Question de M. DUFAUT Alain (Vaucluse - Les Républicains) publiée le 12/11/2015

M. Alain Dufaut attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur les solutions à apporter à la surpopulation carcérale, notamment en ce qui concerne les faibles peines d'emprisonnement.

Au 1er septembre 2015, la France comptait 65 544 détenus pour une capacité réelle de 57 810 places de prison, soit un taux d'occupation de 113,3 % d'après les chiffres du ministère de la justice.

Or la construction de nouvelles prisons, si elle peut être une piste, générerait des frais d'investissement et de fonctionnement particulièrement lourds et incompatibles avec la situation budgétaire actuelle. D'autres solutions peuvent néanmoins être explorées.

Donner la possibilité à de jeunes condamnés à des peines d'emprisonnement de courte durée d'opter entre l'incarcération ou un engagement au sein de la légion étrangère pourrait permettre de remédier, au moins partiellement, à cette situation. L'engagement initial au sein de la légion, qui est de cinq ans au minimum, correspondrait ainsi à la peine encourue. Le salaire de départ pourrait quant à lui être réduit le temps de la condamnation.

En conséquence, il souhaiterait connaître la position du Gouvernement sur le sujet et, à défaut, il lui demande quelles mesures elle envisage de prendre afin de remédier à la surpopulation carcérale dans notre pays.

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Transmise au Ministère de la justice


Réponse du Ministère de la justice publiée le 08/09/2016

La mise en place d'une politique volontariste de développement des mesures de sortie accompagnée et le développement des mesures alternatives à l'incarcération sont de nature à influer sur la situation des établissements pénitentiaires et par conséquent sur la surpopulation carcérale.  Les mesures alternatives à l'incarcération sont nombreuses, ce qui permet aux juridictions de diversifier leur réponse pénale et également d'individualiser les peines au regard de la situation et de la personnalité de la personne condamnée. Ainsi, peuvent être prononcés un travail d'intérêt général (TIG), un sursis assorti de l'obligation d'accomplir un TIG, des jours-amende, une sanction réparation, un ajournement avec mise à l'épreuve, un sursis avec mise à l'épreuve (SME) ou encore les peines privatives ou restrictives de droit prévues par l'article 131-6 du code pénal.  En outre, la contrainte pénale, mise en application depuis le 1er octobre 2014, s'ajoute aux autres peines et mesures de milieu ouvert. Elle a pour ambition de constituer une alternative particulièrement étayée et crédible à l'incarcération pour un public nécessitant un suivi soutenu et des modalités de prise en charge spécifiques. La contrainte pénale a vocation à être prononcée à la place des courtes peines d'emprisonnement grâce au caractère contraignant du suivi qu'elle instaure.  S'agissant des mesures de sortie accompagnées, la loi du 15 août 2014 relative à l'individualisation des peines et renforçant l'efficacité des sanctions pénales poursuit la dynamique engagée avec la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 en rappelant la nécessité d'assortir, autant qu'il est possible, l'exécution des fins de peine d'emprisonnement d'une phase de retour progressif à la liberté, dans l'objectif de préparer l'insertion ou la réinsertion de la personne condamnée et de prévenir la commission de nouvelles infractions.  Les aménagements de peine sont des mesures d'individualisation des peines d'emprisonnement qui, en assurant les conditions d'un projet d'insertion ou de réinsertion ainsi que le contrôle des obligations fixées à la personne, concourent activement à la lutte contre la récidive.  Aux côtés des aménagements de peine, la loi du 15 août 2014 a créé une mesure spécifique de sortie anticipée, dénommée « libération sous contrainte », permettant un retour à la liberté encadré selon des modalités de contrôle et d'accompagnement individualisées, s'adressant plus particulièrement aux personnes condamnées à de courtes peines, dans l'objectif de lutter contre la récidive. La politique volontariste d'aménagement de peine ne se limite pas aux personnes détenues et vise également les personnes libres, via la procédure de l'article 723-15 du code de procédure pénale, permettant aux personnes condamnées à une peine d'emprisonnement n'excédant pas deux ans (un an en cas de récidive légale) et si leur personnalité et leur situation le permettent, d'obtenir un aménagement de peine. La semi-liberté, le placement à l'extérieur et le placement sous surveillance électronique peuvent également être accordés « ab initio » par la juridiction prononçant la peine. L'engagement dans la Légion étrangère semble difficilement conciliable avec toute mesure d'aménagement de peine. En effet, la personne condamnée doit respecter les obligations générales de l'article 132-44 du code pénal et, le cas échéant, les obligations spéciales prononcées sur le fondement de l'article 132-45 du code pénal (répondre aux convocations du service pénitentiaire d'insertion et de probation et du juge d'application des peines, se soumettre à une obligation de soins,…). Les obligations et mesures de contrôle apparaissent très peu compatibles avec un engagement dans cette arme.  Enfin, le statut de légionnaire ne semble pas conciliable avec la concomitance d'une peine de prison en cours, c'est-à-dire une situation pénale non purgée.

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