Question de M. RAPIN Jean-François (Pas-de-Calais - Les Républicains) publiée le 21/07/2016

M. Jean-François Rapin interroge M. le secrétaire d'État, auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche sur les conséquences pour la pêche en Manche et mer du Nord d'une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne.

Il lui rappelle que, depuis plusieurs années, les pêcheurs constatent une réduction continue de leurs zones d'activité due à la multiplication des nouveaux usages de la mer et qu'ils plaident pour une planification spatiale maritime mieux concertée à l'échelle européenne. À ces préoccupations légitimes s'ajoute depuis quelques semaines la très vive inquiétude provoquée par le résultat du référendum du 23 juin 2016, actant la volonté des Britanniques de sortir de l'Union européenne.

Si l'Union européenne a incontestablement des défauts et des lourdeurs bureaucratiques, elle a néanmoins instauré la communautarisation des zones économiques exclusives de ses États membres, ainsi que la négociation des totaux admissibles de capture (TAC) et quotas chaque année. Or, la pêche régionale française est fortement dépendante des eaux anglaises : 60 % de l'activité de la flottille régionale se situe dans les eaux anglaises. Ce chiffre monte à 80 % pour les navires hauturiers qui pêchent au large de l'Écosse.

Certes, des accords peuvent être négociés hors du cadre de l'Union européenne (c'est le cas de la Norvège par exemple), mais il est certain que la négociation sera rude, et il importe de s'assurer que les intérêts des pêcheurs français seront défendus. Il convient également de s'assurer qu'indépendamment de la question de la zone économique exclusive, les droits historiques des pêcheurs français, qui précèdent la politique commune des pêches de l'Union européenne car existant depuis la fin du XIXème siècle avec les pays riverains de la Manche, ne seront pas remis en cause par le Royaume-Uni.

Le deuxième motif d'inquiétude des pêcheurs à la suite du « Brexit » concerne l'accès au marché européen. En effet, la pêche britannique est fortement dépendante du marché français. Le Royaume-Uni sera donc très intéressé de maintenir des accords favorables à ses pêcheurs lors de la négociation. Ces deux négociations, sur l'accès des pêcheurs à la zone économique exclusive et sur l'accès au marché, doivent se faire conjointement, afin de ne pas être diluées dans des débats éloignés des enjeux économiques que constitue la pêche à l'échelle régionale.

Il l'interroge sur la façon optimale de s'assurer que les intérêts français seront bien défendus à Bruxelles. Il demande si le choix d'un Français pour mener cette négociation ou, à défaut, l'envoi d'un délégué français aux côtés du comité régional des pêches maritimes et des élevages marins des Hauts-de-France lors des négociations serait envisageable.

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Réponse du Ministère de la fonction publique publiée le 21/12/2016

Réponse apportée en séance publique le 20/12/2016

M. Jean-François Rapin. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nos discussions de ce matin peuvent paraître futiles au regard des événements de cette nuit. Il me paraît important de le rappeler mais la vie continue…

Ma question s'adressait à M. Vidalies. Depuis le 23 juin dernier, date du référendum actant la volonté des Britanniques de sortir de l'Union européenne, les pêcheurs français sont inquiets, et parmi eux, les pêcheurs des Hauts-de-France le sont plus particulièrement. Cette décision, qui a des incidences sur de nombreux secteurs de notre économie, les inquiète à plusieurs titres.

En effet, si l'Union européenne a incontestablement des défauts et des lourdeurs bureaucratiques, elle a néanmoins instauré la communautarisation des zones économiques exclusives de ses États membres, ainsi que la négociation des totaux admissibles de capture, les TAC, et des quotas annuels.

La politique commune des pêches engendre d'âpres discussions chaque année, mais elle constitue un cadre connu, déterminé, pour une activité qui dépasse bien souvent les frontières nationales : 60 % de l'activité de la flottille régionale française se situent dans les eaux anglaises. Ce chiffre monte à 80 % pour les navires hauturiers qui pêchent au large de l'Écosse.

