Question de M. PATIENT Georges (Guyane - LaREM) publiée le 02/07/2020

M. Georges Patient interroge M. le Premier ministre sur les enseignements que le Gouvernement va tirer de l'épidémie de Covid-19 en Guyane, qui sert de véritable révélateur des forces et faiblesses de l'organisation sanitaire en Guyane. L'agence régionale de santé (ARS), dont l'une des missions est l'anticipation, la préparation et la gestion des crises sanitaires est au centre du dispositif avec la préfecture. L'épidémie de Covid-19 qui semblait sous contrôle pendant de nombreuses semaines (la Guyane a été l'une des premières régions touchées dès les premiers jours de mars) a fini par éclater en l'espace de quelques jours puisque le nombre de malades double chaque semaine depuis le début du mois de juin et que le pic épidémique est attendu pour la mi-juillet. Pendant trois mois le virus a très peu circulé et aujourd'hui il est hors de contrôle au moment même où la Guyane doit faire face à deux autres épidémies, de dengue et de leptospirose. Les mesures prises pour anticiper et préparer la phase que connaît aujourd'hui la Guyane en renforçant les moyens matériels hospitaliers, les capacités de test, en faisant appel à la réserve sanitaire, se révèlent insuffisantes. À défaut d'un nombre suffisant de lits de réanimation, il est nécessaire de procéder à des évacuations sanitaires vers les Antilles. L'hôpital de campagne de la sécurité civile en cours de déploiement va certainement apporter un peu de marge mais pas suffisamment en vue du pic épidémique. Aussi, il lui demande quelles évolutions et quels moyens il compte engager pour apporter une réponse à la hauteur des enjeux immédiats, par le déploiement de l'hôpital militaire utilisé à Mulhouse par exemple, mais aussi à plus long terme pour que la Guyane soit de manière durable en capacité de faire face à de futures crises sanitaires et s'il compte confier à l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) et à l'inspection générale de l'administration (IGA) une mission afin de comprendre les tenants et aboutissants qui ont conduit à cette situation dramatique.

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Transmise au Ministère des solidarités et de la santé


Réponse du Ministère auprès du ministre des solidarités et de la santé - Autonomie publiée le 22/07/2020

Réponse apportée en séance publique le 21/07/2020

M. le président. La parole est à M. Georges Patient, auteur de la question n° 1244, transmise à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Georges Patient. Madame la ministre, la gestion chaotique de l'épidémie de covid-19 a été un révélateur de plus des grandes faiblesses de l'organisation sanitaire en Guyane. Si nous demeurons le seul territoire français encore gravement touché, avec, aujourd'hui, plus de 6 700 personnes infectées, près de 150 patients hospitalisés, dont 34 en réanimation, et surtout 38 décès, ce n'est pas le fait d'un simple hasard : c'est parce que les mesures prises pour anticiper et préparer la phase que connaît aujourd'hui la Guyane se sont révélées inadaptées et insuffisantes. Une fois de plus, il a fallu réagir dans l'urgence, avec les insuffisances de l'urgence !

Les Guyanais sont excédés. Ils ne supportent plus d'être discriminés, d'être considérés comme des citoyens de seconde zone en matière de santé, ce bien primordial, ce droit pour tous. Un mot d'ordre de grève générale est d'ailleurs lancé pour ce jour même.

Le temps est plus que venu de doter la Guyane d'un système de santé opérant, qui soit à même de faire face durablement à tous les enjeux sanitaires du territoire.

La Guyane est située à plus de 8 000 kilomètres de l'Hexagone, à plus de 2 000 kilomètres des Antilles françaises, et certaines de ses zones intérieures sont très éloignées des centres hospitaliers : il faut impérativement une organisation propre, adaptée à ces réalités !

La conférence régionale de la santé et de l'autonomie, la CRSA, de Guyane a déposé une contribution en ce sens au Ségur de la santé. Elle porte notamment sur la création d'un CHU, réclamée depuis plus de vingt ans, et le redimensionnement des centres délocalisés de prévention et de soins de Saint-Georges-de-l'Oyapock et de Maripasoula en hôpitaux de proximité.

Les élus, les syndicats, les collectifs citoyens et les organisations professionnelles : tous ont relayé ces demandes en remettant une motion au Premier ministre lors de son récent déplacement en Guyane. Le ministre de la santé l'y accompagnait. Je sais qu'il doit présenter aujourd'hui même le second volet des mesures du Ségur de la santé, qui porte précisément sur l'organisation du système de santé.

Vous l'aurez compris : la réponse du Gouvernement est vivement attendue !

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie. Monsieur le sénateur Georges Patient, votre question traduit la légitime inquiétude de votre territoire ; vous le savez, le Gouvernement est très attentif à cette situation.

Vous l'avez rappelé, le Premier ministre, le ministre des outre-mer et le ministre de la santé se sont rendus mi-juillet en Guyane pour faire le point sur la situation sur place.

L'ensemble des mesures prises depuis plusieurs semaines jouent un rôle important dans la relative stabilisation de la situation épidémique en Guyane.

Face à un important afflux de patients et au risque de saturation des capacités de prise en charge réanimatoire, une stratégie de réponse a été mise en place en Guyane. Elle repose sur quatre types de mesures et a pour objectif de maintenir la qualité des soins.

Premièrement, l'envoi de matériels – respirateurs, appareils de monitorage, pousse-seringues électriques, etc. – et de consommables permettra d'armer des lits de réanimation, ou encore de répondre à un risque de pénurie de dispositifs médicaux nécessaires à la prise en charge des patients.

Deuxièmement, l'envoi de médicaments nécessaires à la prise en charge de ces patients – hypnotiques, myorelaxants, etc. – permettra de répondre aux tensions d'approvisionnement.

Troisièmement, le renforcement en professionnels de santé permettra d'atténuer et de mieux répartir la charge de travail qui pèse sur les professionnels, qui, vous l'avez rappelé, sont mis à rude épreuve, d'armer des lits supplémentaires et d'assurer les relèves.

Quatrièmement et enfin, l'évacuation sanitaire de patients permettra d'éviter l'engorgement de services risquant d'être saturés et d'accueillir de nouveaux patients.

Depuis plusieurs semaines, les établissements de santé de Guyane prennent de nombreuses mesures pour renforcer les capacités hospitalières et faire face au covid-19, notamment dans les services de médecine et de réanimation : réorganisation des services, augmentation du temps de travail, déprogrammations, etc.

Dans une logique de solidarité nationale, un appel à mobilisation a été lancé par le centre de crise sanitaire le 20 juin dernier, afin d'identifier des volontaires susceptibles de rejoindre les rangs de la réserve sanitaire pour être déployés en renfort sur le territoire guyanais. Le Gouvernement, sachez-le, est pleinement engagé, et nous ferons face à l'épidémie ensemble !

M. le président. La parole est à M. Georges Patient, pour la réplique.

M. Georges Patient. Madame la ministre, je salue les mesures d'urgence qui ont pu être prises, mais on sait très bien ce qui se passe quand on agit dans l'urgence. Ce que nous voulons, en Guyane, ce sont des solutions durables : la création d'un CHU et le renfort de médecins cubains, eu égard à la désertification médicale de notre territoire !

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