Question de M. PELLEVAT Cyril (Haute-Savoie - Les Républicains-R) publiée le 15/10/2020

Question posée en séance publique le 14/10/2020

M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Cyril Pellevat. Madame la ministre, voilà près de deux ans que la loi relative à l'accueil des gens du voyage et à la lutte contre les installations illicites, issue de la proposition de loi de mon collègue Loïc Hervé et de celle du regretté Jean-Claude Carle, a été adoptée. Si ce texte, sur lequel nous avons travaillé avec la ministre Jacqueline Gourault, a marqué une avancée dans la lutte contre les installations illicites, force est de constater qu'il n'a pas été suffisant.

De fait, pas un mois ne passe sans que je sois contacté par des élus désespérés par des installations illicites sur leur commune et hors d'état de lutter contre celles-ci, qui s'accompagnent la plupart du temps de nombreuses incivilités. La situation n'est plus soutenable pour les élus, mais aussi pour les agriculteurs et les chefs d'entreprise qui font face, eux aussi, à ces installations illicites.

L'État a bien évidemment des devoirs envers ces communautés, mais ces dernières en ont aussi envers la société : elles doivent notamment participer au vivre-ensemble et ne pas se prévaloir uniquement de leurs droits. En l'absence de respect de ces règles, des mesures et sanctions efficaces et dissuasives doivent être prises.

Pour améliorer la gestion de ces situations, ce qui est souhaitable pour tous, et atteindre un certain niveau d'apaisement, plusieurs leviers s'offrent au Gouvernement. J'espère, madame la ministre, que vous saurez les saisir.

Tout d'abord, il me paraît important d'organiser une évaluation de l'application de la loi n° 2018-957. Cette démarche permettrait, dans un premier temps, de mieux se rendre compte des faiblesses, mais aussi des forces de ce texte. Avoir ainsi une vision claire de son efficacité ouvrirait la porte, dans un second temps, à un texte complémentaire renforçant les dispositifs en vigueur et en créant de nouveaux, pour combler les lacunes constatées.

À ce sujet, l'expérience du terrain fait apparaître une réactivité variable des services de l'État en matière d'expulsion des gens du voyage en cas d'occupation illicite. De ce fait, il serait opportun d'adresser aux préfets une circulaire leur demandant de répondre à ces situations dans les meilleurs délais.

Par ailleurs, il convient de noter que les schémas départementaux d'accueil sont pour l'essentiel respectés, alors même que les aides de l'État sont en nette diminution.

Madame la ministre, plusieurs dispositions figurant dans le texte initial de notre proposition de loi avaient été refusées par le Gouvernement et supprimées par l'Assemblée nationale, au motif qu'elles étaient trop répressives. Il avait été avancé que les dispositions retenues seraient suffisantes pour lutter contre les installations illicites.

M. le président. Il faudrait en venir à votre question…

M. Cyril Pellevat. Il serait malhonnête de continuer à affirmer que ces mesures sont pleinement satisfaisantes. Madame la ministre, quelle sera la position du Gouvernement pour accompagner les élus confrontés à ces situations qui restent intenables ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Loïc Hervé. Très bien !


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur - Citoyenneté publiée le 15/10/2020

Réponse apportée en séance publique le 14/10/2020

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur Cyril Pellevat, je vous remercie de cette question intéressante, à laquelle je vais répondre au nom du ministre de l'intérieur, Gérald Darmanin, qui se trouve en ce moment même auprès des policiers de Juvisy.

Comme vous le savez fort bien, l'expression « gens du voyage » regroupe une multiplicité de populations aux origines culturelles et géographiques diverses, mais dont le point commun est d'avoir un mode de vie originellement fondé sur la mobilité. Un tiers d'entre eux conservent un mode de vie nomade, un tiers d'entre eux sont semi-sédentaires, un tiers d'entre eux vivent de manière totalement sédentaire.

La loi de 2018 dont vous avez été l'un des initiateurs, et qui a été travaillée avec Mme Jacqueline Gourault au nom du ministère de l'intérieur, a permis des avancées fortes, dont vous avez rappelé certaines ; je pense en particulier à la procédure d'information préalable du préfet et du conseil départemental par les groupes de plus de 150 caravanes trois mois avant leur arrivée, destinée à faciliter l'organisation des passages.

Vous avez également assoupli les conditions permettant de saisir le préfet pour mettre en demeure les gens du voyage de quitter les terrains occupés illicitement, avec, bien évidemment, l'emploi de la force si nécessaire. Par ailleurs, si le maire dispose d'une aire d'accueil conforme au schéma départemental d'accueil des gens du voyage, il peut désormais interdire le stationnement en dehors des terrains aménagés sur sa commune, même si elle appartient à une intercommunalité.

Surtout, avec cette loi, vous avez aggravé les sanctions pénales en cas d'occupation d'un terrain en réunion et sans titre.

M. Bruno Retailleau. Nous connaissons la loi !

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Monsieur Retailleau, il me paraît important de rappeler les évolutions déjà réalisées, qui appellent celles qui viendront.

S'agissant de vos propositions, monsieur Pellevat, je rappelle que les préfectures établissent déjà chaque année un bilan des grands passages estivaux des gens du voyage, pour faire état des difficultés qu'elles ont pu rencontrer. Par ailleurs, l'État verse chaque année aux collectivités territoriales divers concours financiers, notamment la dotation globale de fonctionnement. (Vives exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Loïc Hervé. Ou ce qu'il en reste !

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Néanmoins – c'est ici, mesdames, messieurs les sénateurs, que je réponds à l'interpellation qui m'a été adressée –, j'entends votre proposition de circulaire : le ministre de l'intérieur, Gérald Darmanin, le garde des sceaux, Éric Dupond-Moretti, et moi-même allons étudier immédiatement cette proposition, pour que les décisions d'expulsion prononcées par la justice soient exécutées dans de meilleurs délais lorsque des gens du voyage occupent un terrain illégalement – en prenant en compte, bien évidemment, tous les enjeux d'humanité, liés notamment à la scolarisation.

Monsieur le sénateur, la réponse à votre demande de circulaire est donc : oui !

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