Question de M. RAPIN Jean-François (Pas-de-Calais - Les Républicains) publiée le 11/06/2020

M. Jean-François Rapin attire l'attention de M. le secrétaire d'État, auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports concernant la suspension du cabotage routier. Les acteurs du transport routier, et notamment l'organisation des transporteurs routiers européens (OTRE), réclament depuis plus d'un mois l'application de la clause de sauvegarde en application du règlement européen n° 93-3118 du 25 octobre 1993 relatif à l'accès au marché du transport routier. En ce contexte de crise sanitaire, deux inquiétudes majeures sont soulevées par les professionnels du secteur : tout d'abord, une inquiétude portant sur la santé économique des entreprises de transport routier. Celles-ci étant ralenties par les mesures de chômage partiel (81 % d'entre elles sont en arrêt total ou en très forte baisse d'activité), la reprise risque d'être lente et progressive. Il est donc « crucial » de leur garantir une activité minimale sans que celle-ci soit captée par des pavillons étrangers. Par ailleurs, la seconde inquiétude concerne les conditions sanitaires dans lesquelles exercent les entreprises étrangères lorsqu'elles transportent des marchandises sur le territoire national. Il apparaît que celles-ci ne seraient pas forcément aussi strictes que les mesures barrières respectées par les conducteurs français. Aussi, dans ce contexte, il demande au Gouvernement de saisir l'Union européenne afin de faire valoir la clause de sauvegarde et suspendre le cabotage pour une période de six mois.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire publiée le 17/06/2020

Réponse apportée en séance publique le 16/06/2020

M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin, auteur de la question n° 1215, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports.

M. Jean-François Rapin. Madame la secrétaire d'État, je souhaite aujourd'hui vous alerter sur une demande de suspension du cabotage routier.

En application du règlement européen du 25 octobre 1993 relatif à l'accès au marché du transport routier, les acteurs de ce secteur, notamment l'Organisation des transporteurs routiers européens (OTRE), réclament depuis deux mois l'application de la clause de sauvegarde.

Le Gouvernement ne semble pas encore s'être prononcé sur cette question.

Pourtant, en ce contexte de sortie de crise sanitaire, deux inquiétudes majeures sont soulevées par les professionnels du secteur.

Tout d'abord, une inquiétude portant sur la santé économique des entreprises de transport routier. Alors qu'elles sont ralenties par les mesures de chômage partiel – 81 % d'entre elles sont en arrêt total ou connaissent une très forte baisse d'activit頖, la reprise est lente et progressive. Il est donc crucial de leur garantir une activité minimale sans que celle-ci soit captée par des pavillons étrangers.

Par ailleurs, la seconde inquiétude concerne les conditions sanitaires dans lesquelles exercent les entreprises étrangères lorsqu'elles transportent des marchandises sur le territoire national. Il apparaît que celles-ci ne seraient pas forcément aussi strictes que les mesures barrières respectées par nos conducteurs français.

Ainsi, ma question est simple : quelle est la position du Gouvernement sur le sujet et celui-ci a-t-il prévu de saisir l'Union européenne afin de faire valoir la clause de sauvegarde et, donc, de suspendre le cabotage pour une période de six mois ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique et solidaire. Monsieur le sénateur Jean-François Rapin, en ce qui concerne la suspension du cabotage routier, la désorganisation actuelle de l'économie a atteint la plupart des activités économiques, dont le transport routier de marchandises. Ainsi, dès le début de la crise, le Gouvernement a engagé un dialogue approfondi avec les représentants de ce secteur stratégique.

Je veux réaffirmer devant vous que la nécessité d'accompagner ce secteur est totalement partagée par le ministère que je représente aujourd'hui. Le transport de marchandises a démontré son rôle majeur pour l'économie française lors de cette crise sanitaire et la reprise progressive de l'activité économique ne doit bien évidemment pas se faire au détriment de ces professionnels.

Un plan ambitieux de soutien décline des dispositions pour toutes les entreprises : report de cotisations sociales et de charges fiscales, voire annulation pour les entreprises les plus fragilisées ; engagement de la Banque publique d'investissement (Bpifrance) en matière de soutien à la trésorerie et de garantie de prêts bancaires ; ou encore aides directes via un fonds de solidarité pour les petites entreprises.

À ces mesures, qui concernent toutes les entreprises françaises, s'ajoute un soutien spécifique au secteur du transport routier avec plusieurs dispositions visant à améliorer leur trésorerie.

Ainsi, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) sera remboursée chaque trimestre en 2020, et non plus chaque semestre. C'est un apport immédiat de 300 millions d'euros. En outre, l'échéance de 2020 de la taxe sur les véhicules routiers, qui doit normalement être payée au plus tard le 1er septembre de cette année, est reportée de trois mois, ce qui soulagera les entreprises de 90 millions d'euros.

Nous n'ignorons pas que certaines pratiques abusives, comme le cabotage systématique, contribuent à une concurrence déloyale dans un contexte déjà très difficile. Ce n'est pas tant le cabotage en lui-même qui est en cause que ses abus et – vous l'avez dit – ce sujet est d'abord européen.

Le Gouvernement souhaite donc l'adoption rapide des volets « social » et « accès au marché » du paquet mobilité, car ils renforceront l'équilibre de la concurrence au sein du marché communautaire.

Nous approchons du but : la commission du transport et du tourisme du Parlement européen vient d'adopter les projets de compromis qui seront examinés en séance plénière au début du mois de juillet prochain. La France aura ainsi obtenu le renforcement des capacités de contrôle et de lutte contre le cabotage systématique.

Dans l'attente, le Gouvernement demeure très attentif au respect des règles en vigueur. Je tiens à rappeler que les donneurs d'ordre doivent eux aussi exercer leur devoir de vigilance en la matière.

Enfin, mon collègue chargé des transports, Jean-Baptiste Djebbari, a donné instruction aux services de contrôle pour que la lutte contre les infractions au cabotage soit une priorité d'action.

M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour la réplique.

M. Jean-François Rapin. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, bien qu'elle ne soit pas intégralement satisfaisante : ce que nous demandons, c'est la suspension du cabotage, conformément aux règlements européens.

J'attire votre attention sur le fait qu'il est un peu dommage d'en arriver, sur ce sujet, à une question dans cet hémicycle. Les organisations représentatives des transporteurs ont sollicité le Gouvernement par courrier il y a plus d'un mois et demi. Vous me dites qu'une concertation est engagée, mais, sur ce point précis, elles n'ont pas reçu de réponse. Voilà pourquoi elles nous ont sollicités en tant que parlementaires.

Enfin, la commission des affaires européennes du Sénat, dont je suis vice-président, a déjà déposé, il y a quelque temps, une proposition de résolution européenne portant précisément sur la difficulté d'application du cabotage routier dans notre pays. Les règles en vigueur ne s'appliquent pas forcément. Nous ne savions pas alors qu'une crise arrivait, mais – on le sent – cette dernière renforce encore les inégalités dans ce métier.

Je demande donc au Gouvernement de faire preuve, sur ce sujet, de la plus grande vigilance et de la plus grande fermeté !

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