Question de M. BÉRIT-DÉBAT Claude (Dordogne - SOCR) publiée le 08/11/2018

M. Claude Bérit-Débat attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire sur les effets à venir de la hausse de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) sur les finances des collectivités territoriales et sur l'absence de solution dont ces dernières disposent pour remédier au problème du recyclage des déchets plastiques lourds.
En Dordogne, le recyclage des déchets plastiques lourds n'est plus d'actualité depuis qu'en décembre 2017, l'usine Recymap de Saint-Pierre-de-Côle qui traitait ces déchets pour en faire des paillettes, a mis la clé sous la porte. Sont en cause, le cours du pétrole favorisant les achats de plastique vierge par les plasturgistes plutôt que de plastique recyclé ainsi que le manque de débouchés de ces paillettes recyclées.
Or, avec ce traitement, c'étaient près de 650 tonnes qui entraient dans ce cercle vertueux générateur d'emplois, sur les près de 1 000 tonnes de plastique annuelles collectées en déchetteries par les collectivités dans le département.
L'aide financière du syndicat mixte départemental des déchets de Dordogne (SMD3) n'a pas suffi à maintenir cette activité pourtant vertueuse, tant d'un point de vue environnemental que pour les habitants de la Dordogne. Les efforts du syndicat mixte pour se tourner vers d'autres sociétés de recyclage, notamment une située à Catus dans le Lot ont été vains car bien que léger, ce matériau est encombrant et coûteux à transporter.
Le SMD3, faute de mieux, préfère donc aujourd'hui enfouir ces déchets à Saint-Laurent-des-Hommes comme un déchet non recyclable ordinaire.
Or, l'avenir promis par le Gouvernement à ces déchets n'est aujourd'hui pas plus radieux que l'avenir promis aux collectivités qui en ont la gestion. En effet, la hausse à venir de la taxe sur les activités polluantes (TGAP) va impacter les collectivités et les syndicats gestionnaires des déchets dans une proportion importante.
Les prévisions de Bercy prédisent que l'effet de cette mesure sera compensé par une baisse du volume des déchets mis en décharge ou incinérés, volume à partir duquel est calculée la taxe. Or, cet effet est purement hypothétique et ne devrait se traduire que dans de faibles proportions. Dès lors, les collectivités seront contraintes, demain, de débourser plus pour gérer sensiblement les mêmes quantités de déchets, parfois sans solution de traitement viable.
L'exemple de son département est révélateur de la situation inextricable à laquelle ont affaire les élus locaux concernés. D'une part, ils sont laissés sans moyen pour perpétuer le traitement de ces déchets polluants pour le territoire et, d'autre part, ils seront demain pénalisés financièrement par la nouvelle hausse de la fiscalité.
Ils auraient besoin,au contraire, d'un soutien pour pouvoir continuer à traiter ces déchets qu'aujourd'hui ils ne peuvent plus traiter, quitte à prendre en charge leur transport vers d'autres usines. Aussi, il lui demande comment il compte soutenir les collectivités confrontées à ces difficultés.

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Réponse du Ministère auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports publiée le 21/11/2018

Réponse apportée en séance publique le 20/11/2018

M. Claude Bérit-Débat. Madame la ministre, en Dordogne comme dans beaucoup de départements, le traitement des déchets est assuré par un syndicat départemental, le syndicat mixte départemental des déchets de Dordogne, le SMD3.

Jusqu'à présent, les déchets plastiques lourds étaient confiés à une usine qui en faisait des paillettes. Le cours du pétrole, qui favorise l'achat par les plasturgistes de plastique vierge plutôt que le plastique recyclé, a conduit cette entreprise, Recymap, à fermer.

Les centres potentiels de recyclage étant situés trop loin pour poursuivre dans cette filière, le SMD3 est aujourd'hui obligé d'enfouir ses déchets comme du plastique non recyclable ordinaire, en parfaite contradiction avec les objectifs de la feuille de route pour l'économie circulaire.

