Question de M. GAY Fabien (Seine-Saint-Denis - CRCE) publiée le 13/12/2018

M. Fabien Gay attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières initié par l'Organisation des Nations Unies (ONU) qui doit être adopté les 10 et 11 décembre 2018 au sommet de Rabat.
Depuis le début de l'année 2018, plus de 2 200 personnes sont décédées en tentant de traverser la Méditerranée pour chercher protection et espoir de mieux vivre.
La responsabilité de la France est d'accueillir les migrants, sans distinction, avec dignité et dans le respect de leurs droits fixés par des conventions et des traités internationaux trop souvent oubliés ou détournés.
Force est de constater que, face à l'urgence humanitaire, la France a préféré, par le biais de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie, réduire le droit d'asile et faciliter les expulsions des déboutés sans prendre en compte le droit international.
À l'inverse, le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières, structuré autour de 23 objectifs, tend à mettre en place des voies légales sécurisées, même s'il ne prévoit aucune contrainte auprès des États, ce qui laisse présager de son inutilité finale.
Alors que les États-Unis ont rejeté ce pacte dès la fin de l'année 2017, et que des pays européens tels que l'Autriche, la Hongrie, la Pologne et l'Italie suivraient le pas, les Français ont le droit de savoir ce que le Gouvernement compte faire. L'enfermement des mineurs, les expulsions, le non-respect du droit international doivent cesser.
Il souhaite savoir quels engagements la France va prendre pour respecter et faire respecter ce pacte car notre pays a une responsabilité particulière dans la mise en œuvre d'une politique hospitalière à l'égard des migrants et des réfugiés.

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 25/04/2019

Le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières a été adopté le 10 décembre 2018 à Marrakech et définitivement endossé par une résolution de l'Assemblée générale de l'ONU le 19 décembre 2018, avec 152 votes pour, 5 votes contre et 12 abstentions. La France a soutenu l'adoption de ce texte, dans la mesure où il représente une contribution importante en vue d'une meilleure gestion des flux migratoires à l'échelle internationale. En effet, partant du principe qu'aucun État ne peut gérer seul le défi des migrations, ce Pacte vise à encourager une coopération renforcée dans le domaine migratoire et repose sur le principe de la responsabilité partagée entre pays d'origine, de transit et de destination pour mettre fin aux flux migratoires anarchiques et assurer des migrations sûres, ordonnées et régulières. Parmi les points forts du Pacte, à cet égard figurent notamment le renforcement de la lutte contre le trafic de migrants et la traite des êtres humains, ainsi que de la lutte contre la migration irrégulière, de façon à éviter les décès au cours des trajets migratoires et sauver des vies en mer et ailleurs. Ces objectifs, qui font partie des priorités de la France, ainsi que de nombreux autres pays, qu'ils soient d'origine, de transit et/ou de destination. C'est pourquoi le Pacte est soutenu par une large majorité de la communauté internationale, même si certains États ont décidé de se mettre en retrait. Face à la tragédie des décès de migrants en Méditerranée, le Pacte mondial sur les migrations peut inciter les Etats à renforcer et mutualiser leurs efforts pour éviter que de tels drames se produisent. Il insiste sur la responsabilité partagée de tous les États - d'origine, de transit et de destination - en faveur de migrations sûres, ordonnées et régulières, et les invite à agir de différentes façons pour mettre fin à des situations qui menacent la vie, la sûreté et la dignité des migrants. Il n'est évidemment qu'un élément de la réponse à ces drames, mais il peut aider à y faire face. Dans cette perspective, le Pacte fixe expressément comme un de ses principaux objectifs de prévenir les décès au cours des parcours migratoires, de sauver des vies et de répondre au phénomène des migrants disparus. Une large partie du Pacte est en outre dédiée à la coopération en matière de lutte contre le trafic de migrants et la traite des êtres humains, et il traite des formes contemporaines d'esclavage. Les États s'engagent ainsi à mettre en place un arsenal juridique robuste, parfois inexistant pour l'heure dans certains pays, afin de sanctionner effectivement les trafiquants. Ils s'engagent aussi à coopérer en matière d'enquête et de poursuite et à mieux assurer la protection des victimes. L'adoption du Pacte n'aura pas d'impact sur notre souveraineté nationale. Au contraire, la souveraineté des États en matière de politique migratoire est réaffirmée dès le Préambule. Elle est même élevée au rang de « principe directeur » du texte. Ainsi, le texte invite les États à mettre en œuvre les instruments de politique publique proposés « en tenant compte des différentes réalités nationales, politiques, priorités et conditions pour l'entrée sur le territoire, les conditions de résidence et de travail, en conformité avec le droit international ». Par conséquent, rien dans le Pacte ne contraindra la France à mettre en œuvre telle ou telle action proposée par le Pacte qui ne serait pas compatible avec sa législation ou ses politiques publiques telles que définies démocratiquement. En revanche, comme pour de nombreux pactes internationaux, la mise en œuvre du Pacte par les États fera l'objet d'un suivi, sur une base interétatique, via une conférence internationale organisée tous les quatre ans et un suivi annuel. Ceci permettra un dialogue régulier entre États sur le sujet des migrations et créera une dynamique en vue d'une meilleure coopération internationale.

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