Question de Mme GOY-CHAVENT Sylvie (Ain - NI) publiée le 11/06/2020

Mme Sylvie Goy-Chavent attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la situation très préoccupante de la filière viticole française.

Depuis octobre 2019, en représailles au conflit entre Boeing et Airbus, les États-Unis ont décidé de sanctionner les vins tranquilles français. Début 2020, c'est le marché chinois qui s'est considérablement ralenti suite au confinement du pays. Il faut ajouter à cela la situation à Hong Kong et le ralentissement du marché britannique suite au Brexit. Au final, ce sont les principaux marchés extérieurs de la filière vitivinicole qui sont fortement perturbés.

La crise liée au Covid-19 est venue lourdement aggraver ces tendances. La fermeture administrative des cafés, hôtels et restaurants (CHR) a complètement stoppé les ventes de vin par ce canal, soit une disparition de 30 % du chiffre d'affaires de la filière. Pour les vins effervescents, la situation est particulièrement dramatique avec une baisse de chiffre d'affaires de 32 % sur l'ensemble de la période de confinement. En Champagne, la profession anticipe une baisse d'un tiers des ventes, soit 1,7 milliard de manque à gagner.

Le Gouvernement a présenté les premiers éléments d'un plan de soutien à la filière. À ce jour, seuls les contours de la mesure distillation de crise sont connus. Elle est la seule mesure officiellement actée et publiée et encore son budget de 155 millions d'euros ne provient qu'à hauteur de 75 millions du budget de l'État. Le reste est pris sur les fonds annuels alloués à la viticulture par l'Europe.

Au regard des milliards d'euros de soutien annoncés pour l'automobile, Air France, et l'aéronautique, la filière viticole ressent une grande injustice et estime ne pas être perçue par les pouvoirs publics comme le poids lourd de la balance commerciale française qu'elle est pourtant avec 600 000 emplois directs et indirects, sans compter les emplois dans le secteur de la restauration. De ce point de vue, un taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur nos produits consommés sur place accroîtrait la marge des restaurateurs et faciliterait la relance.

C'est pourquoi, lors du troisième projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2020 annoncé en conseil des ministres le 10 juin, les viticulteurs seront très attentifs aux propositions concernant les exonérations de charges sociales. La presse évoque un plan de 3 milliards pour 500 000 entreprises. Il est donc difficile de dire à ce stade si ce plan est à la hauteur des enjeux pour les 85 000 exploitations viticoles.

Pour compléter ce plan, la filière viticole transmettra dans les prochains jours plusieurs propositions dont un dispositif de neutralisation de l'impact fiscal et social de l'augmentation des volumes de stocks (produits invendus du fait de la crise sanitaire) sur option de l'exploitant. Avec l'arrêt brutal de la commercialisation, les stocks vont peser sur la fiscalité des exploitations car ce sont des actifs. Il est indispensable d'alléger la fiscalité de ces stocks.

Les viticulteurs proposent également de ne pas fiscaliser l'utilisation, en 2020, des sommes antérieurement épargnées au titre de la dotation pour aléas ou de la déduction pour épargne de précaution (DEP). Afin que le montant des prélèvements lié à cette utilisation de cette épargne n'ait pas d'impact négatif et n'entrave pas le redressement financier des exploitants agricoles et viticoles, il est proposé un dispositif exceptionnel et ponctuel de neutralisation non seulement sur le résultat fiscal réalisé en 2020, mais également sur le revenu professionnel 2020 qui servira d'assiette aux cotisations sociales des agriculteurs.

Ce PLFR « 3 » doit être l'occasion d'apporter à la viticulture une réponse à la hauteur de la crise qu'elle subit.

- page 2604

Transmise au Ministère de l'agriculture et de l'alimentation


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 10/09/2020

La propagation du covid-19 place le monde entier dans une situation inédite, à laquelle il convient de faire face collectivement à un triple défi, sanitaire, économique et social. Le Gouvernement est aux côtés des viticulteurs pour les aider dans cette crise globale. Des mesures de soutien aux entreprises sans précédent ont été mises en place pour toutes les filières et notamment la filière viticole dès le début de la crise (fonds de solidarité, prêt garanti par l'État, report de cotisations sociales et d'impôts, chômage partiel…). Au niveau européen, la France a défendu l'octroi de flexibilités aux États membres pour mettre en œuvre les mesures des programmes sectoriels de l'Union européenne pour la viticulture et qui ouvrent la possibilité dans ces programmes de financer un dispositif de distillation de crise. Malgré tout, la crise sanitaire due au virus covid-19 a touché de plein fouet le secteur de la viticulture, qui est particulièrement dépendant de secteurs fermés administrativement du 17 mars au 2 juin 2020 et des marchés à l'exportation. La filière avait déjà été fortement touchée par l'instauration des sanctions américaines sur les importations de vin en octobre 2019. Ce sont plus de 85 000 entreprises (exploitations, caves coopératives, négociants vinificateurs) qui sont concernées partout en France. Dans ce contexte, le Gouvernement a rencontré l'ensemble des représentants de la filière à de nombreuses reprises pour faire le point de la situation et étudier comment améliorer le soutien qui leur est octroyé. À l'issue de ces échanges, le Gouvernement a annoncé un dispositif de soutien exceptionnel et spécifique au secteur pour assurer la stabilité du marché et la poursuite de son activité : des exonérations de cotisations sociales pour les très petites entreprises et petites et moyennes entreprises les plus en difficulté ; un dispositif de distillation de crise à hauteur de 211 millions d'euros (M€), annoncé pour des crédits nationaux et des crédits européens du programme d'aide national dans le secteur vitivinicole ; une aide au stockage privé à hauteur de 35 M€ ; une relance de la demande d'un fonds de compensation au niveau européen. C'est au total un plan de soutien spécifique à la filière viticole qui s'élève à 246 M€, hors exonération de cotisations sociales. La stratégie de déconfinement progressif déployée par le Gouvernement à partir du 11 mai 2020 a permis de constater une évolution favorable de la situation sanitaire et de décider la réouverture des cafés et restaurants, à partir du 2 juin 2020. Dans ce contexte, la filière vitivinicole devrait pouvoir relancer ses activités et retrouver progressivement ses débouchés. L'ensemble du Gouvernement, dont le ministère de l'agriculture et de l'alimentation, reste pleinement mobilisé pour suivre l'évolution de la situation.

- page 4061

Page mise à jour le