Question de M. ADNOT Philippe (Aube - NI) publiée le 06/12/2018

M. Philippe Adnot attire l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances sur l'un des problèmes persistant dans le financement de l'économie française, à savoir le fort biais en faveur des produits de dette plutôt que de fonds propres, notamment chez les assureurs-vie. Or, avec un encours de 1,6 Tr€, ce secteur reste l'un des plus importants canaux de financement de l'économie. À l'annonce du léger desserrement de certains critères de la directive 2009/138/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2009, dite solvabilité II, dans le cadre de la révision du régime prudentiel, il lui demande si le pouvoir réglementaire entend accroître en conséquence le pourcentage du compartiment actions d'entreprises européennes pour permettre enfin à l'assurance-vie française de contribuer plus significativement au financement de l'économie et de ses entreprises qui ont besoin de fonds propres. Les épargnants qui peuvent aussi avoir besoin de meilleures rémunérations pourraient, sur la durée longue d'une épargne pour la retraite, également s'accommoder d'un tel desserrement sans prise de risque excessif.

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Transmise au Ministère de l'économie et des finances


Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 08/08/2019

Au-delà du volume très important des actifs qu'ils détiennent, les assureurs sont, compte tenu de leur modèle d'activité, des acteurs particulièrement adaptés à l'investissement de long terme en fonds propres, qui permettent, davantage que la dette, d'investir pour l'innovation. Il s'agit donc d'un sujet clé pour le financement de notre économie. Le cadre prudentiel européen en assurance, dit « Solvabilité 2 », est un outil puissant qui a considérablement renforcé la confiance dans le système financier européen, mais qui présente le défaut de désinciter à l'investissement de long terme. Cet effet est dû à la structure même de cette réglementation, qui demande aux assureurs de pouvoir résister dans l'année à venir à un choc tel qu'il n'en survient statistiquement que tous les deux cents ans. Cette règle présuppose que l'assureur serait forcé de revendre tout ou partie de ses actifs lors d'un choc mais ne prend pas suffisamment en compte les caractéristiques de l'investissement à long terme et notamment pas la capacité des assureurs à conserver certains actifs, même en situation stressée. Partant de ce constat, la France et les Pays-Bas ont demandé, en 2018, à ce que la charge en capital des actions détenues sur le long terme soit abaissée pour refléter l'horizon de long terme de ce type de gestion dans le cadre de la révision du règlement délégué de Solvabilité 2. Le Gouvernement a ainsi obtenu, dans le cadre de cette révision, une mesure permettant d'améliorer le traitement prudentiel de la détention d'actions par les assureurs. L'article 171a du règlement délégué, publié au Journal Officiel de l'Union européenne du 18 juin 2019, crée ainsi une nouvelle classe d'actions détenue à long terme et dont la détention sera moins coûteuse en capital pour les assureurs. Il revient maintenant au secteur de l'assurance de se saisir de cette opportunité pour financer davantage notre économie en fonds propres. Les services compétents ont à ce titre rencontré les assureurs et leurs fédérations professionnelles pour expliciter les attendus de cette mesure et les inciter à la mettre en œuvre. C'est également via la réglementation des produits d'assurance-vie que le Gouvernement a souhaité inciter à un investissement en actions plus conséquent. À ce titre, les articles 71 et 72 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises ont prévu plusieurs mesures tendant à orienter davantage l'épargne vers l'économie réelle et à offrir aux épargnants de meilleures perspectives de rendement. En ce qui concerne l'assurance vie, l'article 72 de la loi prévoit une ouverture de l'épargne à de nouveaux actifs qui financent l'économie, en ouvrant aux clients avertis la possibilité de souscrire à des fonds professionnels et en facilitant l'investissement dans des unités de compte de capital-investissement. La réforme du fonds eurocroissance s'inscrit également dans cet objectif de meilleure allocation de l'épargne : ce produit apporte une solution au dilemme des Français entre la sécurité de leur épargne, l'espérance de rendement et la possibilité de retirer son épargne à tout moment. La garantie à terme du fonds eurocroissance permet aux épargnants de placer leur argent avec sérénité et aux assureurs d'investir davantage en actions. En ce qui concerne l'épargne retraite supplémentaire, l'article 71 de la loi Pacte a créé des produits plus adaptés aux besoins des épargnants, entièrement portables et plus flexibles quant aux modalités de sortie en rente ou en capital. Pour que cette épargne soit davantage orientée vers le financement des PME, le forfait social est abaissé de 20 % à 16 % lorsque l'épargne est investie à hauteur de 10 % minimum en titres de petites et moyennes entreprises. Toutes ces mesures répondent ainsi à l'objectif d'amélioration du financement de notre tissu productif.

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