Question de Mme DOINEAU Élisabeth (Mayenne - UDI-UC) publiée le 03/12/2015

Mme Élisabeth Doineau attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire sur l'opportunité de reconnaître un statut de personne morale non professionnelle pour les associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association.

La loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, transposant la directive européenne 83/2011/UE, définit le consommateur uniquement comme une personne physique. Toute personne non physique est jugée professionnelle et ne peut donc prétendre à la protection particulière qu'offre le droit de la consommation.

Or, les associations se trouvent à un stade intermédiaire. Elles ne sont ni des personnes physiques ni des personnes morales professionnelles.

Ainsi, il convient de trouver une voie juridique qui sécurise les associations dans leur action de consommation et qui leur ouvre l'accès à une grille tarifaire adaptée aux non professionnels.

Elle lui demande de bien vouloir lui indiquer si le Gouvernement compte créer un statut protecteur pour ces non professionnels à travers la reconnaissance des personnes morales non professionnelles.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargé du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire publiée le 11/05/2016

Réponse apportée en séance publique le 10/05/2016

Mme Élisabeth Doineau. Madame la secrétaire d'État, j'attire votre attention sur le cadre juridique incertain applicable aux associations, notamment aux associations à but non lucratif qui assurent un service public par délégation.

La loi du 17 mars 2014 relative à la consommation, qui transpose la directive européenne ad hoc, définit les consommateurs uniquement comme des personnes physiques qui utilisent des biens ou des services pour un usage privé.

En vertu du principe de la primauté du droit européen sur le droit interne, nous devons appliquer la définition retenue dans la directive. Or, d'après celle-ci, toute personne non physique est a priori professionnelle et ne peut donc pas prétendre à la protection particulière qu'offre le droit de la consommation. Le droit européen ne prend donc absolument pas en compte l'existence des associations, qui sont pourtant extrêmement nombreuses.

Celles-ci pourraient être assimilées à des personnes morales non professionnelles, mais cette dernière notion n'est pas définie par les textes ; il s'agit d'une création prétorienne.

Le code de la consommation français, lui, considère les associations comme des personnes morales professionnelles.

Il se trouve que les associations se situent à un stade intermédiaire : elles ne sont ni des personnes physiques ni des personnes morales professionnelles.

Cette situation, outre qu'elle les prive d'une protection juridique satisfaisante, oblige les associations à effectuer des achats aux tarifs applicables aux professionnels, ce qui les pénalise dans leur action de service public par délégation.

À ce jour, la situation des non-professionnels n'est toujours pas stabilisée. Dans ce dossier, il semble primordial de mettre l'accent sur les associations, qui sont totalement transparentes dans le paysage consumériste.

Il convient de trouver une solution pour offrir aux associations une protection juridique convenable et un accès à une grille tarifaire adaptée aux non-professionnels.

Le Gouvernement compte-t-il légiférer en ce sens et proposer aux associations une meilleure protection juridique, grâce à la création d'un statut de personne morale non professionnelle ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Martine Pinville, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire. Madame la sénatrice, le non-professionnel est la personne morale n'agissant pas à des fins professionnelles, c'est-à-dire située hors du champ d'une activité artisanale, industrielle, commerciale, libérale ou agricole.

Cette définition, qui ne permet pas de distinguer le statut juridique de la personne morale selon qu'il s'agisse d'une société civile ou commerciale, d'une association ou d'une autre structure, sera inscrite à l'article liminaire du code de la consommation le 1er juillet prochain, date d'entrée en vigueur de la recodification de ce code. Cependant, la notion fait l'objet d'une jurisprudence de la Cour de cassation depuis maintenant plus de dix ans.

Le droit de la consommation a vocation avant tout à protéger les personnes physiques - nos concitoyens - dans leur vie économique quotidienne. Il vise à remédier au déséquilibre constaté dans la relation économique que nouent le consommateur et le professionnel.

Néanmoins, le législateur a souhaité que certaines protections s'appliquent aux non-professionnels, par exemple en matière de contrats de communications électroniques, de contrats tacitement reconductibles ou encore de clauses abusives. Les associations sont des personnes morales, généralement non professionnelles, qui peuvent bénéficier de ces protections.

Enfin, dans le cas particulier des contrats conclus par voie de démarchage, les TPE ou les entreprises individuelles bénéficient également des règles protégeant les intérêts des consommateurs en ce domaine, dès lors qu'il s'agit de l'achat de produits et de services qui ne sont pas liés à l'activité de l'entreprise. En effet, ces entreprises se trouvent parfois, lorsque l'objet de l'achat n'a pas de lien direct avec leur activité principale, dans la même situation qu'un consommateur à l'égard d'un professionnel.

Très concrètement, aux termes de la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation, le droit à rétractation dans le cadre d'une vente par démarchage a été étendu aux TPE de moins de cinq salariés. Cette disposition a fait écho à la situation rencontrée par de petites entreprises, qui s'étaient retrouvées dans l'impossibilité de résilier certains contrats, dont elles n'avaient pas mesuré la portée ou avaient surestimé l'utilité, relatifs notamment à des référencements dans des annuaires professionnels ou à l'installation d'un portail internet, services qui s'étaient révélés parfaitement inutiles ou trop coûteux.

Soyez-en assurée, madame la sénatrice, les services de l'État, en particulier la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, ou DGCCRF, qui peut être saisie par les directions départementales chargées de la protection des populations, sont particulièrement mobilisés pour protéger ces non-professionnels et sanctionner les abus dont ils peuvent parfois être les victimes.

M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau.

Mme Élisabeth Doineau. Madame la secrétaire d'État, mon intervention se fondait surtout sur la situation des associations intervenant dans le domaine sportif, notamment sur le plan assurantiel.

En raison d'un vide juridique, ces structures ne sont pas considérées comme des personnes morales à part entière, compte tenu de la délégation de service public qui leur a été confiée. Surtout, elles ne bénéficient pas de tarifs professionnels, notamment pour l'électricité ou le téléphone.

Ainsi, ces associations sportives - c'est aussi vrai d'autres associations - doivent subir la concurrence déloyale des autres acteurs concernés par le service public dont elles ont la charge, précisément parce qu'elles ne sont pas considérées comme des personnes morales non professionnelles.

Je vous remercie d'être particulièrement attentive à cette dimension du sujet.

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