Question de Mme JOURDA Gisèle (Aude - Socialiste et républicain) publiée le 20/07/2017

Mme Gisèle Jourda interroge M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur l'état d'avancement des discussions entre les services du ministère en charge du tourisme et les opérateurs présents en ligne référençant les activités touristiques.

Il apparaît en effet que, depuis novembre 2016, à la suite de l'évolution des procédures utilisées par ces groupes puissants en situation de quasi-monopole, l'ensemble des offres touristiques présentes sur le territoire de plusieurs collectivités ne sont plus référencées. Un cloisonnement géographique a en effet été mis en place.

Suite à cette évolution de la politique de référencement, certaines activités touristiques ont subi une large baisse de fréquentation, allant jusqu'à près de 30 % dans certains départements.

Les fonctionnalités techniques ne semblent donc plus adaptées à ces territoires. Cependant, les acteurs touristiques continuent de payer pour être référencés, certains ayant même choisi de s'appuyer principalement sur ces groupes pour assurer leur communication.

En raison des enjeux pour les professionnels du tourisme et pour nos collectivités, elle souhaiterait connaître l'état d'avancement des discussions entre les services du ministère et les grands opérateurs, et réaffirmer son souhait qu'une solution rapide et pérenne puisse être apportée.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministre de l'économie et des finances publiée le 25/10/2017

Réponse apportée en séance publique le 24/10/2017

Mme Gisèle Jourda. Monsieur le secrétaire d'État, ma question porte sur l'état d'avancement des discussions entre les services du ministère chargé du tourisme et les opérateurs présents en ligne référençant les activités touristiques.

Depuis novembre 2016, à la suite de l'évolution des procédures utilisées par ces groupes puissants en situation de quasi-monopole, l'ensemble des offres touristiques présentes sur le territoire de plusieurs collectivités ne sont plus du tout référencées.

De fait, un cloisonnement géographique a été mis en place. Par exemple, avant cette date, une recherche effectuée sur des sites comme TripAdvisor et Booking permettait d'associer au nom « Carcassonne » l'ensemble de l'offre touristique présente sur les communes avoisinantes. Depuis près d'un an, ce n'est plus le cas. À cause du cloisonnement géographique mis en place par ces référenceurs, même un établissement présent à moins d'un kilomètre de la cité médiévale, mais domicilié sur une autre commune que Carcassonne, ne se voit plus identifié dans les possibilités offertes aux clients. Même la communauté d'agglomération se trouve impactée puisqu'elle ne peut plus référencer ses offices du tourisme communautaires en les rattachant à la ville-centre.

Vous en conviendrez, monsieur le secrétaire d'État, c'est fortement dommageable.

À la suite de cette évolution, certaines activités touristiques ont subi une large baisse de fréquentation, allant jusqu'à près de 30 % dans le département de l'Aude. C'est d'autant plus pénalisant que des acteurs touristiques continuent de payer pour être référencés, certains ayant même choisi de s'appuyer principalement sur ces groupes pour assurer leur communication.

Pourquoi une telle situation ? Il apparaît dans les échanges avec ces grands groupes qu'ils ont souhaité standardiser leurs procédures, mais qu'ils ont pris néanmoins conscience des limites de ces dernières, notamment au vu des multiples réclamations dont elles ont fait l'objet.

Monsieur le secrétaire d'État, en raison des enjeux pour les professionnels du tourisme et pour nos collectivités, j'aimerais connaître l'état d'avancement des discussions entre vos services et les grands opérateurs. Je souhaite sincèrement qu'une solution rapide et pérenne puisse être apportée.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances.

M. Benjamin Griveaux, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances. Madame la sénatrice, vous m'interrogez sur le tourisme dans nos territoires et la place prépondérante prise par certaines grandes plateformes numériques, que nos concitoyens connaissent bien pour en faire un usage régulier dans la préparation de leurs vacances – encore récemment, j'y ai eu recours pour organiser celles de mes enfants. (Sourires.) De fait, elles sont entrées dans leur quotidien.

Votre question intervient quelques jours après le conseil de pilotage du tourisme, réuni le 10 octobre dernier par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères, en présence de plusieurs membres du Gouvernement et d'une trentaine de professionnels représentatifs des différentes activités touristiques.

À l'occasion de cette réunion a été annoncé le lancement d'une mission sur le financement de la promotion de la destination France qui devra rendre ses conclusions avant la fin de l'année. L'objectif de cette mission est d'élargir l'assiette des contributeurs à l'opérateur public Atout France et d'y associer plus étroitement les grands acteurs numériques qui bénéficient de ses actions de promotion sans pour autant les financer – en tout cas pas toujours.

