Question de Mme CHAUVIN Marie-Christine (Jura - Les Républicains) publiée le 03/12/2020

Mme Marie-Christine Chauvin attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le devenir plus que précaire de l'ensemble des structures jurassiennes de la filière viticole (coopératives, négoce et viticulteurs indépendants).
Elle se demande, en effet, si les particularités de la filière ont bien été prise en compte car produire du vin demande beaucoup d'investissements à long terme et un fort besoin de trésorerie.
La spécificité des vins d'appellation d'origine protégée (AOP) du Jura (vin jaune par exemple) fait qu'un temps relativement long s'écoule entre la récolte et la vente, ce qui impacte inévitablement les actifs qui sont immobilisés et les finances de ces viticulteurs. De plus, il y a des contraintes logistiques importantes puisque les vignes et les vins en cours d'élevage nécessitent des soins au jour le jour ce qui empêche toute fermeture définitive des établissements. Un maintien des équipes sur place s'avère nécessaire afin de préserver les récoltes futures et assurer la qualité indispensable des produits.
Toutes ces raisons font que la filière jurassienne a peu utilisé le mécanisme du chômage partiel et qu'elle continue à payer chaque mois charges et contributions fiscales.
À cela s'ajoute le fait que les principaux marchés que sont le tourisme et la restauration sont à l'arrêt, que les marchés à l'export et de la grande distribution sont impactés ainsi que les salons nationaux et internationaux tant grand public que professionnels. Tous ces éléments ne font que contribuer à réduire drastiquement les ventes.
Or, les viticulteurs jurassiens étaient déjà dans une situation très délicate en raison du Brexit avec la réduction des exports vers le Royaume-Uni et du litige Airbus avec la « taxe Trump » qui a réduit les ventes vers les États-Unis, la crise sanitaire due à la Covid-19 n'ayant fait que rajouter aux problèmes déjà existant. Aujourd'hui, la profession maintient son activité et son emploi mais est dans l'incapacité de vendre ses vins.
Tous ces éléments rendent ces entreprises très fragiles. Elle lui demande alors, aux vues de toutes ces problématiques, s'il ne serait pas envisageable d'accorder à cette profession pour une période de six mois, une exonération des charges salariales, une exonération des cotisations et contributions patronales collectées par la mutualité sociale agricole (MSA) et l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) et enfin un décalage du remboursement des prêts garantis par l'État (PGE). Ces mesures permettraient de limiter l'impact de la crise sanitaire tout en concédant à ces entreprises la possibilité de poursuivre leur activité et de maintenir l'emploi dans le bassin jurassien si important pour l'économie et la vie locale du département.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 07/10/2021

