Question de Mme de LA PROVÔTÉ Sonia (Calvados - UC) publiée le 12/03/2020

Mme Sonia de la Provôté attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la situation compliquée des pêcheries de la côte ouest du Cotentin.

Les habitants de cette côte qui s'étend du Mont-Saint-Michel au Cap de Carteret, pratiquent la même technique de pêche depuis toujours. Il s'agit d'un aménagement en bois ou en pierre, construit sur l'estran et positionné sur les couloirs de déplacement des poissons à deux ou trois kilomètres du rivage. Les pêcheries comportent une enceinte en forme d'entonnoir, en vue d'un établissement perpétuel, restant à sec à marée basse. Poissons, crustacés et céphalopodes se font piéger dans une mare creusée par les pêcheurs, qui se présentent ensuite pour récupérer leur pêche.

Malheureusement la pêcherie traditionnelle tend aujourd'hui à disparaître. Au XVIIIe siècle, on comptait 140 pêcheries exploitées contre cinq désormais.

Ces pêcheries sont aujourd'hui menacées car leur exploitation est notamment entravée par une réglementation qui ne les considère pas comme des engins de pêche. L'ancienneté de leur exploitation devrait pourtant y conduire.

L'administration oppose souvent son véto à la capture de certaines espèces. Pourtant, cette technique de pêche est respectueuse de la nature et des poissons, tant par la modicité des prélèvements que par le fait qu'elle laisse à la mer les individus les plus petits. Un étude réalisée par l'institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER) confirme que le prélèvement des pêcheries est sans incidence sur le stock de poissons.

Ces obstacles amènent de nombreux pêcheurs à abandonner leur exploitation.

Ces pêcheries traditionnelles sont en outre un vrai facteur d'attractivité touristique sur cette côte. Avec la fin de cette activité, le risque est donc important de voir disparaître totalement une partie de notre patrimoine culturel et maritime.

Elle lui demande de permettre la sauvegarde de ces pêcheries traditionnelles qui fondent le patrimoine maritime et culturel de la côte ouest du Cotentin.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 18/06/2020

Les pêcheries et écluses à poissons qu'elles soient en bois ou en pierre participent, avec les nombreuses autres richesses du Cotentin, à l'attractivité du territoire. Ces pratiques sont néanmoins très encadrées, à la fois par le code rural et par le code général de la propriété des personnes publiques. L'article D. 922-19 du code rural et de la pêche maritime (CRPM), pose le principe général de la gestion des pêcheries ou d'écluses à poisson, à savoir l'interdiction de création et de renouvellement de pêcheries ou d'écluses à poissons en bois, en pierre, en maçonnerie, ou tout autre matériau. À titre dérogatoire, le renouvellement de pêcheries ou d'écluses à poissons peut être autorisé (article D. 922-20 du CRPM). L'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques prévoit que nul ne peut occuper une dépendance du domaine public sans titre l'y habilitant. Les pratiques de pêche consistant à l'aménagement de barrages fixés sur l'estran en bois ou en pierre constituent une occupation du domaine public maritime, et sont donc soumis à la détention d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public maritime, qui présente un caractère précaire et révocable (L. 2122-3 du code général de la propriété des personnes publiques). Pour autant, la délivrance d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public maritime n'est pas automatique, et peut être soumise à un ensemble de conditions et obligations jugées nécessaires par le préfet de département. Celui-ci pourrait par exemple autoriser l'utilisation de certaines de ces pêcheries pour maintenir la pratique culturelle et l'attractivité touristique, mais tout en imposant de laisser l'exutoire ouvert afin de diminuer la mortalité, notamment chez les jeunes poissons. Cette configuration permettrait alors de concilier le maintien de l'attractivité du territoire généré par ces pratiques, tout en ayant un impact limité sur la ressource halieutique. Les conséquences des prélèvements de la pêche de loisir sur la ressource doivent être mieux évaluées et les efforts pour la collecte de ces données doivent donc se poursuivre. 

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