Question de Mme DESEYNE Chantal (Eure-et-Loir - Les Républicains) publiée le 13/09/2018

Mme Chantal Deseyne appelle l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur une étude selon laquelle l'Androcur est accusé d'augmenter fortement le risque de méningiome. L'Androcur est prescrit à des dizaines de milliers de femmes depuis les années 1980. Or, ce traitement hormonal augmente le risque de souffrir de méningiome, une tumeur bénigne du cerveau. L'étude, réalisée par l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et par l'assurance maladie, montre que l'Androcur, prescrit à long terme, soit environ pendant cinq ans, multiplie par vingt le risque de développer un méningiome. Ce grave effet indésirable est mentionné sur la notice d'utilisation du médicament depuis 2011. Toutefois depuis sept ans les médecins qui prescrivent ce médicament à leurs patientes ne les en informent pas systématiquement, et ces dernières ne lisent pas toujours non plus la notice d'utilisation en détails, et notamment les effets indésirables. D'autre part l'Androcur est à la base un médicament indiqué chez la femme pour lutter contre l'hyperpilosité et chez l'homme pour traiter le cancer de la prostate. Or, il est également prescrit hors de ses indications autorisées pour d'autres maladies comme l'acné, les kystes ovariens et l'endométriose. On estime que près de 60 000 femmes l'auraient pris l'an dernier pour soigner ces pathologies. Elle aimerait savoir pourquoi les patientes n'ont pas été mises en garde systématiquement depuis 2011 sur les effets à long terme de l'Androcur, pourquoi ce médicament contre l'hyperpilosité est prescrit contre l'acné, les kystes ovariens et l'endométriose, et d'autre part quelles sont les mesures que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour éviter ces graves complications dues à la prise de ce médicament.

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Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 25/10/2018

La spécialité Androcur, composée d'acétate de cyprotérone, est un progestatif qui possède une forte activité antigonadotrope et antiandrogénique. Ses indications thérapeutiques pour le dosage à 50 mg sont actuellement : hirsutismes féminins majeurs d'origine non tumorale (idiopathique, syndrome des ovaires polykystiques), lorsqu'ils retentissent gravement sur la vie psycho-affective et sociale, traitement palliatif anti-androgénique du cancer de la prostate. À la suite d'un signal portant sur la survenue de méningiomes et basé sur la publication du Pr Froelich qui a conduit à une évaluation européenne en 2009 à l'initiative de la France, l'autorisation de mise sur le marché (AMM) française a été modifiée le 25 janvier 2011 afin de mentionner au sein du RCP (résumé des caractéristiques du produit, destiné aux professionnels de santé et colligé notamment dans les éditions du dictionnaire et du site internet VIDAL) et de la notice (destinée aux patients) le risque de survenue de méningiomes en cas d'utilisation prolongée à des doses de 25 mg par jour et plus et de contre-indiquer le traitement en cas d'existence ou d'antécédents de méningiomes. Plus précisément, les mentions suivantes ont été ajoutées dans la notice du médicament : Ne prenez jamais ANDROCUR 50 mg, comprimé sécable : en cas d'existence ou antécédent de méningiome (tumeur généralement bénigne du tissu situé entre le cerveau et le crâne). Contactez votre médecin en cas de doutes. Avertissements et précautions : des cas de méningiomes (tumeurs généralement bénignes du cerveau) ont été rapportés avec ANDROCUR (voir rubrique 4 « Quels sont les effets indésirables éventuels ? »). Si un méningiome est diagnostiqué, le traitement par ANDROCUR doit être arrêté. Des cas de méningiomes ont été rapportés en cas d'utilisation prolongée (plusieurs années) d'ANDROCUR à des doses de 25 mg par jour et plus. Si le risque de méningiome était connu et mentionné depuis 2011, jusqu'à présent le lien entre la prise de ce médicament et l'apparition de méningiome n'était pas précisément quantifiée, notamment au regard de la durée d'exposition et de la posologie. Au vu des données désormais disponibles sur ce point, et notamment des premiers résultats de l'étude épidémiologique menée par la caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) en coopération avec le service de neurochirurgie de l'Hôpital Lariboisière à Paris, l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a réuni pour la deuxième fois un Comité spécialisé scientifique temporaire (CSST) composé d'experts indépendants le 1er octobre 2018 afin de finaliser un projet de recommandations d'utilisation et de mesures d'encadrement de ce risque en France. Les experts se sont prononcés pour le maintien de la commercialisation de l'acétate de cyprotérone dosé à 50 mg en France dans son indication actuelle mais en renforçant l'encadrement et le suivi de ces traitements. Les conclusions de ce comité ont été diffusées le 8 octobre 2018 aux professionnels de santé concernés et sur le site internet de l'ANSM. Un document d'information à destination des patients est en cours d'élaboration. Dès la disponibilité des résultats consolidés de l'étude épidémiologique précitée, l'ANSM qui travaille en collaboration avec ses homologues européens, sollicitera auprès de l'Agence européenne du médicament (EMA) une réévaluation du rapport entre bénéfice et risque de ce médicament et de ses génériques, sur la base des résultats de cette étude et des premières recommandations établies par le CSST. En effet, le risque de méningiome est à mettre en balance au regard notamment des conséquences de l'existence d'un hirsutisme majeur, qui peut altérer de façon très importante la santé psychologique et la qualité de vie des femmes qui en sont atteintes. Par ailleurs, les données préliminaires de l'étude suggèrent un usage hors AMM de l'acétate de cyprotérone, compte tenu de son action antigonadotrope et antiandrogénique, dans les indications de type acné, alopécie, endométriose avec une prescription majoritaire par les gynécologues. L'utilisation de cette spécialité dans l'indication syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) ne peut pas être considérée comme hors AMM puisqu'elle est citée dans le libellé actuel de l'indication. Cependant, il est probable que tous les syndrome des ovaires polykystiques ne nécessitent pas un traitement par acétate de cyprotérone, notamment lorsqu'ils ne sont pas accompagnés d'un hirsutisme majeur. Le CSST et l'évaluation européenne de ce dossier permettront notamment de préciser les indications pour lesquelles le rapport entre bénéfice et risque du médicament demeure positif et d'établir des recommandations quant à la surveillance (examens d'imagerie et leur rythme de réalisation) des femmes ainsi traitées. En tout état de cause, il convient de rappeler qu'en vertu des dispositions de l'article R. 4127-35 du code de la santé publique, le médecin doit à la personne qu'il examine, qu'il soigne ou qu'il conseille une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu'il lui propose. De plus, s'agissant de la prescription de ce médicament en dehors des indications de l'AMM, en vertu des dispositions de l'article R. 4127-8 du code précité, dans les limites fixées par la loi et compte tenu des données acquises de la science, le médecin est libre de ses prescriptions qui seront celles qu'il estime les plus appropriées en la circonstance.

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