Question de M. RIETMANN Olivier (Haute-Saône - Les Républicains) publiée le 18/02/2021

M. Olivier Rietmann attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur les projets du Gouvernement quant à l'implantation des commissariats dans les départements ruraux.

Le Livre blanc de la sécurité intérieure, publié le 14 novembre 2020, prend en compte les enjeux de la sécurité intérieure du 21ème siècle et veut placer l'humain au cœur de l'action. Parmi les préconisations émanant de ce Livre blanc, figure une réorganisation de la répartition territoriale entre police nationale et gendarmerie. La présence d'un commissariat de police serait déterminée par un nouveau seuil de population de 30 000 habitants alors qu'il est aujourd'hui de 20 000 habitants. Mécaniquement, les départements les plus ruraux se verront totalement exclus des zones police nationale, y compris pour leur chef-lieu. La Haute-Saône serait alors placée dans un tel cas, ce qui ne manque pas de raviver l'inquiétude des personnels du commissariat de Vesoul exposés depuis plusieurs années à des incertitudes récurrentes.

Premièrement, il le remercie de lui indiquer les critères objectifs sur lesquels se fonderait cette réorganisation, en particulier en termes d'efficacité comparée entre la police nationale et la gendarmerie au regard des formes de criminalité et de délinquance urbaine qui gagnent aussi les petites agglomérations.

Deuxièmement, il lui demande d'assurer à la Représentation nationale et aux élus locaux que la dimension budgétaire n'est pas le critère principal de cette préconisation du Livre blanc.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur - Citoyenneté publiée le 14/07/2021

Réponse apportée en séance publique le 13/07/2021

M. le président. La parole est à M. Olivier Rietmann, auteur de la question n° 1538, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

M. Olivier Rietmann. Madame la ministre, en novembre dernier, après une longue gestation, le Livre blanc de la sécurité intérieure était enfin dévoilé.

Une proposition figurant dans le titre intitulé « Renouveler le pacte de protection et de sécurité » a retenu toute mon attention, et suscite surtout beaucoup d'inquiétude. Il est proposé de définir une nouvelle méthode pour partager sur le territoire national les compétences de la police et de la gendarmerie.

Pour mémoire, selon la règle en vigueur, la responsabilité de la police nationale dans une commune est soumise au cumul de deux critères : une population supérieure à 20 000 habitants et une délinquance ayant les caractéristiques de celle des zones urbaines.

Le Livre blanc préconise une évolution de ce seuil de population. Au-dessous de 30 000 habitants, le principe serait de confier le territoire à la gendarmerie. Entre 30 000 et 40 000 habitants, l'attribution reviendrait à la force la mieux adaptée aux caractéristiques du territoire et au-dessus de 40 000 habitants, le principe serait de confier la compétence à la police nationale.

Mécaniquement, les départements les plus ruraux se verraient donc totalement exclus des zones de la police nationale, y compris pour leur chef-lieu.

La Haute-Saône serait placée dans un tel cas, ce qui ne manque pas de raviver l'inquiétude des personnels du commissariat de Vesoul, qui sont exposés depuis plusieurs années à des incertitudes récurrentes.

Je ne doute pas de l'opportunité de faire évoluer les critères de répartition des forces de sécurité et je partage l'ambition de passer d'un « modèle quantitatif » à un « modèle qualitatif reposant sur une analyse locale, pragmatique et objective », comme on peut le lire dans le Livre blanc.

Pourtant, la première évolution proposée est l'augmentation du seuil ! Je vous remercie d'avance, madame la ministre, de m'expliquer cette contradiction et, surtout, les critères objectifs sur lesquels se fonderait cette réorganisation, qui ne doit avoir qu'un seul but : assurer à tout citoyen un service de sécurité publique le mieux adapté aux réalités du territoire sur lequel il se trouve.

Assurez-nous enfin que la dimension budgétaire n'est pas le critère principal de cette préconisation, ce qui serait de mon point de vue insupportable.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur Olivier Rietmann, apporter des réponses concrètes aux problèmes de délinquance et d'insécurité de nos concitoyens exige des moyens. C'est pourquoi le Gouvernement a décidé le recrutement de 10 000 policiers et gendarmes supplémentaires sur le quinquennat et la mobilisation de moyens financiers, notamment du plan de relance, pour moderniser et améliorer les équipements et moyens d'intervention des forces de l'ordre.

Les questions de gouvernance, d'organisation et de doctrines opérationnelles sont essentielles pour une adaptation constante aux évolutions de la délinquance, pour répondre à l'objectif majeur du renforcement de la présence sur la voie publique et pour donner aux policiers et gendarmes les moyens d'assumer leurs missions dans les meilleures conditions d'efficacité possible.

La police nationale a d'ores et déjà accompli ou engagé d'importantes réformes en la matière. Je pense ainsi à la création d'échelons zonaux en sécurité publique et en police judiciaire et à l'expérimentation, dans trois départements, de directions départementales de la police nationale.

Les coopérations et complémentarités entre la police et la gendarmerie, notamment la répartition de leurs forces sur le territoire, constituent également un enjeu important de notre dispositif de sécurité et un sujet auquel sont particulièrement attentifs les élus locaux.

Une organisation optimale des forces de sécurité de l'État est en effet essentielle pour développer les synergies et les mutualisations et pour assurer leur plein ancrage dans les territoires.

Trois vagues de redéploiements territoriaux ont été opérées entre la police et la gendarmerie entre 2002 et 2014 pour adapter leur organisation aux évolutions de l'urbanisation et de la délinquance, accroître l'homogénéité des zones de compétence et permettre aux deux forces de renforcer leur complémentarité et d'optimiser leur potentiel opérationnel.

À l'occasion de son déplacement en Haute-Garonne le 9 octobre 2020, le Premier ministre a indiqué vouloir ouvrir la voie à une réflexion prudente et concertée sur le redécoupage des zones de police et de gendarmerie. Cette ouverture fait écho au Livre blanc de la sécurité intérieure, qui préconise de mieux faire coïncider la répartition des forces avec les caractéristiques spécifiques de chaque territoire.

M. le ministre de l'intérieur, Gérald Darmanin, a demandé à la direction générale de la police nationale et à la direction générale de la gendarmerie nationale de poursuivre les travaux sur le sujet. Il s'agit notamment d'objectiver les améliorations espérées. En tout état de cause, dans la Haute-Saône comme ailleurs, toute éventuelle évolution se fera d'abord en concertation avec les élus locaux et les parlementaires.

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