Question de Mme ROSSIGNOL Laurence (Oise - SOCR) publiée le 09/04/2020

Mme Laurence Rossignol attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la nouvelle crise qui s'annonce dans la crise sanitaire actuelle : la pénurie de médicaments essentiels pour les patients en réanimation, que cela soit suite à une infection au Covid-19 ou pour les personnes souffrant d'autres pathologies. Les conséquences de ces pénuries sont lourdes : le risque est que de nombreuses personnes actuellement dans un état grave ne décèdent, que les personnes actuellement en fin de vie, vivant avec des pathologies lourdes et des douleurs chroniques ne puissent se voir répondre à leurs besoins médicaux ou obtenir le soulagement de leurs souffrances.

Les pénuries qui vont se déclarer dans les hôpitaux ont été largement documentées et les responsables hospitaliers ont lancé l'alerte. La politique du médicament ne doit pas être un angle mort des actions menées, elle représente des enjeux sanitaires et financiers considérables.

M. le Premier ministre a répondu avoir confiance dans l'existant et répondre aux besoins des hôpitaux se trouvant dans des situations de manque. Mais si la pénurie touche l'ensemble du territoire, comment y répondre ? Il est plus que nécessaire d'agir dès maintenant, c'est-à-dire d'anticiper correctement, pour que cette situation ne devienne pas dramatique. Si aujourd'hui il s'agit « uniquement » d'une situation de tension et non de pénurie, les devants doivent cependant être pris. En effet, c'est lorsque la pénurie de médicaments vitaux est visible à l'horizon, comme pour celles des masques, qu'il faut y répondre, non une fois que celle-ci est enclenchée et hors de contrôle.

En dehors des crises sanitaires, le système de production de médicaments conduit d'ores et déjà à des pénuries dites « normales » (depuis dix ans, la fréquence des pénuries de médicaments a été multipliée par dix et un Français sur quatre y a déjà été confronté). Il s'agit de pénuries de médicaments essentiels : vaccins, antibiotiques, contraceptifs, antiparkinsoniens, anticancéreux. L'accroissement de la demande aggrave progressivement le décalage entre les médicaments disponibles et les besoins réels.

Ces pénuries ont des conséquences sanitaires dangereuses et elles représentent un coût pour notre système de santé. Pour beaucoup d'entre elles, elles sont liées aux délocalisations des unités de production des principes actifs : 80 % de ces principes actifs sont fabriqués en dehors d'Europe, contre 20 % il y a trente ans. Ces dernières semaines ont mis à jour l'importance de la localisation et du contrôle des unités de production de médicaments dans de nombreux pays, dans lesquels les carences en matière de production de médicaments ont renforcé l'insécurité sanitaire.

Elle lui demande si Gouvernement est prêt à réquisitionner les stocks et les unités de production, et à reprogrammer les productions en favorisant les médicaments essentiels en tension.
Il s'agit de permettre aux pouvoir publics de décider : ce que la France produit, où, quand, quelle quantité afin de répondre aux besoins des populations et non du marché. De plus, seuls les pouvoirs publics, dans un travail coordonné avec les différents acteurs, sont à même d'avoir une vision d'ensemble des besoins en médicaments. Il est ici question de produits de santé, c'est-à-dire de besoins relevant du domaine public : leurs productions doivent alors également relever de ce domaine. En plus de mieux répondre aux besoins et de lutter contre les pénuries, l'État se doterait d'un levier permettant de faire baisser les prix des médicaments puisqu'il n'y aurait aucun besoin de réaliser des profits mais uniquement de rembourser les coûts de production. Cela aurait donc des effets bénéfiques sur le budget de la sécurité sociale.

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Transmise au Ministère de la santé et de la prévention


La question est caduque

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