Question de M. DÉTRAIGNE Yves (Marne - UC) publiée le 05/03/2020

M. Yves Détraigne souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur le rapport, rendu en février 2020 par la Cour des comptes, sur l'opacité qui entoure les critères de sélection des lycéens dans « parcoursup », plateforme d'admission post-bac pour l'entrée dans les études supérieures.
En effet, après un an d'enquête sur les pratiques des universités, les rapporteurs de la Cour des comptes demandent que soient rendus publics les algorithmes locaux utilisés par les commissions d'examen, et ce, pour l'ensemble des formations.
Ils considèrent que le fonctionnement de ces commissions est marqué par une forte hétérogénéité, et jugent que les classements sont de plus en plus automatisés et leurs paramètres parfois contestables.
Le rapport de la Cour demande également une anonymisation du lycée d'origine et que soit introduit un critère plus objectif fondé sur l'écart de notations existant dans un établissement entre la moyenne au contrôle continu en terminale et les résultats obtenus au baccalauréat.
Considérant que ces observations négatives s'ajoutent à celles déjà formulées par les syndicats du supérieur, le Défenseur des droits et les parlementaires, il est souhaitable de remédier au défaut de transparence soulevé par le fonctionnement de la plateforme d'admission post-bac pour l'entrée dans les études supérieures des lycées.
Par conséquent, il lui demande de quelle manière il entend remédier à l'opacité du processus de classement des dossiers des candidats et répondre aux propositions d'évolutions faites par la Cour des comptes.

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Transmise au Ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation


Réponse du Ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation publiée le 26/11/2020

