Question de M. SEGOUIN Vincent (Orne - Les Républicains) publiée le 25/06/2020

M. Vincent Segouin attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur l'encouragement de l'acquisition par les agriculteurs de certains agroéquipements dans le cadre de la transition écologique.

À l'Assemblée nationale, le ministre de l'agriculture a, à juste titre, évoqué la nécessité « d'accompagner une filière des agroéquipements » qui permettrait aux agriculteurs de s'équiper collectivement de matériels de pulvérisation plus précis (buses anti-dérive, guidage satellite et demain précision à la plante par capteur...) en rappelant l'objectif de réduction des produits phytosanitaires d'ici à la fin 2020.

Le 22 janvier 2020, le Sénat a auditionné le président de l'institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (INRAE), qui a affirmé : « Grâce à l'amélioration des agroéquipements et à l'apport du numérique, nous pouvons réduire jusqu'à 60 % l'utilisation de produits en fonction des cultures et des stades de végétation. (...) Il y a un virage à ne pas manquer lors de la prochaine politique agricole commune (PAC) avec la mise en place d'aides spécifiques à la transition agroécologique ».

Pour rappel, lors de l'examen de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, le Sénat avait adopté un dispositif de suramortissement sur les biens technologiques acquis par les agriculteurs, afin « de réduire leurs expositions aux risques climatiques ou sanitaires, d'améliorer la veille sur le bien-être et la santé des animaux et de réduire le recours aux produits phytopharmaceutiques ». Cette mesure n'avait finalement pas été reprise dans la version définitive du texte.

Pourtant, ces équipements, dont les mises en vente ont déjà débuté, permettraient de réduire, pour certains, l'usage des produits phytopharmaceutiques dans une proportion pouvant aller jusqu'à 90 %.

Ces technologies particulièrement précises sont malheureusement délaissées par les agriculteurs en raison du coût d'investissement très important. Compte tenu de leurs externalités positives directes pour le consommateur et le citoyen, il conviendrait d'en favoriser le déploiement au-delà de la problématique du coût.

Dans cette logique, il pourrait être souhaitable d'instaurer un mécanisme de suramortissement des options numériques et automatiques des agroéquipements pour inciter les agriculteurs à investir dans ces nouveaux agroéquipements intelligents afin de leur permettre d'avoir accès à l'industrie du futur et de réduire significativement l'utilisation des produits phytopharmaceutiques.

Afin de répondre plus rapidement à la demande du Gouvernement et à l'attente de la société, il lui demande quelles mesures fiscales et réglementaires il envisage de mettre en place pour accompagner les agriculteurs dans cette transition, et si la piste du dispositif de suramortissement sur les biens technologiques acquis par les agriculteurs est une option retenue par le Gouvernement.

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Transmise au Ministère de l'agriculture et de l'alimentation


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 06/08/2020

Le ministère de l'agriculture a la volonté de créer une filière stratégique des agroéquipements et insiste sur le rôle de l'agroéquipement, avec le biocontrôle, dans la transition agroécologique. L'agriculture de précision, notamment, a le potentiel de contribuer à la réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires. Ainsi, le ministère de l'agriculture soutient le lancement d'une stratégie d'accélération dans le cadre du pacte productif avec la mise en œuvre d'une feuille de route partagée entre l'État et les acteurs de la filière. L'un des objectifs de cette stratégie d'accélération sera d'encourager le déploiement dans les exploitations agricoles des technologies éco-efficientes. Des échanges réguliers ont lieu avec les acteurs du secteur des agroéquipements pour la construction de cette stratégie d'accélération. Depuis de nombreuses années, le ministère a également intégré le levier des agroéquipements pour réduire significativement l'emploi des produits phytopharmaceutiques dans différents dispositifs d'aides qui ont été mis en œuvre. Ces dispositifs font partie intégrante du grand plan d'investissement 2018-2022, qui a pour objectif d'accompagner la transformation du modèle agricole en facilitant l'accès des agriculteurs au financement bancaire. Il a été décidé de jouer sur la complémentarité des modes d'intervention pour permettre aux entreprises agricoles d'être, déjà, en capacité d'investir pour moderniser leurs outils et de s'engager, tant dans l'appropriation des nouvelles innovations, que dans une évolution de leurs pratiques (évolutions des itinéraires techniques, reconfiguration des systèmes de production…) notamment vers l'agro-écologie et l'agriculture biologique. Il s'agit : - du plan de compétitivité et d'adaptation des exploitations agricoles (PCAE), mis en œuvre depuis 2014 par les régions, qui permet aux agriculteurs de s'équiper en matériels de pulvérisation plus performants et plus précis, ou en matériels de substitution d'utilisation de pesticides ; - de l'accompagnement, par l'État et à travers le programme des investissements d'avenir (concours d'innovation i-Nov), de l'innovation des petites et moyennes entreprises et startups qui conçoivent, développent et fabriquent des outils, logiciels et équipements agricoles performants favorables à la transition écologique ; - approche uniquement subventionnelle. Ces dispositifs d'aides vont être complétés par le lancement d'un dispositif national destiné à accompagner les agriculteurs qui investissent dans des matériels performants, permettant de limiter les distances de traitement et la quantité de produits phytosanitaires épandus. Ce dispositif, qui sera géré par FranceAgriMer et doté d'un budget de 30 millions d'euros, se déploiera jusqu'à fin 2020. Enfin dans le cadre de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019, il a été introduit le dispositif de déduction pour épargne de précaution (DEP) qui permet, sous certaines conditions, de déduire du résultat imposable des sommes mobilisables ultérieurement en cas de besoin, y compris pour financer des investissements agricoles. C'est pourquoi réintroduire un dispositif de suramortissement pour certains agroéquipements performants n'est pas souhaitable car d'une part, il ferait double emploi avec la DEP et d'autre part, la multiplication des dispositifs pour un même objet n'est pas compatible avec le respect de la réglementation sur les aides d'État. Il faut enfin souligner que d'autres alternatives existent pour réduire significativement l'emploi des produits phytopharmaceutiques, notamment la reconception du système de conduite de l'exploitation, les modifications des pratiques culturales, le recours à l'agri-biodiversité, le passage à la certification haute valeur environnementale (HVE) ou à l'agriculture biologique, ou encore l'emploi de produits de bio-contrôle. Autant de voies vers l'agro-écologie que le ministère de l'alimentation et de l'agriculture continue d'encourager.

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