Question de Mme MICOULEAU Brigitte (Haute-Garonne - Les Républicains) publiée le 02/06/2016

Mme Brigitte Micouleau attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur le manque annoncé de médecins généralistes dans la grande agglomération toulousaine.

Une étude sur la démographie médicale réalisée en avril 2016 par le conseil départemental de l'ordre des médecins de Haute-Garonne en partenariat avec l'agence régionale de santé (ARS), l'union régionale des professionnels de santé (URPS) et la faculté de médecine de Toulouse, vient de démontrer, chiffres à l'appui, que le manque de généralistes ne concerne plus uniquement les zones rurales, déjà fortement touchées, mais également, et de manière inquiétante, l'aire urbaine de Toulouse.

Tandis qu'entre 2007 et 2015, le nombre de généralistes a baissé de 15 % dans l'agglomération toulousaine, l'enquête montre que plus de 300 généralistes installés dans cette zone sont à dix ans, tout au plus, d'un arrêt de leur activité.

Si rien n'est fait d'ici là, l'ARS estime qu'il manquera alors plus de 200 médecins généralistes à Toulouse et dans son agglomération.

Déjà, le président du conseil départemental de l'ordre des médecins de Haute-Garonne témoigne du fait qu'il reçoit « tous les jours des appels au secours de médecins ne trouvant pas de successeur et toutes les semaines des courriers de patients qui ne trouvent pas de médecin traitant ».

Tous les quartiers de l'agglomération sont concernés par cette situation, aussi bien les quartiers dits sensibles souffrant d'une certaine insécurité que le centre ville où les prix de l'immobilier flambent. Mais les causes de cette pénurie future ne se limitent pas à des questions inhérentes aux quartiers.

Il semble également que les jeunes médecins soient de moins en moins enclins à s'installer en raison d'une fibre libérale et entrepreneuriale insuffisamment encouragée et de réglementations trop complexes.

Aussi, face à ce constat inquiétant qui, au-delà de l'agglomération toulousaine, concerne également d'autres aires urbaines de notre pays, elle lui demande quelles mesures le Gouvernement compte prendre pour éviter ce manque de médecins généralistes à venir en milieu urbain, mais, hélas, déjà bien réel dans le monde rural.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales et de la santé, chargé des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion publiée le 16/11/2016

Réponse apportée en séance publique le 15/11/2016

Mme Brigitte Micouleau. Une étude sur la démographie médicale réalisée en avril 2016 par le conseil départemental de l'Ordre des médecins de la Haute-Garonne, en partenariat avec l'agence régionale de santé, l'union régionale des professionnels de santé et la faculté de médecine de Toulouse, vient de démontrer, chiffres à l'appui, que le manque de médecins généralistes ne concerne plus uniquement les zones rurales, mais touche également, et de manière inquiétante, les aires urbaines, en particulier celle de Toulouse.

Alors que le nombre de médecins généralistes a diminué de 15 % dans l'agglomération toulousaine entre 2007 et 2015, cette enquête nous apprend que près des deux tiers de ceux qui sont actuellement en poste sont aujourd'hui âgés de 55 ans ou plus.

Au cours des dix prochaines années, ce sont donc plus de 300 généralistes qui vont cesser leur activité. Cela signifie que, si rien n'est fait d'ici là, il manquera alors plus de 200 médecins généralistes dans l'agglomération toulousaine.

Aujourd'hui, le président du conseil départemental de l'Ordre des médecins reconnaît qu'il reçoit déjà « tous les jours des appels au secours de médecins ne trouvant pas de successeur et, toutes les semaines, des courriers de patients ne trouvant pas de médecins traitants ».

Par ailleurs, depuis septembre, le quartier de Borderouge, l'un des plus dynamiques de Toulouse sur le plan démographique, ne compte plus qu'un seul généraliste pour 25 000 habitants !

