personnes détenues prosélytes. La détermination de la garde des sceaux à lutter contre la radicalisation pouvant conduire au terrorisme, est sans faille. 

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