Question de Mme DELATTRE Nathalie (Gironde - RDSE) publiée le 01/11/2018

Mme Nathalie Delattre attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la question du prolongement de l'homologation de la substance active cuivre au niveau européen, conformément au Règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil.
Le cuivre est aujourd'hui, et jusqu'au 31 janvier 2019, l'un des seuls produits minéraux autorisés en agriculture pour lutter contre le mildiou, notamment. Dans la viticulture biologique, il est le seul à être réellement efficace contre cette maladie. Dans la viticulture conventionnelle, il constitue l'une des rares alternatives permettant à un nombre grandissant de viticulteurs de réduire leur utilisation de produits classés cancérigènes, mutagènes ou reprotoxiques (CMR).
Si, sur le long terme, la recherche sur les technologies de biocontrôle ou le développement des cépages résistants devraient fournir des solutions pour s'en passer, il n'existe pas d'alternative à court terme à l'utilisation du cuivre dans des conditions réalistes, soit six kilos par hectare et par an, lissés sur cinq ans.
Or, sur la base des conclusions rendues par l'autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) au mois de janvier 2018, la Commission européenne propose de prolonger l'homologation du cuivre avec un encadrement des doses de quatre kilos par hectare et par an, avec lissage sur sept ans.
Dans un futur proche, c'est donc la survie de la viticulture biologique qui est en jeu. L'année 2018 l'a prouvé : à raison de quatre kilos par hectare et par an lissés sur sept ans, nombre de viticulteurs français installés en agriculture biologique seraient obligés de revenir à la viticulture conventionnelle. Et concernant les viticulteurs dits conventionnels, c'est le rythme de la réduction de leur utilisation de produits classés cancérigènes, mutagènes ou reprotoxiques qui ralentirait si l'homologation de la substance active cuivre n'était pas prolongée avec des conditions d'utilisation réalistes.
Réunis au sein du Comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale les 19 et 20 juillet 2018, les États membres de l'Union européenne ont été invités à soumettre leurs commentaires sur la proposition, irréaliste, faite par la Commission européenne. La France ne l'a pas fait.
Les 23 et 24 octobre, le Comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale se réunissait à nouveau pour examiner cette proposition. Dans ce cadre, une minorité de blocage s'est constituée contre ce texte, estimant qu'il ne devrait pas intégrer de possibilité de lissage et donc, rendre fixe la limite annuelle des quatre kg de cuivre par hectare. C'est une position encore plus intenable que celle défendue par la Commission elle-même.
Le Comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale doit se réunir à nouveau les 12 et 13 décembre pour prendre une décision qui, peu de temps avant la fin de l'homologation actuelle qui tombe le 31 janvier 2019, sera certainement définitive.
Dans ces conditions, elle lui demande quelle position compte défendre la France face aux demandes inconsidérées d'autres États membres concernant le prolongement de l'homologation de la substance active cuivre.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 31/01/2019

Par le règlement n° 2018/1981 du 13 décembre 2018, la Commission européenne a renouvelé l'approbation du cuivre pour une durée de sept ans. Sur cette base, les États membres vont pouvoir délivrer des autorisations nationales de mise sur le marché pour des préparations phytopharmaceutiques à base de cuivre. Dans la mesure où le cuivre est une substance candidate à la substitution, une évaluation comparative doit être préalablement réalisée pour s'assurer qu'il n'existe pas d'alternatives chimiques ou non chimiques sensiblement plus sûres pour la santé humaine ou animale ou l'environnement et ne présentant pas d'inconvénients économiques ou pratiques majeurs. Les nouvelles modalités d'approbation prévoient que seules pourront être autorisées les utilisations n'excédant pas une quantité de 28 kilogrammes de cuivre par hectare sur la période de sept ans, prenant en compte toutes les sources d'apport en cuivre. Un mécanisme dit « de lissage » est permis, pour permettre de moduler le plafond annuel en fonction des besoins de protection des plantes tout en restant dans la limite de 28 kilogrammes sur l'ensemble de la période. Cette possibilité pourra être accordée au cas par cas par l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, sur la base des éléments fournis dans le dossier de demande d'autorisation de l'usage considéré qui devront montrer que la pratique n'entraîne pas de risque inacceptable pour la santé et l'environnement. La France était favorable à un renouvellement de l'approbation européenne du cuivre afin de conserver une méthode de protection des plantes qui s'avère encore incontournable pour un certain nombre de productions, en agriculture biologique notamment. Cependant, une transition vers des alternatives plus économes en cuivre est indispensable compte tenu des risques et des impacts potentiels du cuivre sur l'environnement et la santé. L'expertise scientifique collective de l'institut national de la recherche agronomique publiée en janvier 2018, intitulée « Peut-on se passer de cuivre en agriculture biologique ? », a dressé un panorama complet des usages du cuivre, des alternatives disponibles, des situations critiques et des besoins de recherche. Elle a notamment insisté sur le rôle crucial de la sélection de variétés résistantes aux maladies fongiques. Le Gouvernement a fait part de son intention d'accompagner cette transition vers des pratiques plus économes en cuivre, en mobilisant l'ensemble des dispositifs et mesures existants dans le cadre du plan Ecophyto et du plan d'actions sur les produits phytopharmaceutiques et une agriculture moins dépendante aux pesticides. Une feuille de route pour une réduction de l'utilisation du cuivre en protection des végétaux, en cours d'élaboration avec les parties prenantes, sera présentée lors d'un prochain comité d'orientation stratégique et de suivi du plan Ecophyto au cours du premier trimestre 2019.

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