Les milliers d'emplois directs et indirects engendrés par la pêche doivent être protégés, et les professionnels méritent une lisibilité dans l'exercice de leur activité.

Alors que le gouvernement britannique a annoncé son intention d'activer la clause de sortie de l'Union européenne avant la fin du mois de mars prochain, les négociations seront rudes, et le rôle de la Commission sera primordial.

Qu'adviendra-t-il de l'accès des navires français aux eaux anglaises ? Qu'en sera-t-il de l'accès au marché unique pour les produits britanniques ? Et, enfin, les droits historiques des pêcheurs français, bien antérieurs à la création de l'Union européenne, puisqu'ils existent depuis la fin du XlXe siècle avec les pays riverains de la Manche, seront-ils également remis en cause ?

Même si les négociations à Bruxelles ont permis de maintenir un niveau de capture de pêche acceptable, comment le Gouvernement compte-t-il s'assurer que les intérêts français seront bien défendus à Bruxelles dans le cadre de l'aboutissement du Brexit ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Annick Girardin, ministre de la fonction publique. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser mon collègue Alain Vidalies, qui n'a pas pu être présent ce matin.

Vous attirez l'attention du Gouvernement sur les conséquences de la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne pour les entreprises françaises de pêche exerçant dans la zone économique exclusive, la ZEE, de cet État, ainsi que sur le marché des produits de la mer. Sachez que cette inquiétude, nous la partageons. Elle est légitime.

Le peuple britannique a exprimé, à l'occasion du référendum du 23 juin 2016, le choix de ne plus être membre de l'Union européenne. Ce choix démocratique doit être respecté.

Les implications du retrait du Royaume-Uni pourraient être importantes pour de nombreux secteurs économiques français, dont la pêche maritime, bien sûr.

Le Gouvernement, lors du dernier comité interministériel à la mer auquel j'ai participé, et le Président de la République, durant les Assises de la mer, ont affirmé que les intérêts français en matière de pêche maritime seraient âprement défendus durant les discussions qui s'ouvriront le moment venu.

Le Premier ministre Bernard Cazeneuve l'a d'ailleurs confirmé lors de sa déclaration de politique générale le 13 décembre à l'Assemblée nationale.

Vous soulignez, à juste titre, la forte dépendance de la pêche française aux eaux britanniques, particulièrement dans les Hauts-de-France, en Bretagne ou en Normandie.

À l'heure actuelle, les revendications du Royaume-Uni sur ce sujet ne sont pas connues, mais nous imaginons qu'elles pourraient porter sur l'accès des navires de l'Union à la ZEE britannique dans son ensemble, l'accès aux zones de pêches historiques situées dans les eaux territoriales, ou encore la répartition future des quotas entre l'Union européenne à 27 et le Royaume-Uni.

Comme vous, nous sommes bien conscients que le Royaume-Uni est exportateur de produits de la mer et que son marché principal est aujourd'hui l'Union européenne.

Ces négociations, comme cela a été décidé par les 27 chefs des États membres concernés, ne pourront débuter que lorsque le Royaume-Uni aura formellement notifié le recours à l'article 50 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne qui encadre la procédure de retrait volontaire et prévoit un délai de deux ans pour négocier un accord.

Le Gouvernement est pleinement mobilisé pour défendre les intérêts français dans les négociations à venir et les échanges avec les représentants professionnels du Comité national des pêches maritimes et des élevages marins, le CNPMEM, sur ce sujet sont denses et coordonnés. Je veux vous le redire, monsieur le sénateur, comme à l'ensemble des pêcheurs français concernés par cette question, le Gouvernement est vigilant et mobilisé.

M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin.

M. Jean-François Rapin. Madame la ministre, si j'ai bien noté l'implication du Gouvernement sur le sujet, je relève qu'il y a beaucoup de « si » et que de nombreuses questions se posent encore. Je préconise que le Parlement soit pleinement associé à ces discussions. (M. Philippe Mouiller opine.)

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