Les causes de cette pénurie sont multiples : flambée des prix de l'immobilier, poids de la réglementation, crainte de s'installer dans des quartiers dits « sensibles », mais aussi fibre libérale insuffisamment encouragée, voire découragée, et trop faible prise en compte par nos politiques publiques des évolutions du corps médical. L'époque où un généraliste s'installait pour toute sa carrière, à temps plein, dans le même quartier, est bel et bien révolue ! Les temps partiels sont de plus en plus fréquents, de même que les changements d'orientation en cours de carrière, notamment vers le salariat.

Eu égard à ce constat inquiétant, comment comptez-vous inverser la tendance et lutter efficacement contre le phénomène de la désertification médicale ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Madame la sénatrice, je vous demande de bien vouloir excuser l'absence de Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé.

Il n'existe pas une réponse unique qui permettrait de résoudre tous les problèmes en matière de désertification médicale de certains territoires, mais améliorer l'accès aux soins et réduire les inégalités entre les territoires sont des objectifs prioritaires du Gouvernement depuis 2012, date à laquelle Marisol Touraine a lancé le pacte territoire-santé.

Ce pacte reflète le choix d'une politique pragmatique et incitative, fondée sur des mesures qui se complètent et se renforcent mutuellement, allant de la formation des professionnels aux conditions d'exercice.

Ainsi, plus de 1 750 jeunes ont signé un contrat d'engagement de service public. Ce contrat s'adresse à de futurs médecins ou dentistes en formation : il leur permet de bénéficier d'une bourse en contrepartie d'une installation dans un territoire manquant de professionnels pour une durée équivalente à celle de l'aide.

Par ailleurs, plus de 660 professionnels se sont installés dans des territoires manquant de médecins, grâce au contrat de praticien territorial de médecine générale.

En parallèle, la convention médicale prévoit désormais une aide de 50 000 euros pour une installation en zone sous-dense.

Enfin, plus de 830 maisons de santé pluriprofessionnelles maillent désormais le territoire : leur nombre a plus que triplé depuis 2012. Vous avez raison, madame la sénatrice : un certain nombre de médecins souhaitent changer de façon d'exercer et ne veulent pas se trouver isolés. Les maisons de santé pluriprofessionnelles constituent une solution qui plaît à beaucoup de professionnels.

Autre exemple de cette dynamique, la ville de Toulouse va ouvrir l'année prochaine une maison de santé pluriprofessionnelle universitaire, qui sera composée, entre autres professionnels, d'un professeur universitaire de médecine générale et de deux chefs de cliniques universitaires.

Les maisons de santé universitaires constitueront un véritable pivot de la faculté de médecine au cœur des territoires, puisqu'elles sont à la fois un centre de formation des étudiants de la deuxième à la neuvième année, pendant l'externat et pendant l'internat, et un moteur de la recherche universitaire en soins ambulatoires.

Je tiens à rappeler que les zones d'intervention en vue de l'amélioration de l'accès aux soins médicaux ne se limitent pas aux territoires ruraux. Que ces aides soient conventionnelles ou issues du pacte territoire-santé, un jeune médecin qui souhaite s'installer dans un territoire, rural ou urbain, peut en bénéficier dès lors qu'il s'agit d'une zone d'intervention ciblée par l'agence régionale de santé.

Madame la sénatrice, il ne peut y avoir une réponse unique pour remédier aux difficultés en matière d'accès aux soins. Le pacte territoire-santé et, désormais, la convention médicale permettent d'apporter des solutions adaptées dans chaque territoire.

Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Micouleau.

Mme Brigitte Micouleau. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de cette réponse. C'est un bon début, mais nous devons aller plus loin pour aider les maires ruraux ou de grandes villes confrontés à de grandes difficultés.

Les professionnels ont besoin de sentir un État fort à leurs côtés. La prise en compte de cette problématique passe inévitablement par la mise en œuvre, à l'échelle nationale, non seulement de mesures conjoncturelles pour répondre rapidement à l'urgence de la situation, mais également de réformes structurelles pour régler durablement la question de la désertification médicale. Outre les médecins généralistes, les pédiatres, les gynécologues, les ophtalmologistes manquent également dans nos territoires.

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