La transparence constitue un des objectifs de la loi n° 2018-166 relative à l'orientation et la réussite des étudiants (ORE) du 8 mars 2018 dont le Conseil constitutionnel a reconnu par une décision n° 2020-834 QPC du 3 avril 2020 la conformité à la Constitution. Comme le prévoit ladite loi, le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation (MESRI), rend public le code informatique du cœur algorithmique de la plateforme Parcoursup, utilisé pour déterminer quotidiennement les propositions d'admission qui sont transmises aux candidats via Parcoursup. La publication du code et de ses mises à jour permet à chacun de vérifier que le fonctionnement de la plateforme est conforme au droit. Elle favorise également la pleine compréhension des mécanismes de la procédure d'entrée dans l'enseignement supérieur : non hiérarchisation des vœux, liberté des choix ; prise en compte des objectifs légaux de démocratisation et de mobilité ; délais de réponse qui permettent, lorsque chaque candidat fait son choix, de libérer des places qui seront immédiatement proposées à d'autres candidats. Le code en version « open source », accompagné d'une présentation des algorithmes est accessible sur le dépôt https://framagit.org/parcoursup/algorithmes-de-parcoursup. Il est également disponible, ainsi que le cahier des charges de l'application Parcoursup sur le site public du ministère. Le comité éthique et scientifique de Parcoursup, dans son rapport remis au Parlement en 2019, a d'ailleurs porté une appréciation positive sur cette démarche. Il a en effet estimé que « la description textuelle de l'algorithme général [ainsi] rendue publique est à la fois scientifiquement précise et très bien écrite. Les choix techniques d'implémentation fait par les concepteurs dudit algorithme sur des points non explicitement précisés par les spécifications initiales – concernant par exemple la façon d'interclasser les boursiers, les candidats non-résidents dans le ressort d'une académie ainsi que les candidats à l'internat – sont notamment très bien explicités, argumentés et illustrés dans le document publié. Cette description de l'algorithme est adaptée aux besoins d'analyse par des spécialistes, mais aussi par toute personne ayant une formation mathématique et informatique de niveau raisonnable dont les professeurs de lycée enseignant en informatique ». Concernant l'examen des candidatures, qui relève de la responsabilité de chacune des formations, la plateforme Parcoursup exige de chacune d'elles de porter à la connaissance de tous les candidats potentiels, dès l'ouverture de la plateforme, d'une part les attendus de la formation, qui peuvent être nationaux et/ou locaux, et, d'autre part, les critères généraux d'examen des vœux. Dans chaque établissement, une commission d'examen des vœux, composée de professionnels et dont la composition est arrêtée par le chef d'établissement, a pour mission de définir concrètement les modalités et critères d'examen des vœux, dans le cadre des critères généraux d'examen publiés. L'examen de chaque candidature ne repose pas sur un traitement entièrement automatisé : les outils d'analyse ms à leur disposition ne sont que des outils d'aide à la décision. Pour accompagner les formations à satisfaire leurs obligations, le MESRI a produit des notes de cadrage et des séminaires qui sont publics et mis en ligne. Ces ressources s'attachent à valoriser l'examen attentif et bienveillant des candidatures, à rappeler les exigences légales de transparence, d'égalité de traitement et de non-discrimination. Chacune de formations est notamment tenue d'approuver la « charte de la procédure nationale de préinscription Parcoursup », qui rappelle ces principes et les bonnes pratiques, avant de pouvoir proposer des formations. La loi susvisée garantit par ailleurs la faculté de tout candidat qui n'est pas retenu de pouvoir solliciter auprès des formations des informations concernant les critères ainsi que les motifs pédagogiques qui justifient la décision prise à leur égard (dernier alinéa du I de l'article L. 612-3 du code de l'éducation). Ce droit est garanti par la plateforme Parcoursup qui le rappelle à tout candidat non retenu et lui précise les modalités pour solliciter les formations. En revanche, la loi ORE, validée par le Conseil constitutionnel, permet à ces commissions d'examen de ne pas révéler la totalité des documents, et y compris d'éventuels traitements algorithmiques, qui lui servent à examiner les candidatures. Ainsi, contrairement à l'analyse de la Cour des comptes, le Conseil constitutionnel a rappelé dans sa décision susmentionnée que la protection du secret des délibérations des équipes pédagogiques constituait un motif d'intérêt général, qui vise à assurer l'indépendance de ces équipes pédagogiques et l'autorité de leurs décisions. Pour autant, afin de favoriser l'information des tiers, le Conseil constitutionnel a également jugé qu'il était nécessaire qu'à l'issue de la procédure nationale de préinscription et dans le respect de la vie privée des candidats, chaque établissement puisse, le cas échéant sous la forme d'un rapport, assurer la publicité des critères en fonction desquels les candidatures ont été examinées en précisant, le cas échéant, dans quelle mesure des traitements algorithmiques ont été utilisés pour procéder à cet examen. Dans le prolongement de l'esprit de la loi visée et des initiatives prises pour renforcer la transparence de la procédure d'accès à l'enseignement supérieur, le MESRI accompagne l'ensemble des formations de manière à ce que ce rapport puisse être établi dès cette année par chacune des formations à l'issue de la procédure. Enfin, s'agissant de la référence au lycée d'origine, il est rappelé que le Défenseur des droits n'a pas relevé lors de son instruction de cas de discrimination. Dans le travail conduit avec les formations, le ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation veille à rappeler que sont proscrites les distinctions fondées notamment sur l'origine géographique. Enfin, l'outil d'aide à la décision mis à la disposition des commissions d'examen des vœux par le ministère ne permet pas d'appeler automatiquement un tel critère. Le maintien de la référence au lycée du candidat dans la fiche avenir répond à la volonté unanime des formations d'enseignement supérieur de disposer d'informations sur l'environnement scolaire du candidat, afin notamment de ne pas déstabiliser les actions entreprises au sein des cordées de la réussite, qui concernent près de 80 000 candidats par an, ainsi que les différents dispositifs de partenariat mis en place par les établissements scolaires accueillant des élèves de milieu modestes et les établissements ou formations de l'enseignement supérieur.

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