Question de M. BILHAC Christian (Hérault - RDSE) publiée le 18/02/2021

M. Christian Bilhac attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur le problème du traitement des déchets inertes du bâtiment dans le cadre de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, qui prévoit la création d'une future filière de responsabilité élargie du producteur (REP).

L'union nationale des industries de carrières et matériaux de construction (UNICEM) s'étonne de la méconnaissance à la fois de la qualité des résultats obtenus et de la réalité du fonctionnement de la filière de reprise et du traitement des déchets inertes du bâtiment issus des matériaux minéraux en matière d'économie circulaire. L'UNICEM craint que l'on crée un dispositif administratif tentaculaire et onéreux, éloigné du terrain et des réalités des chantiers. Ce dispositif serait financé par le paiement d'une écocontribution par les metteurs sur le marché.

Les membres de l'UNICEM et leurs partenaires, les entreprises des travaux publics routiers, regroupées au sein de Routes de France et les entreprises de déconstruction affiliées au syndicat des entreprises de déconstruction, dépollution et recyclage (SEDDRe), sont conscients de leurs obligations et de leur rôle dans la préservation des ressources naturelles et sont engagés depuis de nombreuses années dans des démarches responsables. Ils gèrent de façon raisonnée les ressources, dans une logique de circuit court et d'économie circulaire. Ainsi depuis plus de 25 ans, la filière avec ses 1 500 sites qui maillent le territoire, permet une valorisation des déchets à hauteur de 76 %, taux le plus élevé en France après celui de la filière des métaux, supérieur à l'objectif national de valorisation défini à l'article L. 541-1 du code de l'environnement.
Or, le Gouvernement veut soumettre les déchets inertes du bâtiment à la REP. L'UNICEM est ses partenaires s'interrogent sur le diagnostic « erroné » qui selon eux donne une vision faussée de la résorption des dépôts sauvages de déchets. Ils regrettent qu'aucune concertation avec la filière professionnelle n'ait eu lieu et craignent sa déstabilisation, avec à la clé, la perte de nombreux emplois situés majoritairement dans les zones rurales.
Aussi, il lui demande si elle compte mettre en place une concertation avec tous les acteurs concernés, l'UNICEM, Routes de France et le SEDDRe, et si elle envisage de retirer les déchets inertes du périmètre de la REP.

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Réponse du Ministère de la transition écologique publiée le 11/03/2021

Le secteur du bâtiment et des travaux publics est le premier producteur de déchets en France. Réduire cette production et veiller à diminuer leur dangerosité, les gérer sans mettre en danger la santé humaine et sans nuire à l'environnement est depuis longtemps une préoccupation environnementale majeure pour notre société. Il est nécessaire de rappeler d'abord que l'insuffisance du nombre d'installations permettant d'entreposer ces déchets dans l'attente de leur traitement ainsi que le coût de la gestion des déchets pour les petites entreprises est la principale cause de la prolifération de dépôts illégaux de ces déchets, et est souvent à l'origine d'actes de malveillance et même de violences. Chacun a en mémoire le décès en 2019 du maire de Signes qui avait pris sur le fait deux individus en train de déverser des gravats en pleine nature. Par ailleurs, faire évoluer le traitement de ce type de déchets vers davantage de recyclage est primordial. Aujourd'hui, le taux global de valorisation des déchets du bâtiment varie, selon les différentes sources, de 48 à 64 %. Ce taux varie fortement selon l'activit頖 60 à 80 % pour la démolition, 10 à 30 % pour la réhabilitation, 40 à 60 % pour la construction neuve – et selon le type de déchets – 60 à 70 % pour les déchets inertes, 30 à 50 % pour les déchets non dangereux non inertes. Si, de façon globale, on pourrait considérer que le recyclage des déchets du bâtiment est assez satisfaisant, les chiffres ci-dessus démontrent qu'il reste d'importants progrès à réaliser. À cet effet, la loi contre le gaspillage et pour une économie circulaire du 10 février a acté il y a un an la création, à partir de 2022, d'une filière de responsabilité élargie du producteur (REP) pour la gestion des déchets du bâtiment. Fondée sur le principe du « pollueur-payeur », comme toutes les autres filières REP, le dispositif consiste à exiger des fabricants, importateurs et distributeurs qu'ils participent financièrement à la gestion des déchets issus de leurs produits. La question de la prise en compte des déchets inertes dans le champ d'application de la filière a fait l'objet de débats lors de l'examen de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire. Ce qui a été retenu par le Parlement, c'est que la nouvelle filière sur les « produits ou matériaux de construction du secteur du bâtiment destinés aux ménages ou aux professionnels » prendrait bien en charge les déchets inertes du bâtiment mais exclurait ceux des travaux publics, déjà très largement valorisés, ce qui conduit l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) à mener des réflexions sur des mécanismes de redevance appropriés à cette distinction. Cette nouvelle filière devrait permettre de développer le nombre de points de collecte des déchets du bâtiment afin que le territoire soit mieux couvert qu'actuellement et, l'admission des déchets étant gratuite, de lutter ainsi contre les dépôts illégaux de ces déchets. À cet effet, les capacités d'entreposage, de tri et de traitements existantes seront prises en compte par l'ADEME dans le cadre de l'exercice de préfiguration, en distinguant bien entre les déchets du bâtiment et ceux des travaux publics qui ne sont pas soumis aux obligation de la filière REP. Cette filière permettra surtout de mutualiser les flux et d'optimiser la collecte et le traitement afin de mieux valoriser les matériaux issus de ce traitement et d'atteindre ainsi réellement les objectif s fixés par le code de l'environnement et la législation européenne. Il est en effet nécessaire de redéfinir fermement la valeur des déchets du bâtiment dont la valorisation permettra d'épargner des ressources naturelles, comme le sable, dont on sait qu'elles ne sont pas inépuisables et dont le coût a considérablement augmenté en raison de la pression de la demande de tels matériaux par les états émergents.

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