Je rappelle que l'économie circulaire vise à recycler 100 % du plastique d'ici à 2025, au moyen d'une augmentation de la fiscalité pour rendre la valorisation moins chère que l'élimination. Cela passera par la hausse de la composante « déchets » de la taxe générale sur les activités polluantes, la TGAP, qui passerait de 48 à 165 euros par tonne pour le stockage et de 15 à 25 euros par tonne pour le traitement thermique, et aussi, bien entendu, par des mesures compensatoires – baisse du taux de TVA sur le tri et sur le compostage, de 10 % à 5,5 % ; réduction des frais de gestion de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, la TEOM, de 8 % à 3 % ; allongement de la durée du taux réduit des frais de dégrèvement, de trois à cinq ans.

Ces mesures de compensation sont toutefois insuffisantes, car les collectivités n'ont pas de marge de manœuvre pour réduire les volumes. Toutes les simulations montrent que, si les collectivités arrivent à respecter les objectifs de la loi sur la transition énergétique, cela se traduira par un coût supplémentaire d'au moins un euro par habitant.

Aussi, plutôt que d'instaurer la double peine pour les collectivités et pour les contribuables, ne pourrait-on pas mettre en place, pour les déchets plastiques lourds, une taxe sur les produits non recyclables, sorte de TGAP en amont, pour taxer les émetteurs, et non les collectivités, ou même une REP balai – responsabilité élargie du producteur –, qui prendrait en charge tous les projets recyclables ?

Que pensez-vous de ces propositions ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le sénateur Claude Bérit-Débat, vous soulevez la question du recyclage du plastique lourd en citant la fermeture de l'usine Recymap de Saint-Pierre-de-Côle, qui recyclait certains plastiques, et l'impact pour les collectivités de la future hausse de la TGAP.

Votre question met en lumière les coûts de gestion de nos déchets - les signaux économiques ne sont pas au bon niveau. Aujourd'hui, si le recyclage peine à se développer, c'est en partie dû au fait que la mise en décharge ou l'incinération de ces déchets reviennent beaucoup moins cher. Il faut donc renchérir le coût de l'élimination des déchets tout en diminuant celui de leur recyclage, afin qu'une véritable industrie française du recyclage puisse se développer, une industrie génératrice d'emplois et de valeur ajoutée.

Le Gouvernement, au travers de la feuille de route pour l'économie circulaire, fruit de plus de six mois de concertation, a décidé d'utiliser plusieurs leviers pour y parvenir.

Cela passe tout d'abord par une réforme globale de la fiscalité, afin de rendre le recyclage des déchets économiquement plus attractif que leur mise en décharge ou leur incinération. Cela repose sur une trajectoire de TGAP revue à partir de 2021, de telle sorte que le coût moyen de l'élimination des déchets devienne supérieur au coût moyen de leur recyclage.

En parallèle, il s'agit de donner de nouvelles capacités financières aux collectivités pour investir et pour s'adapter, en allégeant la pression fiscale sur les activités de tri et de recyclage. Cela se traduira notamment par une baisse du taux de la TVA pour les opérations de prévention, de collecte, de tri et de recyclage des déchets, mais également par une baisse des frais de gestion de la TEOM pour les collectivités qui font le choix d'opter pour une tarification incitative.

Les mesures de la feuille de route pour l'économie circulaire ne se limitent toutefois pas aux aspects fiscaux, puisque la réforme des filières REP sera également menée l'année prochaine. Elle permettra de développer le recyclage, en fixant de nouveaux objectifs aux éco-organismes, de développer les bonus-malus, pour favoriser l'incorporation de matière plastique recyclée, et de créer de nouvelles filières REP.

L'objectif est donc de s'appuyer sur l'écoconception des produits, pour stimuler tant l'offre que la demande en matières recyclées, afin qu'une véritable économie du recyclage se développe sur notre territoire.

La feuille de route pour l'économie circulaire a d'ores et déjà permis de réunir les industriels pour qu'ils s'engagent dans le recyclage. Soixante entreprises et fédérations professionnelles se sont déjà engagées à incorporer dans leurs produits près de trois cent mille tonnes de matières plastiques recyclées en plus.

C'est un premier pas, il faudra encore aller au-delà. D'autres idées pour développer le recyclage des plastiques pourront également être débattues dans le cadre du futur projet de loi sur l'économie circulaire.

Mme la présidente. Mes chers collègues, à moins de sept secondes de temps de parole restant, je ne peux pas vous laisser répondre au Gouvernement.

Monsieur Bérit-Débat, il ne vous restait que six secondes…

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