L'Union nationale pour la promotion de la location de vacances, qui regroupe notamment les grands acteurs numériques tels que Airbnb, Abritel Homeway, Expedia et TripAdvisor, représentée par son président, a participé à ces travaux et redit sa volonté de contribuer à l'effort collectif selon des modalités qu'il appartiendra aux trois rapporteurs de la mission de définir.

Sur la question plus spécifique du référencement des professionnels que vous soulevez, les services du ministère ont été saisis d'une situation préoccupante à Carcassonne, sur votre territoire. La plateforme TripAdvisor a en effet décidé de changer son découpage territorial et de ne plus faire remonter dans les listes de résultats des internautes que les acteurs géographiquement situés dans la ville, brimant de facto les acteurs situés à la périphérie de Carcassonne, nombreux compte tenu de l'importance de ce pôle touristique dans la région.

Cette situation est évidemment très pénalisante pour ceux qui ont besoin d'être connectés à la marque « Carcassonne » – je n'aime pas assimiler le nom d'une ville à une marque – pour remonter dans les référencements de ce type de plateforme.

Cela ne correspond pas en outre à la logique des contrats de destination – je les ai évoqués dans ma réponse précédente – mis en place dans toute la France pour dépasser les frontières administratives, pas toujours des plus opérationnelles et efficaces, et fédérer les acteurs territoriaux du tourisme autour d'une marque commune.

Le contrat de destination « Pays cathare » est d'ailleurs le reflet de cette ambition et il bénéficie à plein de ce dispositif.

Après plusieurs échanges, TripAdvisor a indiqué avoir pris conscience des problèmes générés par son nouveau découpage territorial et travaille à des fonctionnalités moins restrictives pour les professionnels. La plateforme nous a indiqué traiter le cas de Carcassonne en priorité et doit faire des propositions dans le courant du mois de novembre. Elle est en relation constante avec l'office du tourisme du Grand Carcassonne et les services du Quai d'Orsay pour apporter au plus vite une solution satisfaisante à cette situation pour le moins ubuesque.

Ce cas particulier de Carcassonne n'est pas isolé en France ; d'autres professionnels sont confrontés à cette situation dans nos territoires. Là où existe une difficulté, nous nous employons à faire du sur-mesure, territoire par territoire. Cela soulève la question de la place hégémonique, voire oligopolistique – tel est le terme utilisé voilà quelque temps lors des cours d'économie que je suivais – prise en quelques années par les plateformes numériques dans le secteur du tourisme. Ce sont aujourd'hui des acteurs incontournables avec lesquels il faut collectivement pouvoir travailler, interagir et coopérer, dans un dialogue exigeant, afin que nous atteignions les objectifs ambitieux fixés par le Premier ministre le 26 juillet dernier à l'occasion du conseil interministériel du tourisme, à savoir l'accueil de 100 millions de touristes étrangers à l'horizon 2020 et 50 milliards d'euros de retombées économiques pour la France et l'ensemble de ses territoires.

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Jourda.

Mme Gisèle Jourda. Monsieur le secrétaire, vous prononcez bien mieux que moi les anglicismes ! (Sourires.)

Cela étant, votre réponse va totalement dans le sens de mon questionnement. Je m'en ferai l'écho dans mon territoire auprès des opérateurs du tourisme et des représentants des communautés de communes et d'agglomération. Il est évident qu'en ayant placé ces frontières, TripAdvisor a dressé des remparts, alors que, pour Carcassonne, cité médiévale – vous avez mis en avant, et je vous en félicite, la marque « Pays cathare » –, le département de l'Aude a été l'un des premiers à déposer une marque voilà déjà quelques années, grâce au député européen Éric Andrieu.

Alors que nous avions mis en place au fil des années une politique touristique qui se voulait à l'avant-garde et précurseur, nous nous retrouvons avec des personnes qui n'ont plus l'« effet marguerite » voulu autour de Carcassonne pour promouvoir nos châteaux cathares, mais surtout le tourisme des abbayes et des sites remarquables situés dans le département de l'Aude. Or ce département comprend deux villes de moyenne importance, Carcassonne et Narbonne, autour desquelles rayonne le tourisme.

Il faut s'ouvrir au net, mais il ne faut pas, au moment où l'on veut que les frontières tombent pour s'ouvrir à un tourisme international et mondial, se trouver face à ce type de difficultés qui ont vraiment nui aux chambres d'hôtes et aux tables de l'arrière-pays qui bénéficiaient de l'intérêt pour Carcassonne.

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