Question de M. BAILLY Gérard (Jura - UMP) publiée le 28/05/2015

M. Gérard Bailly appelle l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur les attaques de loups, et plus précisément sur la recrudescence de ces attaques, le dommage considérable qu'elles causent au pastoralisme français en décourageant les éleveurs principalement d'ovins, et le danger que cela représente aussi pour les hommes, certaines attaques ayant eu lieu aux pieds même des habitations.
Le bilan officiel 2014 de la prédation par les loups fait état de plus de 9 000 bêtes attaquées et de 8 200 bêtes indemnisées, soit un bilan en augmentation par rapport à l'année 2013.
Au vu des informations dont il dispose, il semblerait que chaque année, les meutes s'agrandissent et étendent leurs territoires de prédation à des espaces ruraux de plus en plus vastes. Il en résulte, d'une part, que l'activité pastorale est clairement mise en danger en France du fait de la protection rigoureuse dont bénéficie le loup, d'autre part, que les loups s'approchent désormais dangereusement des habitations constituant donc un vrai danger pour l'homme. À cet égard, il attire son attention sur un article paru début mai 2015, dans un hebdomadaire, dans lequel il est indiqué qu'une meute de loups, accompagnée de ses petits, était entrée dans Roquebillière, bourg de 1 752 habitants, dans la nuit du 13 au 14 avril, pour y égorger vingt et une brebis parquées juste à côté du bourg. Selon l'éleveur, les loups étaient très certainement venus apprendre à chasser à leurs petits, vingt et une brebis ayant été égorgées mais aucune dévorée ! Deux jours plus tard, un loup, solitaire cette fois, frappait à Pélasque, hameau situé à 10 kms de Roquebillière. Bref, des loups ont pénétré dans des lieux d'habitations sans en être inquiétés, et l'on ne peut que redouter la répétition de ces types d'attaques et les drames qu'elles sont susceptibles d'occasionner.
Aujourd'hui en France, le nombre de loups est supérieur à 300, il devrait être de 700 en 2017, ce qui représente une augmentation considérable de cette espèce de prédateurs. La gestion de la population de loups fait l'objet d'un plan d'action national 2013-2017. Le statut actuel du loup pose une série d'interdictions comme celles de capturer l'animal, de le mettre à mort, de détériorer ses sites de reproduction et aires de repos. Le plan autorise cependant de tuer, sous certaines conditions limitatives et après une autorisation préfectorale, un certain nombre d'individus par an. En réponse à une question orale posée au Sénat le 31 mars 2014 (Journal officiel des débats du Sénat, 1er avril 2015, p. 2978), il avait été indiqué que « ce cadre national lui-même (devait) pouvoir évoluer en fonction des enseignements tirés du terrain » et qu'une révision des arrêtés de destruction de loups était souhaitée « afin de faciliter les interventions sur le loup chaque fois que nécessaire ». Il se réjouit de cette prise de conscience gouvernementale de la réalité du terrain mais elle lui semble néanmoins bien insuffisante au regard des dangers actuels.
Le rapport sénatorial d'information n° 384 (2013-2014) du 19 février 2014, intitulé « Patrimoine naturel de la montagne : concilier protection et développement », préconisait d'apporter une réponse pragmatique à l'augmentation des attaques de loups et à la désespérance des éleveurs, en rétrogradant ce prédateur du statut d'espèce strictement protégé à celui d'espèce protégée simple.

Il la remercie de bien vouloir lui donner son sentiment sur cette proposition en lui précisant si elle entend l'adopter, et à défaut lui indiquer les dispositions qu'elle entend prendre pour assurer la protection des troupeaux et des hommes, premières espèces à protéger !

- page 1219

Transmise au Ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargé des relations internationales sur le climat


Réponse du Ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargé des relations internationales sur le climat publiée le 06/10/2016

La ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, est très sensible à la conciliation entre présence de l'espèce et maintien d'activités économiques importantes telles que l'élevage (notamment ovin, qui subit le plus la prédation du loup). Le loup fait l'objet d'une protection au niveau international, au sens de la Convention de Berne et au sens de la directive 92/43/CEE dite « Habitat Faune Flore » où il est classé « prioritaire d'intérêt communautaire » en annexe II et IV. Dans le droit national, ces dispositions sont transcrites dans le code de l'environnement aux articles L. 411-1, L. 411-2 et R. 411-1 à R. 411 5 et par l'arrêté du 23 avril 2007 fixant la liste des mammifères protégés sur l'ensemble du territoire et les modalités de leur protection. Des mesures dérogatoires à l'interdiction de destruction du loup peuvent être accordées. Néanmoins, elles doivent se conformer à l'arrêté du 30 juin 2015 (publié au Journal officiel de la République Française le 2 juillet 2015) fixant les conditions et les limites dans lesquelles des dérogations aux interdictions de destruction peuvent être accordées par les préfets concernant le loup (Canis lupus). Conformément à l'article 16 de la directive CEE 92/43, elles ne peuvent intervenir qu'à la condition qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante, qu'il existe un réel intérêt à agir et qu'elles ne nuisent pas au maintien de l'espèce dans un état de conservation favorable. S'ajoutent à ces mesures des aides à la mise en place de mesures de protection des troupeaux domestiques, prévues par le plan d'action national loup pour la période 2013-2017 (pour un total de 12,2 M€ en 2014). Il existe également un dispositif d'indemnisation des dommages liés aux attaques de loups sur les troupeaux (2,62 M€ y ont été consacrés en 2014). Ces différentes mesures visent à soutenir l'activité pastorale et à lui permettre de faire face aux difficultés pouvant découler de la présence de loups sur leurs zones d'activité. En ce qui concerne les risques pour la sécurité des habitants de zones proches d'attaques de loups, il doit être rappelé qu'aucune manifestation d'agressivité de loup vis-à-vis de l'homme n'a été recensée en France depuis le retour de l'espèce sur notre territoire. De plus, une étude internationale conduite sur le sujet au début des années 2000 a dressé les mêmes conclusions à l'échelle de l'Europe et de l'Amérique du Nord (régions où le loup est parfois présent de manière continue depuis des décennies) concernant les vingt dernières années. Cette étude identifie les circonstances qui, dans d'autres parties du monde ou à d'autres époques, ont pu favoriser les interactions agressives entre le loup et l'homme. Certaines circonstances majeures telles que la rage ou l'absence de proies sauvages ne sont pas réunies aujourd'hui en France. Les deux attaques à proximité d'habitations auxquelles il est fait référence (Roquebilière et Pélasque) n'ont pas eu lieu en présence directe de personnes, se déroulant de nuit. Les moyens de protection mis en place (tels les tirs de défense) visant à éloigner les loups des troupeaux domestiques concourent également à les éloigner des habitations. Enfin, concernant les interrogations sur le changement de statut du loup, d'une protection stricte à une protection moins contraignante, la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, a adressé un courrier, le 27 juillet 2015, à la Commission européenne et à la Convention de Berne concernant ce déclassement. Il apparaît que le changement de statut de protection du loup, selon les annexes de la directive Habitats Faune Flore, puisse être examiné dans le cadre des suites qui seront données au bilan des directives en faveur de la nature actuellement en cours, sans qu'il ne soit nécessaire de réviser les dispositions principales de la directive.

- page 4295

Page mise à jour le