Question de M. DÉTRAIGNE Yves (Marne - UDI-UC) publiée le 03/03/2016

M. Yves Détraigne appelle l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur l'inquiétant désintérêt qui règne autour de la borréliose de Lyme.
Dans une récente interview, le professeur Christian Perronne, chef de service en infectiologie à l'hôpital universitaire Raymond-Poincaré de Garches et à la tête de la commission des maladies transmissibles au Haut Conseil de la santé publique (HCSP), dresse un panorama peu glorieux : bien que la maladie de Lyme ait été officiellement reconnue comme zoonose prioritaire, les préconisations du Haut conseil ne sont toujours pas suivies, le nombre de malades non traités ne cesse d'augmenter et ceux-ci se tournent donc de plus en plus vers d'autres pays pour se soigner, comme l'Allemagne – où les médecins sont plus libres dans la prescription d'antibiotiques – et où sont autorisés des tests un peu plus sensibles.
Ce professeur explique que très peu de médecins sont formés à cette maladie – à l'exception de ceux exerçant dans des zones où les maladies à tiques sont courantes – et qu'il est malheureusement facile de passer à côté du diagnostic réel de l'infection qui, non traitée, va se propager et provoquer des dégâts profonds. La vie des malades relève alors d'un véritable « parcours du combattant ».
À cela s'ajoute en outre un manque de fiabilité des tests de dépistage. Le HCSP a réalisé un état des lieux des connaissances sur la maladie de Lyme, en décembre 2014, et a relevé les limites des tests sérologiques en la matière. Il devient urgent de mettre au point des tests fiables. Plus la maladie est dépistée tôt, plus on a de chances de la vaincre avec des antibiotiques.
Le président du HCSP précise aussi que les recommandations en vigueur à ce jour en France pour soigner cette maladie datent de 2006 et ne sont plus adaptées. Les traitements antibiotiques préconisés sont bien en deçà, tant en quantité qu'en durée, de ce qu'il faut pour stopper la maladie de Lyme. Il faut donc revoir ces recommandations ainsi que la manière dont est prise en charge la maladie par la caisse primaire d'assurance maladie.
Nombre de parlementaires ont déjà interpellé le ministère de la santé afin que notre pays revoie sa manière d'appréhender cette pathologie. Le professeur Perronne conclut l'interview en précisant la feuille de route à suivre (tests à améliorer, traitements à redéfinir, co-infections à identifier…) et souligne que la recherche doit également élucider la question de la transmission inter-humaine, certains spécialistes de Lyme faisant en effet état de possible transmission de la bactérie par voies sexuelle et materno-fœtale.
En réponse à la question écrite n° 19276 publiée dans le JO Sénat du 10/12/2015, le ministère indique que « le projet de loi de modernisation de notre système de santé, adopté par l'Assemblée nationale le 17 décembre 2015, prévoit la déclinaison, dans les projets régionaux de santé, d'un volet consacré à la mise en œuvre d'actions de sensibilisation de la population et de formation des professionnels de santé visant à limiter d'éventuelles contaminations par des maladies vectorielles ». Toutefois l'article 158 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé reste assez limité puisque cette déclinaison est facultative et, de fait, variable d'une région à une autre.
Considérant qu'il s'agit d'une véritable question de santé publique, il lui demande si elle entend suivre les recommandations du HCSP et quelles mesures elle envisage de mettre en œuvre de façon rapide pour lutter contre l'expansion de la maladie et répondre au besoin de prise en charge et de reconnaissance des malades.

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Réponse du Ministère des affaires sociales et de la santé publiée le 14/07/2016

Dans le prolongement de la publication, en 2014, du rapport du haut conseil de la santé publique (HCSP) sur la Borréliose de Lyme, une réflexion a été engagée par un groupe d'experts, médecins infectiologues et biologistes, sous l'égide de la direction générale de la santé, pour définir des repères pratiques à l'attention des professionnels de santé sur cette maladie infectieuse et sa prise en charge. Ces documents ont été validés par les sociétés savantes et sont en ligne sur le site de la DGS et de certaines sociétés savantes, dont celle de microbiologie et celle de rhumatologie. Une publication, reprenant les informations les plus utiles pour la pratique et destinée aux professionnels de premiers recours (médecins généralistes, pharmaciens, sages-femmes) est en cours de préparation par l'institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES). Ces documents seront envoyés sur format papier à plus de 100 000 professionnels, dans les semaines à venir, en prévision de l'été 2016. Enfin, pour renforcer l'information de la population sur les mesures de protection permettant de limiter le risque de morsures de tiques, un document d'information est également en cours de rédaction par l'INPES. Parallèlement, la direction générale de la santé a saisi plusieurs instances, notamment l'institut de veille sanitaire (InVS) pour une analyse des pistes d'amélioration de la surveillance, incluant l'opportunité d'une déclaration obligatoire, et l'Alliance des sciences du vivant (Aviesan) sur les axes prioritaires de recherche identifiés dans le cadre des travaux engagés. Les résultats de la saisine d'Aviesan concernant les thèmes de recherche prioritaires seront disponibles avant la fin de premier semestre 2016. L'InVS a par ailleurs estimé que les systèmes actuellement en place en France permettent de répondre aux objectifs de surveillance de la Borréliose de Lyme. L'InVS indique que « les données obtenues sont cohérentes entre les différents systèmes et indiquent une stabilité de ces indicateurs dans le temps ainsi qu'une diversité régionale importante ». Il précise que certaines caractéristiques de la maladie rendent difficile la mise en œuvre d'une déclaration obligatoire. L'InVS rappelle que, depuis 2010, des réflexions sont en cours sur la pertinence et la faisabilité d'une surveillance européenne et les experts réunis par l'European centre for disease prevention and control (ECDC) ont conclu qu'une surveillance européenne par déclaration obligatoire ne serait ni faisable ni pertinente. Des travaux encore en cours (2015-2019) évaluent l'efficacité du recueil de données dans 5 pays afin de formuler des recommandations pour la surveillance des maladies transmises par les tiques et non couvertes par la déclaration obligatoire. Concernant le diagnostic, à la suite de la saisine de la direction générale de la santé relative à la performance des tests sérologiques de la Borréliose de Lyme et dans le cadre du contrôle national de qualité des analyses de biologie médicale, l'agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a évalué les résultats des sérologies de Lyme en fonction de plusieurs réactifs. Cette opération de contrôle des sérologies de la Borréliose a montré les bonnes performances des réactifs de dépistage utilisés en routine sur l'ensemble du territoire. Elle a, en revanche, mis en évidence la nécessité d'améliorer l'information des biologistes sur l'interprétation des résultats de dépistage en fonction de la clinique et des données épidémiologiques. Une formation des médecins biologistes a été assurée le 3 novembre 2015 par la Société française de microbiologie (SFM). Les informations sont accessibles aux biologistes sur le site internet de la SFM. Enfin, la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé prévoit la déclinaison, dans les projets régionaux de santé, d'un volet consacré à la mise en œuvre d'actions de sensibilisation de la population et de formation des professionnels de santé visant à limiter d'éventuelles contaminations par des maladies vectorielles.

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