Le Gouvernement est pleinement mobilisé pour soutenir le secteur de la viticulture, particulièrement dépendant de secteurs fermés administrativement pendant de longs mois et des marchés à l'exportation. Ce sont plus de 85 000 entreprises (exploitations, caves coopératives, négociants vinificateurs) qui sont concernées. Le Gouvernement a demandé et obtenu au niveau européen des flexibilités dans la mise en œuvre des mesures des programmes sectoriels de l'Union européenne pour la viticulture et qui ouvrent la possibilité dans ces programmes de financer un dispositif de distillation de crise ainsi qu'une aide au stockage privé. Par ailleurs, à l'initiative de la France, des négociations au niveau européen ont permis d'obtenir la prolongation de ces mesures en 2021. Le Gouvernement a rencontré l'ensemble des représentants de la filière à de nombreuses reprises pour faire le point de la situation. Un dispositif de soutien exceptionnel et spécifique au secteur a été mis en place pour assurer la stabilité du marché et la poursuite de son activité avec : - un dispositif de distillation de crise à hauteur de 211 millions d'euros (M€), financé par des crédits nationaux et des crédits européens du programme national d'aides viticole ; - une aide au stockage privé à hauteur de 58 M€ dont 45 M€ de crédits nationaux ; Ce plan de soutien spécifique à la filière viticole s'élève donc à 269 M€. En outre, à l'occasion du conseil des ministres des 22 et 23 mars 2021, la France a signé une déclaration avec 13 autres États membres demandant à la Commission européenne d'augmenter le soutien apporté au secteur vitivinicole via les PNA. La France demande ainsi un abondement des crédits européens, permettant de financer les mesures de crise sans impacter le financement des autres mesures habituelles du PNA dont la filière a aussi besoin. Enfin, la filière viticole initiale a été intégrée à la liste S1, lui octroyant un accès privilégié au fond de solidarité. Les filières agricoles, et notamment la viticulture, peuvent bénéficier, sous conditions de mesures d'exonération, de réductions et de remise partielle de créances fiscales et sociales, ainsi que d'un dispositif novateur d'aide au paiement des cotisations pour 2020. En particulier, les entreprises les plus touchées peuvent exceptionnellement demander à ce que le calcul des cotisations dues en 2020 repose sur les revenus perçus en 2020, et non sur les revenus des années précédentes. Un dispositif d'exonération des cotisations patronales pour la filière viticole a par ailleurs été voté à l'assemblée nationale dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Outre ces dispositifs exceptionnels, les entreprises peuvent également saisir la commission des chefs de service financier pour bénéficier des délais de paiement lorsqu'elles rencontrent des difficultés de paiement pour s'acquitter de leurs dettes fiscales et sociales. Au-delà de ces mesures qui doivent permettre à la filière viticole de faire face à cette crise inédite, le plan de Relance permettra d'accompagner les viticulteurs et les entreprises de la filière, qui sont déjà nombreux à avoir entamé cette transition, vers un modèle plus durable, respectueux de l'environnement et économiquement robuste. En effet, le volet agricole du plan de relance, auquel sont consacrés 1,2 milliard d'euros, amplifiera le soutien au secteur en s'inscrivant pleinement dans les priorités du Gouvernement pour la relance : la transition écologique, la compétitivité et la cohésion territoriale. En particulier, un axe du plan de Relance vise au renouvellement et au développement des agro-équipements nécessaires à la transition agro-écologique et à l'adaptation au changement climatique, avec deux dispositifs gérés par FranceAgriMer. La filière viticole a ainsi bénéficié d'un programme d'aides à l'investissement ouvert à toutes les filières végétales pour réduire l'usage des produits phytosanitaires (135 M€), afin de permettre aux agriculteurs d'investir dans des outils plus sobres en ressources, tout en rendant l'agriculture française plus moderne et compétitive et plus rémunératrice pour l'agriculteur. Un programme d'aide à l'investissement pour du matériel de protection contre les aléas climatiques (100 M€) qui frappent durement cette filière est également mis en place, et a été abondé à la suite du gel exceptionnel du mois d'avril. Par ailleurs, des incitations fiscales bénéficient aux viticulteurs : le maintien d'un crédit d'impôt pour l'agriculture biologique, et la création d'un crédit d'impôt pour accompagner la certification « haute valeur environnementale » à hauteur de 2 500 € pour les nouveaux certifiés. Le programme « plantons des haies » soutient également les agriculteurs, dont les viticulteurs, qui souhaitent favoriser la biodiversité autour de leurs cultures. Enfin, les viticulteurs peuvent bénéficier d'un accompagnement pour réaliser un bilan carbone de leur exploitation et ainsi identifier les leviers à mettre en œuvre pour inscrire son exploitation dans la transition énergétique. Par ailleurs, les États-Unis et l'Union européenne ont annoncé vendredi 5 mars avoir trouvé un accord visant à suspendre provisoirement, pour une durée initiale de quatre mois, l'ensemble des droits de douane additionnels qui touchaient durement la filière viticole depuis le 18 octobre 2019 dans le cadre du contentieux Airbus-Boeing. La suspension est effective depuis le 11 mars 2021 et a été prodiguée pour cinq ans en juin. Les États-Unis et l'Union européenne poursuivent et intensifient actuellement les négociations pour trouver une solution définitive sur la question des subventions au secteur aéronautique. Le Gouvernement est vigilant à ce qu'une issue puisse être trouvée rapidement à ce conflit. Le Gouvernement est ainsi pleinement mobilisé pour aider la filière viticole à faire face à cette crise majeure et l'accompagner dans cette transition écologique, sociale et territoriale.

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