Question de M. ALLIZARD Pascal (Calvados - Les Républicains) publiée le 04/06/2020

M. Pascal Allizard attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, à propos de la régulation carcérale.
Il rappelle que pour faire face à l'urgence de la crise sanitaire, et en raison du manque de moyens de protection pour les agents de l'administration pénitentiaire et les détenus, le Gouvernement a incité à la libération de milliers de personnes incarcérées.
Alors que la France est entrée en phase de déconfinement depuis plusieurs semaines, et que par ailleurs la commission de délits n'a pas cessé, une circulaire n°JUSD2012602C du 20 mai 2020 inquiète les agents pénitentiaires et les magistrats, circulaire qui pour certains apparaît comme « la plus laxiste que n'ait jamais diffusée la chancellerie».
Ce texte qui met l'accent sur une « politique volontariste de régulation carcérale » souligne notamment que la peine unique de stage, celle de travail d'intérêt général ou la peine de détention à domicile sous surveillance électronique, sont destinées à devenir des sanctions de référence de certains contentieux, en lieu et place de l'emprisonnement. Elle appelle à ce que la reprise des mises à exécution des peines fermes, particulièrement celles de courte durée « n'aboutisse pas à de nouveaux pics de surpopulation carcérale ».
Par conséquent, il souhaite savoir si le Gouvernement entend maintenir un taux d'occupation normal des prisons uniquement par les peines alternatives et la mansuétude des juridictions ou s'il compte investir dans de nouveaux établissements, une politique pénale plus ferme et un meilleur accompagnement des détenus en vue de réussir leur réinsertion.

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Transmise au Ministère de la justice


Réponse du Ministère de la justice publiée le 27/05/2021

Au début de la crise sanitaire, la baisse sans précédent de la population pénale de près de 13 000 détenus a été le fait, pour moitié, d'une diminution de l'activité pénale, elle-même consécutive à une réduction de la délinquance de rue pendant le premier confinement, et pour une autre moitié des dispositifs de libération anticipée des détenus en fin de peine, mis en œuvre sur le fondement de la loi d'urgence sanitaire. Ces dernières dispositions visaient à limiter la propagation de l'épidémie de covid-19 dans les détentions. Ces mesures justifiées par la situation sanitaire, n'avaient pas vocation à être pérennisées. Elles ont cessé le 10 août 2020, un mois après la fin de l'état d'urgence sanitaire. Ce dispositif de régulation carcérale équilibré prenait en compte la sécurité des français. Le gouvernement n'a pas fait le choix d'une amnistie générale. Ces libérations anticipées, qui ont concerné 6 500 détenus auxquels il ne restait que quelques semaines de prion à purger, ont été décidées au cas par cas par un magistrat. Les détenus condamnés pour des faits de crime, de terrorisme, pour des violences intra familiales ou des actes graves commis en détention ont par ailleurs été exclus de ces dispositifs. Enfin, ces mesures n'ont généré que très peu de réincarcérations. Les dispositions de la loi du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, doivent permettre de poursuivre la maitrise des taux d'occupation des établissements pénitentiaires en favorisant le prononcé des alternatives à l'incarcération. Ce texte interdit le prononcé d'une peine d'emprisonnement ferme inférieure ou égale à 1 mois et pose le principe d'un aménagement de peine ab initio pour les peines inférieures ou égales à 1 an. Il favorise, notamment par la systématisation de la libération sous contrainte, l'accompagnement à la sortie de prison et diversifie le panel des peines : sursis probatoire, détention à domicile sous surveillance électronique, peines de stage, travail d'intérêt général. Il facilite, enfin, le recours à l'assignation à résidence sous surveillance électronique avec pour objectif d'accroître son prononcé comme alternative à la détention provisoire. La circulaire du garde des Sceaux du 20 mai 2020 portant sur la mise en œuvre des dispositions relatives aux peines de la loi du 23 mars 2019 préconise en effet une politique visant à maitriser les effectifs dans les détentions en mettant l'accent sur le choix des peines pour leur redonner sens et efficacité. Mais l'amélioration des conditions de détention et la maitrise des effectifs dans les établissements pénitentiaires passe également par un programme immobilier ambitieux de 15.000 nouvelles places de prison en deux phases. La tranche des 7.000 places est déjà très avancée. L'administration pénitentiaire dispose aujourd'hui de 61.100 places opérationnelles contre 58.000 au début du mandat. La crise sanitaire a eu des impacts sur un certain nombre de chantiers mais 5.300 places supplémentaires seront livrées d'ici 2023. Le volet 8.000 places est désormais engagé. Il comprend 15 opérations dont les sites sont identifiés, pour des livraisons d'établissements pénitentiaires à l'horizon 2026/2027.

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