Question de Mme JASMIN Victoire (Guadeloupe - SOCR) publiée le 05/03/2020

Mme Victoire Jasmin attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la prise en charge des patients atteints de la drépanocytose au sein de l'archipel guadeloupéen.

Cette maladie, classée comme priorité de santé publique, touche plus de 20 000 personnes en France. C'est la première maladie rare. La moitié des personnes atteintes résident dans la zone Antilles-Guyane.
Même s'il est vrai que ces dernières années les progrès en matière de prévention et de prise en charge ont été considérables, il n'en demeure pas moins qu'en Guadeloupe cette maladie concerne une personne sur huit et 1 500 grossesses (à risques) chaque année.

Près de deux ans après le lancement du troisième plan maladies rares 2018-2022, elle s'interroge sur les réelles mesures mises en œuvre pour la prise en charge des patients atteints de cette pathologie au sein de ce territoire et plus précisément pour les patients vivant en Basse-Terre et dans les îles du sud.

En effet, le centre hospitalier de Basse-Terre (CHBT) classé de 2006 à 2017 centre de référence a été déclassé en centre de compétence en 2017, entraînant de facto une baisse des crédits alloués à l'établissement pour l'accompagnement des patients, et une réorganisation du service.

Dans l'actuelle crise que le territoire traverse depuis l'incendie du centre hospitalier universitaire de Pointe-à-Pitre en novembre 2017, et en dépit des aménagements et restructurations opérés, cette décision de déclassement doit faire l'objet d'une nouvelle étude pour répondre aux difficultés inédites traversées.

Cette nouvelle labélisation conjuguée à la désorganisation du système de soins a conduit à une inégalité de traitement dans la prise en charge des patients résidants en Grande-Terre qui peuvent se rendre dans un centre de référence au CHU de pointe- à-pitre et ceux vivant en Basse-Terre et dans les îles du sud.

Au moment même ou le Gouvernement prône pour une prise en charge de proximité et que les objectifs affichés par le plan maladies rares déclinés en onze objectifs prévoient notamment de : réduire l'errance et l'impasse diagnostiques ; promouvoir l'accès au traitement dans les maladies rares ; améliorer le parcours de soins ; faciliter l'inclusion des personnes atteintes de maladies rares et leurs aidants...

Elle se demande ce qu'il en est réellement dans les territoires d'outre-mer et plus singulièrement en Guadeloupe.

Elle souhaite également insister sur la grande souffrance qu'engendre cette maladie et le désarroi dans lequel bien trop souvent les proches et les aidants sont plongés pour souligner à quel point il est éprouvant pour les Guadeloupéens d'accéder à un service de soins de qualité et de proximité.

Elle demande au Gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour garantir l'équité de traitement de tous les Guadeloupéens face à cette maladie et d'opérer une déclinaison adaptée des orientations nationales du troisième plan maladies rares.

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Transmise au Ministère des solidarités et de la santé


Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 03/09/2020

La drépanocytose est une maladie héréditaire de l'hémoglobine (chaine bêta de l'hémoglobine anormale dite hémoglobine S - HbS). Comme le rappelle l'honorable parlementaire, cette maladie rare est la plus fréquente en France. Actuellement, la prise en charge de la drépanocytose vise à réduire la survenue et la sévérité des symptômes et des complications via un suivi médical régulier, (vaccinations spécifiques, traitement médicamenteux,) transfusion sanguine, voire échanges transfusionnels si besoin. Réservée aux formes très sévères de la maladie, la greffe de moelle osseuse est le seul traitement véritablement curateur à ce jour. 40 % des nouveaux nés sont dépistés chaque année à la naissance, permettant de prévenir partiellement les complications et de les diminuer en fréquence et intensité. Il est systématique dans les départements et régions d'outre-mer. Il existe en France des centres de référence experts labellisés lors du 1er Plan National Maladie Rares de 2005 pour la prise en charge des patients drépanocytaires. La filière de santé MCGRE (maladies constitutionnelles rares du globule rouge et de l'érythropoïèse), créée en 2014 et coordonnée par le Pr Frédéric Galacteros, regroupe les centres de référence et de compétences maladies rares (CRMR/CCMR) des Syndromes drépanocytaires majeurs, thalassémies et autres Pathologies rares du globule rouge et de l'érythropoïèse. Elle a été renouvelée en juin 2019 pour 4 ans. Cette filière de santé maladies rares MCGRE fédère 2 centres de référence coordonnateurs, dont l'un situé en Guadeloupe, 13 centres de référence constitutifs repartis dans l'hexagone et en outre-mer, 45 centres de compétences, également répartis sur tout le territoire français. Une attention particulière est portée par la filière de santé afin de favoriser une meilleure homogénéité de prise en charge sur tout le territoire français, notamment dans les territoires ultramarins. Le troisième Plan national maladies rares (PNMR 3), porté par le ministère des solidarités et de la santé et le ministère de la recherche et de l'innovation, lancé le 4 juillet 2018, a pour objectif de renforcer les recommandations de bonnes pratiques de diagnostic et de soins. La prise en charge des maladies rares en outre-mer, notamment en Guadeloupe, a été soulignée comme une priorité. En 2017, sur les 387 centres de référence labellisés, 91 centres de référence se situent en outre-mer. Le réseau Guadeloupéen est un acteur majeur avec 21 centres experts maladies rares. Afin de dépasser les difficultés, la prise en charge de la drépanocytose, dans les régions ultramarines, s'appuie sur l'essor de la télémédecine. Une coordination accrue des experts locaux et le renforcement des liens au sein des départements et régions d'outre-mer (DROM) et, entre les DROM et l'hexagone se renforcent. La formation est également un élément essentiel pour réduire les iniquités territoriales et assurer que toutes les familles aient un parcours de soin bien défini et harmonisé. La filière MCGRE a prévu lors de sa dernière labellisation en 2018 de faciliter la mise à disposition de certaines formations sous forme de modules vidéo plus accessibles pour les participants issus de territoires distants. La filière favorise cette dynamique notamment pour les CCMR. Ces actions concernent aussi les médecins généralistes, en leur ouvrant ces ateliers via des formations annuelles thématiques pratiques. Il a été décidé en 2019 de donner un financement à la filière pour des actions de formation sur les territoires ultramarins. Cette action sera reconduite cette année. Par différents appels à projets, le PNMR 3 aide concrètement ces territoires : En 2019, l'appel à projets « plateforme de coordination en outre-mer » a été lancé. Ainsi, l'établissement de santé porteur et siège d'une plateforme de coordination d'Outre-mer est financé sur toute la durée du plan. Ces plateformes de coordination en outre-mer seront chargées d'assurer : (i) les liens entre l'outre-mer et les CRMR correspondants en métropole ; (ii) les conditions de recours à la télémédecine ; (iii) les conditions d'une première réponse locale et (iv) d'évaluer les conditions de l'accompagnement global proposé aux personnes malades vivant dans ces territoires. Une plateforme de coordination outre-mer a été financée et mise en place fin 2019 en Guadeloupe. Le jury a souligné la qualité du projet et a validé ce nouveau dispositif. Le financement est délégué en plus du financement du CRMR du Dr Maryse Eienne-Julan. Il permettra de soutenir les autres centres de la Guadeloupe notamment les patients suivis dans le centre hospitalier de Basse-Terre. En outre, conformément à l'action 7.3 « Faciliter l'accès à l'éducation thérapeutique du patient », un appel à projets pour la production de programmes d'éducation thérapeutique du patient (ETP) pour les maladies rares a été lancé le 20 août 2019. Il s'agit de favoriser l'accès à l'éducation thérapeutique pour renforcer l'autonomie et la capacité à agir des personnes atteintes d'une maladie rare ainsi que celle de leur proche, leur donnant ainsi un rôle actif pour améliorer le parcours de santé et médico-social. Pour la drépanocytose, la filière MCGRE a déposé un dossier « ETP à destination des patients atteints de drépanocytose : enfants, leurs parents et fratrie ainsi que les patients adultes et leurs aidants ». Celui-ci a été retenu par le jury. Ce programme ne pourra qu'aider les patients habitant en Guadeloupe. Cet appel à projets est renouvelé cette année. Il est dorénavant ouvert aux centres de compétences maladies rares. Enfin, le réseau maladies rares en Guadeloupe bénéficie du travail effectué au sein du « Groupement d'Intérêt Public- Réseaux et Actions de Santé Publique En Guadeloupe, à Saint-Martin, et Saint- Barthélemy » (GIP-RASPEG). Il assure la gestion administrative et financière, la gestion des moyens organisationnels et logistiques permettant la mise en œuvre des objectifs et missions pour les réseaux de santé, le parcours des patients et autres actions de santé publique. Le GIP RASPEG regroupe les réseaux de santé de la Guadeloupe et organise une plate-forme territoriale d'appui aux professionnels de premiers recours (PTA) (https://www.gip-raspeg.fr/presentation/qui-sommes-nous-13-3.html). La PTA a pour vocation d'aider le médecin traitant à la recherche de solutions concrètes dans la prise en charge et l'accompagnement des patients en situation complexe ; le but étant d'assurer un parcours de soins sans rupture. L'ensemble de ces actions permet de prendre les mesures nécessaires pour garantir l'équité de traitement de tous les Guadeloupéens face à la drépanocytose et d'opérer une déclinaison adaptée des orientations nationales du troisième plan maladies rares au bénéfice des patients.

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