Question de M. LECONTE Jean-Yves (Français établis hors de France - SOCR) publiée le 09/01/2020

Question posée en séance publique le 08/01/2020

M. Jean-Yves Leconte. Ma question s'adresse à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes.

Le 3 janvier dernier, une opération militaire décidée par le président des États-Unis d'Amérique tuait le général Qassem Soleimani sur le territoire irakien. La mort de ce chef militaire et responsable politique iranien, par ses circonstances et par ce qu'elle représente, est un vecteur de nouveaux risques et drames dans la région. Elle alimente la spirale des vengeances, chacun trouvant dans les actes de son adversaire la justification de ses engagements.

Les conséquences sont graves. La diplomatie visant à lutter contre la prolifération nucléaire, dont l'accord de 2015 était un aboutissement exigeant, en particulier grâce à l'action de Laurent Fabius, est décrédibilisée.

L'Iran, qui avait été le théâtre d'une répression violente, inouïe, de l'expression de son peuple en décembre, voit les éléments les plus extrêmes se renforcer dans le pays. Enfin, la réaction du Parlement irakien remet en cause les conditions de la présence de la coalition internationale de lutte contre l'État islamique, car la présence d'armées étrangères n'est plus souhaitée par les autorités du pays.

Madame la secrétaire d'État, permettez-moi de vous poser plusieurs questions à ce sujet. Les États-Unis avaient-ils informé le gouvernement français de leur action du 3 janvier et de leurs objectifs ? Comment pourrions-nous être solidaires de ce pays s'il ne l'a pas fait ?

Les conditions de la lutte contre l'État islamique, ainsi que la situation des terroristes et de leurs familles restées en Irak, sont profondément modifiées après cette action et la réaction des autorités irakiennes. Comment ces préoccupations peuvent-elles être prises en compte désormais ?

Notre engagement, dans ces circonstances nouvelles, sera-t-il soumis au Parlement ? Comment pouvons-nous considérer les États-Unis comme des partenaires dans la lutte antiterroriste après ces dernières semaines ?

Enfin, à la lumière de ce qui s'est passé ces dernières heures, quelles mesures sont prises pour assurer la sécurité de nos ressortissants dans la région, ceux qui y vivent et ceux qui y voyagent ? (Applaudissements sur les travées du groupe SOCR.)


Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes publiée le 09/01/2020

Réponse apportée en séance publique le 08/01/2020

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée des affaires européennes.

Mme Amélie de Montchalin, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargée des affaires européennes. Monsieur le sénateur, je m'efforcerai de répondre à vos questions en reprenant les éléments que j'ai déjà pu évoquer aujourd'hui.

Non, nous n'avons pas été informés, puisqu'il s'agit d'une décision américaine prise sur la base d'éléments de sécurité nationale. Il s'agit donc d'une initiative dont les États-Unis ont la responsabilité.

Je l'ai dit à M. Pierre Laurent, la solidarité que j'ai évoquée est celle que nous devons à nos alliés de la coalition contre Daech. S'ils sont visés, nous sommes solidaires. Chacun peut le comprendre, nous sommes, à la demande des autorités irakiennes, dans une coalition réunissant plus de 70 partenaires et organisations internationales, engagés contre Daech en Syrie et en Irak. Nous avons pu mettre fin au califat territorial et arrêter la campagne de reprise de territoires que souhaitaient les terroristes. Certes, nous le savons, la menace reste extrêmement forte. Nous devons donc rester extrêmement mobilisés. Dans ce cadre, nous cherchons à maintenir vivante la coalition contre Daech.

Dans les jours qui viennent, nous aurons un dialogue avec les autorités irakiennes, afin de préserver leur souveraineté. Les échanges que M. Jean-Yves Le Drian a pu avoir avec le Premier ministre irakien montrent bien que la lutte contre le terrorisme reste une priorité pour tous. Sa présence aujourd'hui en Égypte contribue d'ailleurs à trouver les voies et moyens pour poursuivre avec tous les acteurs régionaux la lutte contre le terrorisme.

Nos alliés sont à nos côtés pour mener cette lutte contre le terrorisme et pour lutter contre la prolifération nucléaire. Ces deux priorités sont essentielles pour la France, qui reste pleinement mobilisée sur ces sujets.

Quant à la sécurité de nos ressortissants, qu'ils soient civils ou militaires, nous avons engagé dès vendredi dernier, je l'ai dit, un plan sur le terrain. Les mesures ont été renforcées en Iran et en Irak au cours des dernières heures et nous suivons la situation très attentivement. À mes yeux, la clé est la réunion exceptionnelle qui se tiendra vendredi à Bruxelles, avec tous les ministres européens des affaires étrangères réunis autour de Josep Borrell, pour chercher la voie de la désescalade, de la lutte contre la prolifération nucléaire et du maintien d'une coalition forte contre le terrorisme.

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