Question de M. RETAILLEAU Bruno (Vendée - Les Républicains) publiée le 28/12/2017

M. Bruno Retailleau appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire sur l'avenir des tarifs réglementés de gaz et d'électricité.

Dans sa décision du 19 juillet 2017, le Conseil d'État juge que « le maintien de tarifs réglementés du gaz naturel est contraire au droit de l'Union ». Cette décision, qui a pour conséquence l'annulation du décret n° 2013-400 du 16 mai 2013 modifiant le décret n° 2009-1603 du 18 décembre 2009 relatif aux tarifs réglementés de vente de gaz naturel, a posé « une difficulté sérieuse d'interprétation du droit de l'Union européenne » qui a débouché sur une demande de décision préjudicielle, introduite par le Conseil d'État, auprès de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE).
Sur la base des trois conditions que pose la CJUE pour qu'une entrave à la libre concurrence puisse être admise, le Conseil d'État a jugé que le décret introduisait une entrave à la réalisation d'un marché concurrentiel du gaz, sans que cette restriction respecte les conditions qui auraient permis de la regarder comme admissible au regard du droit de l'Union européenne.
S'agissant de l'effet de la décision, le Conseil d'État a souhaité que les effets de sa décision soient différés dans le temps.
Le Conseil d'État précise « qu'eu égard aux conséquences graves qu'une annulation rétroactive ferait naître sur la situation contractuelle passée de plusieurs millions de consommateurs et à la nécessité impérieuse de prévenir l'atteinte à la sécurité juridique qui en résulterait, il y a lieu, à titre exceptionnel, de prévoir que les effets produits pour le passé par le décret attaqué soient, sous réserve des actions contentieuses déjà engagées à la date de sa décision, regardés comme définitifs. »
Cela signifie concrètement que les consommateurs ne pourront plus contester les effets déjà produits, pour ce qui les concerne, par le décret du 16 mai 2013. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui indiquer si le Gouvernement entend faire évoluer les dispositions applicables aux tarifs réglementés du gaz et d'électricité et dans quel délai.

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Réponse du Ministère de la transition écologique et solidaire publiée le 30/08/2018

Par une décision du 19 juillet 2017, le Conseil d'État a estimé que les tarifs réglementés de vente (TRV) du gaz naturel ne réunissaient pas les conditions permettant une intervention de l'État sur les prix. Les tarifs réglementés de vente du gaz naturel ont de ce fait été jugés contraires au droit européen et au droit de la concurrence par le Conseil d'État. Le Gouvernement proposera les évolutions législatives et réglementaires nécessaires pour se mettre en conformité avec cette décision et supprimer les TRV gaz. À cette fin, une concertation a été engagée sur les modalités d'extinction des TRV gaz, avec l'ensemble des parties prenantes. Dans ce cadre, en raison du grand nombre de consommateurs ayant souscrit à un contrat de vente aux tarifs réglementés, il est proposé que les évolutions se fassent de manière progressive, pour permettre aux consommateurs de s'approprier les données du marché et de choisir au mieux un nouveau contrat, tout en permettant à la concurrence de jouer librement dans cette transition. Il est ainsi envisagé d'interdire la signature de nouveaux contrats au TRV dès la promulgation des nouvelles dispositions législatives, et de mettre progressivement en extinction les contrats existants, sur plusieurs années. Au terme de ces délais et pour protéger les consommateurs de toute coupure, les clients qui n'auraient pas opté spontanément pour une offre de marché verraient leur contrat basculer vers une offre de marché de leur opérateur historique. Il est également envisagé que ces dispositions s'accompagnent de mesures pour accompagner et protéger les consommateurs, en leur fournissant des informations sur le processus de suppression des tarifs réglementés de vente du gaz naturel, ainsi que des outils fiables, indépendants, et transparents pour leur donner de la visibilité sur les offres de marché disponibles et sur les prix pratiqués. Des dispositifs pour assurer aux consommateurs la fourniture de secours, en cas de défaillance de leur fournisseur, ou de dernier recours, dans le cas où le consommateur ne parviendrait pas à trouver une offre sur le marché, sont également envisagés. La fin des tarifs réglementés du gaz peut également être une opportunité pour les consommateurs pour bénéficier des offres les plus compétitives. En effet, les offres de marché du gaz sont aujourd'hui souvent 5 % à 10 % moins chères que les offres réglementées. En revanche, en ce qui concerne l'électricité, le Conseil d'État a admis, dans son principe, l'existence de tarifs réglementés de vente (décision du 18 mai 2018). La différence de traitement entre l'électricité et le gaz est expliquée dans la décision par le fait que d'une part, les TRV électricité permettent de garantir un prix stable de l'électricité, et que d'autre part, à la différence du gaz naturel, l'électricité est un « bien de première nécessité ». Le Conseil d'État a donc considéré dans sa décision que la stabilité des prix de l'électricité était un objectif d'intérêt économique général suffisant pour justifier de la compatibilité des TRV électricité avec le droit européen. Le Conseil d'État a toutefois estimé que l'intervention de l'État pour fixer les tarifs réglementés de l'électricité ne respectait pas le droit européen :compte tenu du caractère permanent des tarifs réglementés et d'absence de réexamen périodique de leur nécessité ;en ce qu'ils s'appliquent à tous les consommateurs finals dont la puissance souscrite est inférieure ou égale à 36 kVA, en particulier les sites non résidentiels appartenant à des grandes entreprises. Les modalités de mise en œuvre des TRV électricité doivent donc être révisées pour prévoir le ré-examen périodique de leur nécessité et exclure les sites des grandes entreprises de leur bénéfice. Le Gouvernement proposera les évolutions législatives et réglementaires nécessaires, après une concertation approfondie avec les parties prenantes.

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