Question de M. JACQUIN Olivier (Meurthe-et-Moselle - SOCR) publiée le 23/04/2020

M. Olivier Jacquin attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances au sujet de la réforme de la fiscalité locale et de la suppression progressive de la taxe d'habitation. Les collectivités locales sont en première ligne pour lutter contre le Covid-19, augmentant leurs dépenses, tandis que s'accentue le risque de dégradation de leurs recettes en raison de la récession. Aussi, il lui demande quelles seront les mesures de soutien qui accompagneront les finances des collectivités dans cette crise et après, et si le Gouvernement prévoit d'assouplir le contrôle sur leurs dépenses lors de la période de relance de l'économie.
Dans ce contexte incertain, la mise en œuvre de la réforme de la fiscalité locale n'a pas de caractère d'urgence et peut être repoussée, comme les autres réformes évoquées par le Président de la République le 16 mars. Cette réforme prévoit la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales pour le bloc communal et le transfert de la taxe foncière des départements aux communes. Pour les intercommunalités et les départements, les pertes de recettes seront compensées par l'affectation d'une recette dynamique sous la forme d'une fraction de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) nationale. Or, la crise actuelle montre que les recettes de TVA sont sujettes à des variations conjoncturelles, y compris à la baisse. Il demande comment, dans ces conditions, seront garanties aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et aux départements une compensation intégrale et une évolution dynamique des recettes.
Les élus locaux ont besoin d'un levier fiscal local dont ils sont responsables et qui contribue à l'autonomie financière de leur commune. L'habitant, et électeur, doit également être un contributeur local, et non seulement un « consommateur de service public ». C'est une question démocratique : le niveau de fiscalité locale doit rester un indicateur du niveau de service public, nécessairement corrélé à la taille de la commune et à sa centralité. Il en va de la libre administration des collectivités, de leur autonomie fiscale et de leur autonomie de gestion.
L'absence de levier fiscal rend la tâche plus difficile pour les collectivités chargées de revitaliser les territoires ruraux et de développer de nouveaux services, mais également pour aller vers la transition écologique. De plus, asseoir une partie des recettes des collectivités sur un impôt dépendant du niveau de consommation des ménages est contradictoire avec les objectifs environnementaux de consommation raisonnée et de mode de vie durable. La lutte contre le changement climatique doit être la priorité absolue de cette décennie.
Il convient de garantir un niveau minimal de recettes à chaque commune – et à leurs groupements, dès lors qu'elle sollicite ses habitants dans la moyenne de sa strate (effort fiscal) et qu'elle dispose de trop faibles bases. Les écarts de richesses entre collectivités sont trop importants et appellent une meilleure régulation. Il s'agit d'une question de justice et d'égalité de traitement de nos concitoyens. Ainsi, la nouvelle taxe foncière se doit d'être progressive. On ne peut concevoir que le taux d'imposition appliqué soit identique pour une résidence principale et pour un placement immobilier. Enfin, une fiscalité juste doit être complétée par un système de dotation globale réellement péréquée entre toutes les collectivités, pour résoudre le problème de fonds des collectivités les plus pauvres
Ainsi, il lui demande les raisons pour lesquelles le Gouvernement entend poursuivre la réforme fiscale, plutôt que de saisir l'opportunité offerte par la crise de remettre à plat la fiscalité locale et de repenser les ressources fiscales propres aux collectivités, en constituant un nouvel acte de décentralisation et de confiance envers nos collectivités.

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Transmise au Ministère de l'économie, des finances et de la relance


Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la relance publiée le 21/01/2021

Conformément à l'engagement du Président de la République, l'article 16 de la loi n° 2019-1479 de finances pour 2020 prévoit la suppression de la taxe d'habitation (TH) sur les résidences principales pour l'ensemble des Français d'ici 2023, et dès 2020 pour 80 % des contribuables. Il s'agit d'un allègement massif de la pression fiscale sur les ménages. Le Gouvernement n'a pas l'intention de revenir sur cet allègement qui constitue un pilier important de la politique fiscale conduite depuis le début du quinquennat. Par ailleurs, compte tenu de la suppression de la TH sur les résidences principales, l'article 16 de la loi de finances précitée prévoit également une refonte du financement des collectivités territoriales. Le Gouvernement, particulièrement attentif au financement des collectivités territoriales, s'est engagé à assumer leur compensation intégrale en leur affectant des ressources dynamiques, et dans le respect des principes constitutionnels de libre administration et d'autonomie financière. Ainsi, dès 2021, la perte de ressources pour les communes sera compensée par le transfert, à leur profit, de la part départementale de taxe foncière sur les propriétés bâties. Au niveau local, afin de garantir à chaque commune une compensation à l'euro près, un mécanisme prenant la forme d'un coefficient correcteur, sera mis en place, pour neutraliser l'écart entre le produit de taxe d'habitation sur la résidence principale supprimée et le produit de la taxe foncière sur les propriétés bâties départementale transférée. Le dispositif est conçu afin d'assurer une évolution dynamique de la fiscalité en faveur des communes tout en leur permettant de continuer à bénéficier de l'effet de leur politique de taux. L'équilibre financier du dispositif sera garanti par le reversement par l'État d'une fraction de prélèvements pour frais de gestion des impositions locales. Pour les intercommunalités à fiscalité propre, la Ville de Paris et les départements, les pertes de recettes seront intégralement compensées par l'affectation d'une recette dynamique dans le temps, sous la forme d'une fraction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Compte tenu de ses modalités de calcul permettant de garantir un produit de TVA 2021 égal au produit 2020 des recettes avant réforme, l'affectation de TVA n'entrainera pas de perte de recettes pour les collectivités locales en 2021 par rapport à 2020. La loi prévoit également une clause de garantie afin que les départements ne perçoivent jamais un montant de TVA inférieur à celui perçu en 2021. Par ailleurs, les départements bénéficieront à compter de 2021 d'une fraction supplémentaire de TVA dont le montant, de 250 M€ en 2021, sera indexé chaque année sur la dynamique nationale de cette imposition. Cette fraction supplémentaire se substituera au fonds de stabilisation institué par l'article 261 de la loi de finances pour 2019. Elle sera divisée en deux parts à compter de 2022. Une première part de 250 M€ sera répartie entre les bénéficiaires en fonction de critères de ressources et de charges définis à l'article 208 de la loi de finances pour 2020 ; une seconde part, dont le montant sera augmenté chaque année de la dynamique de la TVA constatée sur ces 250 M€, sera affectée à un fonds de sauvegarde des départements. Ce fonds de sauvegarde sera mobilisé, le cas échéant, pour aider les départements confrontés à une dégradation soudaine de leur équilibre financier. Les conditions d'application de ces dispositions seront fixées par un décret en Conseil d'État. En tout état de cause, le Gouvernement ne souhaite pas retarder l'allègement massif de fiscalité en faveur des ménages. L'article 16 de la loi de finances précitée prévoit déjà une évaluation du dispositif en vue de son réexamen au cours de la troisième année suivant celle de son entrée en vigueur, et dont les résultats feront l'objet d'un rapport au Parlement qui pourra alimenter les débats parlementaires.

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